L'agricultrice dénonce l'impuissance des propriétaires face à l'installation sauvage des gens du voyage qui occupent sa prairie, à Aix-en-Provence, depuis dimanche.
Les brebis ont déserté la prairie pour les alpages. En à peine trois heures, plus de 200 caravanes ont pris leur place dans ce champ privé de quatre hectares, aux portes d'Aix-en-Provence. La propriétaire totalement démunie face à cette installation sauvage se lamente : "C'est comme un squat dans un appartement, à partir du moment où ils sont là, on leur doit l'eau même si les propriétaires ne sont pas d'accord". Dimanche, le branchement électrique a fait disjoncter le quartier, provoquant la colère des riverains.
Ils prennent l'eau sur notre propre compteur et on ne peut rien faire.
Isabelle, la propriétaire du champ
La police est venue constater l'occupation illicite. L'agricultrice a déposé une plainte, mais elle se sent impuissante. "On attend que les autorités fassent leur travail, que des lois soient votées pour que cela n'arrive plus jamais, parce que ça a un impact énorme au niveau émotionnel".
Entre 15 jours et trois semaines sur place
"On ne peut pas agir à la place des propriétaires, souligne Ravi André, conseiller municipal en charge du quartier de Célony qui estime le nombre de caravanes à 240, ce qu'on essaie de faire c'est d'accompagner les propriétaires fonciers qui sont des victimes dans leurs démarches administratives et judiciaires, mais c'est à eux d'engager la procédure".
L'élu estime que les caravanes devraient rester au minimum 15 jours, et jusqu'à trois semaines. Un délai trop court, selon lui, pour permettre une action en justice. "La difficulté, c'est d'avoir un référé dans ce délai, une autorisation d'expulsion, et le concours de la force publique".
Isabelle loue son terrain à une bergère d'Eguilles, la commune voisine. Cette dernière déplore tout autant l'installation illicite des évangélistes, car elle ne va pas pouvoir faire sa coupe de foin et elle redoute les dégradations que la présence d'une centaine de personnes sur place pendant plusieurs semaines va immanquablement occasionner.
Tensions autour du campement
"Je vais être obligée de labourer et de ressemer", explique Nadège, qui comprend cependant les difficultés rencontrées par ces familles. Elle pointe la responsabilité de l'Etat, selon elle, "ne fait pas son travail" et laisse s'installer de telles situations, qui attisent la colère des riverains et le rejet des gens du voyage.
"J'ai discuté avec eux, normalement, ils devraient avoir des aires adéquates pour les recevoir, souligne l'agricultrice, la loi a été votée, qu'on soit pour ou contre, peu importe". "Personne ne prend ses responsabilités et on monte les gens les uns contre les autres", ajoute-t-elle.
"On ne demande pas grand-chose", se défend le pasteur de la communauté.
Nous, ce qu'on demande juste, c'est que l'Etat nous aide en mettant à disposition pour nous, des aires de grand passage de trois ou quatre hectares, un champ d'herbe, un point d'eau et de l'électricité.
Joseph Capelot, pasteur de la mission évangéliqueFrance 3 Provence-Alpes
L'aire de l'Arbois en sous capacité
La mairie d'Aix-en-Provence se dit en règle avec la réglementation, mais elle reconnaît qu'avec une centaine de places, l'aire de l'Arbois est "en sous capacité" pour accueillir 200 familles. "On ne peut les absorber en aucune manière", estime Ravi André, renvoyant la faute sur la métropole AMP, qui ne possède pas d'aires de grand passage. "C'est à la Métropole de prévoir ce genre d'aires plus adaptées à ces grands mouvements de foule".
"On nous met souvent à côté des déchetteries, ou à l'arrière du pays pour nous mettre de côté", fait remarquer le pasteur Capelot, qui dit comprendre la colère des riverains. "On se met à leur place, mais mettez-vous à la nôtre".
En 2018, la communauté tzigane évangélique était estimée à 120 000 personnes.