Plus d'une cinquantaine de sapeurs-pompiers du SDIS 13 se sont mis en grève ce mercredi 29 janvier, à l'appel de la CGT et du Syndicat Autonome. Si ce chiffre peut paraître relativement faible, il cacherait un malaise plus profond de la profession, en manque constant d'effectifs.
Ils ont décidé de tirer la sonnette d'alarme. Les sapeurs-pompiers professionnels du SDIS 13 sont en grève ce mercredi 29 janvier, pour demander davantage d'effectifs notamment. La CGT et le Syndicat Autonome, qui ont tous deux appelés à la mobilisation, ont rencontré à la mi-journée la direction du SDIS, pour tenter de trouver un accord autour du recrutement de nouveaux pompiers professionnels.
Selon des chiffres communiqués par la direction du SDIS Bouches-du-Rhône à France 3 Provence-Alpes, "sur 1152 pompiers professionnels, dont 683 sont de garde aujourd’hui, 56 en grève", 32 d'entre eux étant maintenus en service.
Le nombre de pompiers professionnels en question
Des chiffres qui peuvent paraître relativement faibles, mais qui cachent un malaise bien plus grand, à en croire Pierre Davisseau, pompier professionnel et président du Syndicat Autonome du SDIS 13. Selon lui, les pompiers professionnels en mesure d'aller sur le terrain ne seraient pas 1152 dans les Bouches-du-Rhône, mais bien 980.
1152 pompiers pro, c’est avec tous les officiers, ils tirent par les cheveux
Pierre Davisseau,Président du Syndicat Autonome du SDIS 13.
Un chiffre qu'il estime bien trop bas pour assurer un service correct, estimant qu'il s'agit du "ressenti de tous les pompiers professionnels". "En vingt ans, on a augmenté les effectifs de 200 à 300 pompiers professionnels seulement dans le département", pointe-t-il. Laurent Guilloteau, de la CGT, rajoute que "le SDIS Bouches-du-Rhône a été désigné comme vulnérable par le rapport de l'inspection générale de l'administration".
Des effectifs, qui de plus, seraient selon lui très mal répartis entre les centres de secours, sans tenir compte des besoins réels. "À la Bouilladisse", commune d'un peu plus de 6000 habitants, "aujourd'hui, ils ont huit pompiers professionnels sur place, alors qu'il y a 15 ans, ils en avaient deux".
Le recours abusif aux pompiers volontaires pointé du doigt
Face à ce qui est décrit comme une "mauvaise gestion du personnel", d'autres centres, plus gros, seraient très mal en point, si l'on en croit les nombreux posts sur Facebook du Syndicat Autonome. Les sites de Salon-de-Provence, d'Arles, de Luynes ou même d'Aix-en-Provence seraient principalement touchés. Conséquence directe, selon Laurent Guilloteau, "on se retrouve en grande difficulté, à ne pas pouvoir respecter le délai d'intervention qui doit être de 8 à 10 minutes."
"Dans une caserne qui doit fournir 18 pompiers par jour, actuellement, j'en ai quatorze. Donc si on retire ceux qui doivent obligatoirement poser leurs congés, j’en ai plus que 8 à 9. Alors, il me faut trouver à chaque fois entre 8 et 10 pompiers volontaires", explique Pierre Davisseau. Car c'est bien là que se situe l'autre cause majeure de la grève du jour : dans les Bouches-du-Rhône, le SDIS ferait massivement appel aux pompiers volontaires pour combler les effectifs professionnels manquants. Ils seraient 6 500 à donner régulièrement de leur temps sur les centres du département.
Des menaces face à la grève ?
Pierre Davisseau avance comme cause du mouvement la question financière, pointant "le nombre de pompiers qui veulent partir dans d'autres départements". Car selon lui, il y a des "injustices" croissantes entre localités, comme "pour Mayottte, où les départements voisins avaient le droit d'être payés, tandis que dans les Bouches-du-Rhône, on demandait à mes collègues de partir sur congés, alors qu'ils allaient faire leur travail". Le syndicaliste dit pourtant ne pas vouloir faire de cette question financière une revendication, mais le voit plutôt comme "un constat".
Reste que face à cette situation, la CGT et le Syndicat Autonome de Pierre Davisseau ont décidé de se mobiliser ce mercredi 29 janvier, malgré "des menaces, puisque les chefs de groupement demandent de faire effacer des camions nos messages d'alerte".
C’est le seul métier où on ne doit rien dire, on doit fermer notre gueule. Il faut pas que ça soit vu.
Pierre Davisseau,Président du Syndicat Autonome du SDIS 13.
17 recrutements supplémentaires par an annoncés, jusqu'en 2028
Face au mécontentement, la direction du SDIS 13 se défend par la voix de son porte-parole, lel commandant Stéphane Guyot. Selon lui, l'une des principales raisons de cette tension sur les effectifs, c'est l'incapacité des services de santé à prendre en charge rapidement les patients à l'hôpital lorsqu'ils y sont amenés par les sapeurs-pompiers, avec pour conséquence que "les pompiers qui sont aux urgences ne peuvent pas partir sur d’autres interventions".
Stéphane Guyot réfute les propos de Pierre Davisseau sur les pompiers envoyés à Mayotte, qui selon lui "le font au titre de sapeur-pompiers volontaires", et qu'ils sont donc "indemnisés pour ça". Même chose sur les supposées menaces, puisque le commandant rappelle que la direction a simplement "demandé le respect du protocole syndical, que l'ensemble des représentants ont signé", où il est stipulé qu'il "est interdit de taguer les véhicules".
Ceux qui taguent les véhicules se menacent tout seuls, puisqu'il y a un risque de sanction administrative.
Commandant Stéphane Guyot,porte-parole du SDIS 13.
Sur la question du recours aux volontaires, le porte-parole estime "qu'il y a plus de professionnels chez nous que dans d’autres départements", souhaitant "ne pas opposer les volontaires et les professionnels". Il admet cependant que "le souci évoqué sur les effectifs a été évoqué depuis des années", et a annoncé ce jour le recrutement de 17 pompiers supplémentaires par an jusqu'en 2028. Cette année, neuf d'entre eux seront déployés sur le département entier, et huit rattachés à la caserne d'Aix-en-Provence, "pour y atteindre les 120 pompiers professionnels d'ici l'été".
Pas de quoi satisfaire Laurent Guilloteau de la CGT, qui rappelle que "ces huit recrutements, c'est juste ce qui manque depuis des années à Aix, on remet simplement à niveau". Selon lui, ces quelques recrutements ne suffiront pas à combler les pertes, "comme à Miramas, là où je suis rattaché, où on va perdre encore trois personnes en mars".