Procès d'un féminicide : "Il ne digérait pas qu'un autre homme élève son fils"

Ibrahima Ba est jugé jusqu'à mercredi pour le meurtre avec préméditation de son ex-compagne enceinte de huit mois.

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Le 85e des 146 féminicides de l'année 2019. Ibrahima Ba a comparu ce lundi 13 mars devant la cour d'assises des Bouches-du-Rhône pour le meurtre de son ex-compagne, un soir d'été à Marignane près de Marseille. Le 4 août 2019, il a abattu Chloé, dont il était séparé depuis six ans. Il a tiré à quatre reprises, la visant au ventre et tuant du même coup le bébé qu'elle portait depuis huit mois. "Je reconnais les faits, j'étais dans un état de colère mais je n'ai pas prémédité", s'est défendu l'accusé de 35 ans, jugé jusqu'à mercredi pour meurtre avec préméditation.

Le couple était séparé depuis 2014, après cinq années d'une vie commune marquée par les violences conjugales, notamment à partir de la naissance de leur fils. Quand en 2019, Ibrahim Ba  avait appris que Chloé avait refait sa vie, la haine avait repris le dessus.

Des menaces de mort

Des menaces de mort ont précédé le drame. Quinze jours avant d'être tuée, Chloé avait déposé une main courante au commissariat, le document a été retrouvé dans son sac à main. Craignant la violence de son ex-compagnon, elle s'était même acheté un taser, mais elle n'avait pas eu le temps de s'en emparer lorsque Ibrahima Ba lui avait tiré dessus, alors qu'elle était encore au volant de son véhicule. 

"Tu avais notre fils, tu savais très bien qu'il ne devait y avoir aucun homme dans ta vie."

Texto d'Ibrahim Ba à Chloé

Dans le téléphone de Chloé, les enquêteurs ont retrouvé un message prémonitoire : "Tu as fait la pute. Tu avais notre fils, tu savais très bien qu'il ne devait y avoir aucun homme dans ta vie. Je ferai même 70 ans de prison, je m'en bats les couilles mais je te tue (...),  je te démolis et tu vas aller au cimetière." 

"Il était contrarié par le fait qu'elle refasse sa vie. Il savait qu'elle était enceinte", a expliqué à la barre Julien, un ami de l'accusé. "Il n'avait pas envie qu'un autre homme élève son fils, il ne le digérait pas."

A travers l'audition des premiers témoins, parents et amis de l'accusé, est dressé le portrait d'un homme possessif. Selon sa mère, Ibrahima Ba lui aurait indiqué, juste après les faits, "qu'il avait fait signer un papier à Chloé comme quoi le jour où elle aurait un copain, elle devrait lui rendre son fils." "Il ne voulait pas qu'un autre homme s'occupe de son fils", a confirmé Mamadou Ba, le père de l'accusé, un Sénégalais venu travailler en France en 1981 dans le secteur de l'entretien.

Egalement appelé à la barre, un expert psychiatre a témoigné de la froideur de l'accusé et de son discours exempt d'empathie, de culpabilité ou de regret : "Quand il a posé ses règles, il ne supporte pas qu'on puisse les enfreindre. Il explique qu'il a agi dans son bon droit."

Devant une enquêtrice de personnalité, Ibrahima Ba avait évoqué une enfance marquée par des moqueries racistes durant sa scolarité en primaire, et des violences exercées par un frère aîné qui s'est par la suite suicidé en prison. De simples chamailleries entre frères, ont rectifié lundi ses parents à la barre.

Tout au long de l'instruction, l'accusé a maintenu qu'il n'était pas au courant de la grossesse de son ex-compagne, assurant qu'il n'avait pas volontairement dirigé les tirs vers le ventre de la victime. Une ignorance contredite par un message de Chloé évoquant la petite sœur qu'allait avoir leur fils.

L'arme achetée peu avant le drame

Selon l'accusation, l'arme achetée peu de temps avant et les menaces proférées signent la préméditation. Libre, un second accusé répond lui du délit d'abstention volontaire d'empêcher un crime. Lui-même condamné pour harcèlement et pour violences conjugales, ce plombier est soupçonné d'avoir reçu les confidences d'Ibrahima Ba sur son projet criminel. Mais s'il n'avait pas alerté les policiers, c'est "pour ne pas le balancer." Le réquisitoire et le verdict sont attendus mercredi.

(avec AFP)

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