Ce jeudi 11 janvier 2024 s'ouvre à Lyon le procès du commissaire Rabah Souchi, poursuivi pour avoir provoqué par ses ordres les violences dont a été victime Geneviève Legay à Nice. Une audience qu'attend avec impatience cette militante de toujours.
Près de cinq ans après la charge policière qui a failli lui coûter la vie aux abords de la place Garibaldi à Nice, Geneviève Legay se prépare à se rendre à Lyon.
Ce jeudi, elle sera sur le banc des parties civiles face au commissaire Rabah Souchi, poursuivi pour avoir, par ses ordres, provoqué des violences par dépositaire de l'autorité publique (un policier de la compagnie départementale d'intervention des Alpes-Maritimes) ayant entrainé une incapacité totale de travail (ITT) de quatre mois chez la retraitée niçoise.
Nous l'avions rencontrée à l'automne dernier, quelques jours avant le procès qui a finalement été renvoyé au 11 janvier.
France 3 Côte d'Azur : Le 23 mars 2019 à 11 h 42, vous êtes grièvement blessée lors d’une charge policière. Vous vous souvenez des instants qui ont précédé votre perte de connaissance ?
Geneviève Legay : "avec des amis, on se retrouve devant la rue des Bastions, et là j’avais toujours mon drapeau de la paix que je tournais en disant « liberté de manifester »… à un moment, je pivote et je vois des CRS casqués, la mine patibulaire, franchement quand je les ai vus j’ai pris peur.
Et là, je me dis « Geneviève, qu’est-ce qui va t’arriver ? », et puis je me dis « mais non il ne va rien t’arriver, tu as un drapeau de la paix et tu ne fais rien à part dire Liberté de manifester », et là, c'est le trou noir."
Vous ne vous souvenez pas des sommations ?
Geneviève Legay : "non, je n’ai jamais entendu de sommation. Je ne me rappelle de rien. Jamais je pensais qu’il y aurait une charge… Il ne se passait rien, tous les policiers étaient calmes, tout le monde était calme… Je me réveille à 6 h 30 à l’hôpital Pasteur. Mon pronostic vital était engagé."
Les médecins ont dit à mes filles que j’allais peut-être mourir, et que de toute façon si je vivais je serai un légume à vie. J’avais cinq fractures du crâne.
Geneviève Legay
Il y a une seule personne poursuivie, le commissaire Souchi. Vous comprenez cette décision ?
Geneviève Legay : "Non, ça ne me satisfait pas. J’avais demandé qu’on porte plainte contre toute la chaine : celui qui m’a frappé, Souchi, le préfet, le procureur, Castaner (ministre de l’Intérieur de l’époque) et Macron. Le tribunal n'a retenu que Souchi. Ça me laisse un petit peu un goût amer."
Qu’est-ce que vous espérez de ce procès ?
Geneviève Legay : "on a gagné quelque chose d’important. C’est la première fois en 70 ans qu’un donneur d’ordre va passer au tribunal (c'est inexact : fin 2018, un commissaire de police a été condamné à cinq mois de prison avec sursis pour blessures involontaires ayant entraîné une incapacité de plus de trois mois après avoir ordonné de disperser un attroupement à Grenoble en 2007).
Je me bats pour l’affaire Legay, mais je me bats aussi pour toutes les violences policières… Il y en a marre que les violences policières ne soient pas reconnues par l’État ! L’État donne des ordres implicites, et il y a beaucoup de morts… Donc je voudrais faire de ce procès un procès des violences policières, qu’on les condamne une fois pour toutes !"
Dans quel état de santé êtes-vous ?
Geneviève Legay : "J’ai toujours zéro odorat, j’ai pas tous les gouts, j’ai 30 % de moins à l’oreille droite, quand je marche, je titube, et ça fait plus de quatre ans que je suis chez un psy."
À LIRE AUSSI > "On ne poursuit pas la bonne personne" affirme l'avocat du commissaire Rabah Souchi.