Régénération cellulaire, observation robotisée et plancton : Méditerranée et océans décryptés à Villefranche-sur-Mer

La baie de Villefranche-sur-Mer dans les Alpes-Maritimes est un site exceptionnel d'exploration du plancton. A la pointe de la recherche en océanographie et en biologie du développement,l'Institut de la Mer y attire chaque année des scientifiques du monde entier et forme les océanographes de demain.

La présence à la surface de la mer de plancton venant des grandes profondeurs, c'est l'atout du site de Villefranche-sur-Mer dans les Alpes-Maritimes.
Dès le début du 19ème siècle, des scientifiques ont manifesté un grand intérêt pour ce lieu. En 1982, un premier laboratoire y est installé, celui de Jules Barrois, éminent scientifique Lillois, lauréat des palmes académiques et chevalier de la légion d'honneur.

Depuis, le site a attiré des scientifiques du monde entier et abrite aujoud'hui l'une des plus grande collection de plancton au monde. 
 

Implantée dans les bâtiments historiques de la Darse de Villefranche-sur-Mer, l'Institut de la Mer de Villefranche est aujourd'hui un établissement de renommée internationale dans la recherche en océanographie et en biologie du développement, placé sous la double tutelle du CNRS et de Sorbonne Université
 

 
Ici les champs de recherches sont nombreux, environs 200 scientifiques sont présents sur ce site chaque année.

L'étude de la résilience des organismes marins face aux changements climatique,  la capacité de régénération de méduses ou l'exploration de zones marines jamais atteintes par l'homme constituent autant d'enjeux remarquables des équipes. 
 
 

La question de la biodiversité dans cette rade n’a pas du tout été épuisée. Elle a été la raison pour laquelle les chercheurs sont venus se positionner sur les rives de Villefranche mais on n’en a toujours pas une connaissance complète de cette biodiversité qui est, et cela nous sommes sûr, en train d’évoluer avec le réchauffement climatique, avec la pollution, avec la fréquentation humaine au bord de la rade.

Elisabeth Christians, Directrice de l'Institut de la Mer de Villefranche (IMEV) et Professeure Sorbonne Université (SU)

Un site planctonique remarquable

Pas un jour ne se passe sans que la Sagitta 3 ne prenne la mer pour tester des innovations développées par des ingénieurs ou effectuer des prélèvements de plancton au "Point B", situé la sortie de la rade entre le Cap Ferret et le Cap de Nice.
 

C'est un des rares points dans le monde a avoir une telle continuité dans le temps de prélèvement standardisé qui permettent de comprendre l'évolution des populations de plancton en même temps que l'évolution des conditions climatiques.

Marc Picheral, Ingénieur de recherche CNRS, Laboratoire d’Océanographie de Villefranche (LOV) - IMEV)

Depuis plus de 60 ans, ce rituel a été maintenant avec une telle régularité que les scientifiques ont ainsi pu constituer l'une des plus grande collection de plancton au monde. 
 
 

L'une des plus grandes collections planctoniques du monde

Plus de 30 000 échantillons prélevés dans le monde entier depuis des décennies sont réunis à Villefranche-sur-Mer. C’est unique en Europe. 
Cette collection n’est pas un musée, elle sert aux scientifiques du monde entier. L’idée étant de pouvoir comparer les données actuelles aux données anciennes.   
  

Beaucoup de grands projets, de grands suivis d’observation sont ici abrités. Nous conservons des échantillons prélevés lors des expositions Tara Océan.   

Amanda Elineau, Ingénieur d'étude et responsable technique du Centre des Collections Planctoniques (IMEV)

     

Le ZooScan, une innovation de l’IMEV  
 

L’institut de la mer de Villefranche met au point un certain nombre d’innovations technologiques qui contribue à faciliter et améliorer le suivi des milieux marins. Le ZooScan en est un exemple. 
Il ressemble à un scanner classique, mais est capable de bien plus ! Il analyse les échantillons de plancton. Cet appareil est capable d’identifier, de classer par espèces et de comptabiliser les organismes marins qui les composent.  
 

 

Avant, ce travail de comptage prenait beaucoup plus de temps, au moins 8h pour le faire à la main. À partir d’un échantillon de plancton, il fallait reconnaître les espèces une par une avec un microscope. Le ZooScan sait reconnaître une crevette d’un copépode instantanément.

 Explique un étudiant en master 2, sciences de la mer

Ces prélèvements constituent une base de données très importante pour le suivi des mers et océans car elle permet d’analyser ce que les scientifiques appellent la variabilité spatiale et la variabilité temporelle, c’est-à-dire l’évolution du milieu marin.  
 


Une histoire de la recherche marine

L'histoire de la station zoologique de Villefranche devenue l'Institut de la Mer de Villefranche s'est construite sur cette proximité à l'océan ouvert qu'est la rade de Villefranche.
Une rade ouverte sur des fonds marins très profonds et dans lequel le plancton océanique de la Méditerranée peut venir se piéger.
Un trésor pour les biologistes marins. 
 

