En 2011, dans le cadre de l’ouverture du musée Jean Cocteau collection Séverin Wunderman, Lucien Clergue a fait don à la Ville de Menton d’un ensemble de 240 photographies originales, liées à l’oeuvre de Jean Cocteau. Il y expose de nouveau deux ans plus tard.
La Camargue, Picasso et des nus sensuels : amoureux du sud, Lucien Clergue, décédé samedi, s'est battu pour faire reconnaître la photo comme un art, créant à Arles le plus grand festival d'Europe, fréquenté par des milliers d'amateurs.
Appareil en bakélite
"J'ai fait mes premières photos avec un appareil en bakélite qui était un jouet", a raconté ce fils d'épiciers arlésiens. Plus d'un demi-siècle plus tard, il fait entrer la photographie sous la coupole à l'Académie des Beaux-Arts.Un manière d'hommage rendu à son oeuvre, mais aussi à sa vocation de défenseur du 8e art, qu'il a contribué à faire reconnaître en créant en 1969 les Rencontres de la photographie d'Arles. La manifestation a attiré cet été quelque 83.000 visiteurs.
Lucien Clergue est pourtant venu à la photographie un peu par hasard. Il apprend d'abord le violon, mais n'a pas les moyens de fréquenter le conservatoire. Il commence à travailler à l'usine. "La photo, je la pratiquais entre midi et 2 heures, par passion", a-t-il expliqué de sa voix rocailleuse à l'accent provençal.
##fr3r_https_disabled##"Les Clergue d'Arles" au Musée Réattu jusqu'au 4 janvier 2015. Ouvert du mardi au dimanche de 10h à 18h. Tarifs : de 3 à 7 euros.
La rencontre: Picasso
Survient alors une de ces rencontres exceptionnelles qui vont marquer sa vie d'homme et d'artiste. "Un jour de 1953, je suis allé aux Arènes d'Arles où Picasso venait d'assister à une corrida etje l'ai interpellé pour lui montrer mes photos. C'étaient des recherches, avec des flous, des bougés. Il m'a encouragé à continuer".
Cette même année, dans un magazine, il découvre avec enthousiasme un nu sculptural du photographe américain Edward Weston. C'est désormais dans cette veine que s'inscrira
son travail sur le corps féminin.
Cocteau et Saint-John Perse
En 1955, il montre à Picasso ses derniers travaux, des photos de flamands morts dans les sables. "Il m'a accueilli à bras ouverts. J'ai eu un choc". Il va devenir un ami de la famille, jusqu'à la mort du peintre en 1973."Picasso, je lui dois tout".
Autre rencontre, celle en 1955 du guitariste Manitas de Plata en Camargue: il l'aide à faire son premier disque, devient son manager pendant un an, puis son directeur artistique.
En 1960, Clergue quitte enfin son usine pour se consacrer entièrement à son art. Ruines, enfants costumés en saltimbanques, corridas, gitans, images de Picasso et de Jean Cocteau, nus féminins dans les vagues, paysages camarguais... tels sont les thèmes récurrents de son oeuvre.
800.000 photographies
Le photographe sera soutenu par Jean Cocteau qui préface l'ouvrage "Corps mémorables" (Seghers) où les photos de nus accompagnent des poèmes d'Eluard. Il collabore aussi avec le poète Saint-John Perse pour le livre "Genèse" avec des extraits du poème "Amers".Il est l'auteur d'une centaine d'ouvrages et de plus de 800.000 photographies.
Dans ce portrait qui lui est consacré, Lucien Clergue explique sa conception de la photo au cours d'un stage et pendant un cours de nu donné sur la plage. Il parle de l'importance du choix d'un modèle, de son désir d'exalter la beauté, de son action pour le développement des Rencontres photographiques d'Arles et pour la création d'ateliers de photographie