Jean-Maurice Agnelet va savoir aujourdhui si la Cour de révision lui accorde un nouveau procès. Condamné en appel à 20 ans de prison, Agnelet est accusé d'avoir assassiner Agnès Le Roux, disparue il y a 35 ans.
La commission de révision des condamnations pénales doit se prononcer lundi en début d'après-midi sur la requête déposée par Jean-Maurice Agnelet.
Une énigme judiciaire
La disparition d'Agnès Le Roux, 29 ans, est une énigme judiciaire qui remonte à la Toussaint 1977. Ce week-end-là, l'héritière du casino niçois Le Palais de la Méditerranée se volatilise après être partie avec sa Range Rover. Ni voiture ni corps ne seront jamais retrouvés.
Après avoir bénéficié d'un non-lieu en 1985, son amant, l'ancien avocat niçois Jean-Maurice Agnelet, est finalement renvoyé aux assises.
Acquitté en 2006, il est condamné en 2007 en appel. Il a toujours clamé son innocence. Ouverte en cas d'éléments nouveaux dans une affaire judiciaire, la requête se base ici sur les déclarations d'un ancien truand marseillais affirmant savoir qui a véritablement tué la jeune femme.
Un voyou décédé aurait avoué le meurtre
Auteur d'un ouvrage de confessions paru en mars 2011, Jean-Pierre Hernandez, 75 ans, ancien proche du parrain marseillais Gaëtan Zampa, affirme qu'un de ses amis voyous, Jeannot Lucchesi, lui avait confié, quelques mois avant sa mort en 1987, qu'il avait tué l'héritière du Palais de la Méditerranée, dans le cadre d'un contrat. "C'est moi qui suis monté à Nice (...) Cela ne m'a pas plu, j'étais dégoûté, mais on m'a demandé de le faire et je l'ai fait", lui aurait dit Lucchesi. "Quand ça a été fait, aurait-il poursuivi, (...) on a jeté le corps à la mer avec toutes ses affaires. Pour la voiture, on l'a emmenée à Marseille (...) pour la faire écraser."
Pour Hernandez, la condamnation d'Agnelet est une erreur judiciaire.
Le rappel des faits en images :
"Une campagne de communication"
Lors de l'audience à huis clos devant la commission de révision le 18 juin dernier, l'avocat général avait estimé que, si ce témoignage était certes nouveau, il n'était "pas suffisamment sérieux", selon Me François Saint-Pierre, conseil de Jean-Maurice Agnelet.
Mais, pour l'avocat, le niveau de sérieux d'un témoignage, "c'est à la cour d'assises (qui rejugerait Jean-Maurice Agnelet si sa requête aboutissait,
NDLR) de l'apprécier".
Un autre témoignage a été versé au dossier. Il s'agit de celui du fils d'un ancien du milieu niçois, dont le père aurait dit à l'époque, "la fille, on va s'en occuper". "Les éléments retenus contre Agnelet ne sont pas plus sérieux que ceux qui ont été avancés par Agnelet" dans une affaire où il n'y a "aucune preuve matérielle", ni "témoin des faits", ni "scène de crime", estime Me Saint-Pierre.
"Tout cela, c'est une campagne de communication", estime Jean-Charles Le Roux, le frère de la victime, "mais je serais extrêmement surpris que la commission de révision donne raison à Agnelet". "Jean-Pierre Hernandez prétend être un caïd, mais on a l'impression que c'est de la vantardise pure", poursuit-il. "Il parle de quelqu'un qui est mort depuis 25 ans. A ce compte-là, on peut élucider nombre de meurtres!"
"C'est fatigant, c'est même pesant, mais ce n'est pas inattendu. Du fond de sa prison, il continue à réclamer la propriété de l'argent d'Agnès qui est toujours bloqué en Suisse", souffle Jean-Charles Le Roux, "il ne s'arrêtera jamais".
Les révisions de condamnations pénales restent rares en France: ce type de procédure n'a abouti que huit fois en matière criminelle depuis la Seconde Guerre mondiale.