Vers une robotisation de l'observation de la vie marine
 

Hervé Claustre dirige un programme international de surveillance des océans. C’est une véritable révolution dans l’exploration du milieu marin. Une surveillance réalisée aux moyens de balises immergées dans les profondeurs et mers des océans et dotés de capteurs capables de mesurer un nombre de données hallucinant. 
 

On a ici un capteur qui mesure la lumière qui pénètre dans l’océan, ici un capteur qui mesure à la fois la concentration de phytoplancton, mais aussi les particules, cet autre capteur mesure la concentration en oxygène dans l’océan, celui-la température et la salinité, cet autre le pH. On multiplie notre capacité à observer l’océan par un facteur 100 à 1000. 

Hervé Claustre, Directeur de recherche CNRS, Laboratoire d'océanographie (LOV) - IMEV



"La vie marine aurait la capacité de se restaurer d’ici à 2050" 

 
Chloé Carbonne est doctorante et dirige une expérimentation sur les coraux dans l’objectif de mieux comprendre leur capacité de résistance aux changements climatiques. Elle étudie deux espèces de coraux. L’une d’elle provient de la petite île italienne d'Ischia

Là-bas, des petites bulles de CO2 émanent du sol et se diffusent dans la mer, c’est lié aux caractéristiques volcaniques de la zone. Les coraux qui vivent à Ischia ont donc subi une acidification de leur milieu, proche de celle à laquelle les scientifiques s’attendent à la fin du siècle.  
   

Nous comparons des coraux qui proviennent de ces milieux acidifiés avec d’autres qui proviennent de milieux normaux et nous leur faisons subir des acidifications pour voir s'il y a eu l'acquisition de tolérances. Pour l’instant, nous n’observons pas de modification de croissance ni de leur respiration. Il semblerait donc qu’ils soient assez solides pour résister à ces futures conditions.  

Chloé Carbonne, Doctorante


Cette expérimentation s’inscrit dans un projet plus vaste qui est d’étudier les relations entre climat et mer Méditerranée qui comme tous les océans est soumise à plusieurs perturbations liées aux rejets de CO2 (réchauffement, augmentation de l’acidité).  

L'éléphant de mer... Intéressant aussi !

Les baleines à bosses sont 40 000 aujourd’hui. En 1968, on ne comptait que quelques centaines d’individus. 
L’éléphant de mer du Nord-Est lui aussi est un exemple surprenant. 
Il ne restait que 20 de ses individus reproducteurs en 1980, ils sont 100 000 aujourd’hui. Jean-Pierre Gattuso, directeur de recherche à l’IMEV, a contribué à la publication d’une étude aux conclusions pleines d’espoir quant à la résilience de la vie marine.  

Si on met en place les bonnes mesures : réduire la pollution, réguler la pêche et la chasse aux mammifères marins, réduire les émissions de gaz à effet de serre et s’attaquer au problème très important du changement climatique, il est possible de reconstituer à 80% la vie marine telle qu’elle était il y a 2 siècles.    

Jean-Pierre Gattuso, Directeur de recherche CNRS au Laboratoire d'océanographie (LOV) - IMEV

Les organismes marins....  pluie de science de la régénération cellulaire 

Savez-vous qu’il existe des organismes marins capables de régénérer totalement leur organisme ? Ceux sont les ascidies.
L’équipe du laboratoire de biologie du développement de l’Institut de la mer de Villefranche tente de percer les mystères de ce processus. Car ces organismes sont nos cousins, nous partageons avec eux de nombreux outils moléculaires, de nombreux gènes. 
 

C'est comme-ci chaque lundi, leur corps tout entier était nouveau. Nous pensons que le secret de leur pouvoir de régénération se trouve dans leurs cellules sanguines. 

Stefano Tiozzo, Directeur de recherche CNRS, Laboratoire de biologie du développement (IMEV)


Multiplier le nombre de méduses en les coupant

Lucas Leclere tente lui de percer les mystères de la régénération cellulaire de la méduse Clytia. En effet, son équipe a découvert que si l’on coupe une de ces méduses en morceaux, chaque morceau sera capable de régénérer entièrement une nouvelle méduse. 
Absolument fascinant ! Un processus cellulaire que l’on retrouve chez l’humain pour la cicatrisation.
  

Pour réaliser cette reconstruction, la méduse va utiliser un rôle que l’on ne connaissait pas des fibres musculaires. C’est la topologie des muscles qui va définir si une bouche par exemple, doit être reformée ou non.

Lucas Leclere, chargé de recherche au laboratoire de biologie du développement (IMEV)   


Un jour, peut-être l’homme parviendra à imiter les processus de régénération de ces organismes vivants. 
Quoi qu’il soit, les organismes marins et plus largement la vie marine restent un champ d’exploration passionnant, surtout à l'heure des grands enjeux liés aux bouleversements climatiques.  
 
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