Deux réunions ont lieu ce mardi, l'une à Paris, l'autre à Nice, pour tenter d'y voir plus clair dans le déroulement des audiences. Dans quel ordre organiser les auditions? Faut-il plaider individuellement ou collectivement? A cette heure, 865 victimes se sont constituées partie civile, mais il pourrait y en avoir plus à l'ouverture du procès, le 5 septembre prochain.
A Paris, c'est le Président de la cour d'assises spéciale qui reçoit le collectif "14-7 avocats" constitué pour coordonner l'aide aux victimes. Pendant ce temps à Nice, représentants de l'Etat, de l'institution judiciaire et avocats font le point sur les conditions de retransmission du procès à Acropolis. Il reste encore de nombreuses questions en suspens.
Combien y'aura-t-il de parties civiles?
C'est, à cette heure, la grande inconnue. Actuellement, 865 victimes se sont constituées parties civiles. C'est peu, au regard des 2466 victimes indemnisées ou en voie de l'être par le FGTI (fonds de garantie des victimes). Le collectif d'avocats a déjà lancé un appel pour inciter le plus grand nombre à témoigner, persuadé que c'est la multiplication des récits qui permettra d'établir une vérité judiciaire fiable. Il organisera, de nouveau, une consultation gratuite le 10 juin prochain, à la bibliothèque des avocats ,19 rue Alexandre Mari. Un traducteur russe sera présent. Déjà sur le site de l'ordre des avocats, des fiches explicatives sont proposées en russe, en anglais, en italien, en allemand et en arabe. Information importante : les victimes de l'attentat du 14 juillet pourront se constituer parties civiles jusqu'au réquisitoire des avocats généraux. Mais les réunions en amont doivent permettre de préparer l'intégration au procès de ces nouvelles victimes, et les premiers jours d'audience seront sans doute consacrés à l'examen de leurs demandes. Toutes les parties civiles constituées en dernière minute obtiendront leur badge d'accès au procès au plus tard en 72h. Au total, 5 semaines seront consacrées à leur audition. Pour rappel, l'attaque terroriste du 14 juillet 2016 a fait 86 morts et 450 blessés, mais le nombre de victimes psychologiques et de victimes indirectes est bien plus élevé.
Quels seront les critères retenus pour la constitution de parties civiles?
Là aussi, les avocats se battent auprès de l'institution judiciaire pour faire accepter le plus grand nombre de dossiers. Car si, au départ, le juge d'instruction a pu avoir une vision très large des choses, il a ensuite restreint le périmètre géographique à la trajectoire du camion, n'acceptant d'intégrer au dossier que les personnes ayant encouru un risque mortel. Certains primo-intervenants (policiers ou pompiers) demandent aussi à être reconnus comme victimes, et pas seulement comme témoins. Paradoxalement, des personnes peuvent accéder au statut de partie civile sans être indemnisées par le Fond de garantie, et inversement.
Comment organiser les audiences?
C'est une question cruciale. Faut-il envisager de faire témoigner les victimes dans l'ordre chronologique des faits, en suivant la trajectoire funeste du camion ? Cela peut paraitre logique, mais certains avocats craignent que les victimes indirectes (familles de personnes blessées ou décédées) se sentent moins légitimes à prendre la parole après les témoignages de personnes présentes au moment des faits. Il pourrait donc être décidé de n'appeler à la barre les victimes directes qu'à la toute fin des auditions. Le collectif d'avocats plaide pour un nouveau type de plaidoirie : la plaidoirie collective, une "plaidoirie de mémoire pour les personnes décédées".
Comment accueillir les victimes à Nice ?
C'est historique, le procès sera retransmis en direct dans l'espace Méditerrannée du palais Acropolis. Des travaux auront lieu cet été pour aménager plusieurs espaces, garantissant un accès séparé aux victimes qui ne souhaitent pas être en contact avec les médias. Seront mis à leur disposition un bureau de soutien psychologique, une salle de repos, une salle de retransmission propre (une autre étant prévue pour la presse et le public), des box d'entretien avec les avocats. Le lieu pourra accueillir 500 victimes et 200 journalistes. Les parties civiles qui ne souhaitent assister au procès, ni en présentiel à Paris, ni en distanciel à Nice, auront accès à une web-radio qui diffusera l'audience. Mais, contrairement à la retransmission à Acropolis, la web-radio sera diffusée en léger différé, pour éviter que, seules chez elles, sans accompagnement psychologique, les victimes soient confrontées à des auditions trop douloureuses.
Celles qui le souhaitent peuvent contacter le collectif d'avocats par mail à l'adresse : 1407.avocats@gmail.com
Initialement programmé du 5 septembre à la mi-novembre, le procès pourrait durer jusqu'aux vacances de Noël si nécessaire. 8 personnes seront jugées, dont 3 pour association de malfaiteurs terroriste.