Profit monstre, 1000 candidats concernés... Cinq questions sur le procès d'un réseau de fraude au permis de conduire

Plus d'un millier de candidats au permis de conduire ont profité de cette fraude d'ampleur nationale, en payant entre 150 et 1 000 euros pour valider l'examen du code de la route sans se présenter aux épreuves.

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Cinq prévenus, deux hommes et trois femmes, comparaissent devant le tribunal correctionnel d'Aix-en-Provence, vendredi 12 avril, pour "escroquerie en bande organisée, blanchiment et corruption". La justice leur reproche d'avoir organisé ou participé à une vaste fraude au code de la route. L'escroquerie a bénéficié à plus d'un millier de candidats à l'épreuve théorique générale (ETG) du permis de conduire, qui ont payé pour réussir l'examen sans avoir à se présenter aux épreuves.

France 3 Provence-Alpes vous détaille ce qu'il faut savoir avant le début de ce procès

Qui sont les prévenus ?

Les cinq personnes jugées devant le tribunal d'Aix-en-Provence sont deux hommes et trois femmes, gérant ou travaillant dans une auto-école et un centre de passage de l'examen du code de la route à Gardanne. Les deux gérants associés d'Express Permis, Medhi F. et Nassim N. sont présentés comme les organisateurs de la fraude. La conjointe de Nassim N., gérante d'un centre agréé Dekra, comparaît également avec deux employées qui ont passé l'examen à la place de plusieurs candidats. Les chefs d'accusation sont : escroquerie en bande organisée, blanchiment et corruption. Les principaux protagonistes encourent jusqu'à dix ans d'emprisonnement.

Quatre d'entre eux ont été interpellés lors d'une opération judiciaire, déclenchée le 18 mars 2024, qui a conduit à l'interpellation de 19 personnes, dont quinze intermédiaires identifiés. L'une des employées, a été interpellée ultérieurement, à son retour de l'étranger.

Lors de ce coup de filet, les enquêteurs ont procédé à 11 perquisitions. Des biens immobiliers, des fonds positionnés sur des comptes bancaires et des véhicules ont été saisis.

Comment fonctionnait la fraude ? 

Entre 2022 et 2023, plus d'un millier de candidats au code de la route ont bénéficié de cette fraude, pour obtenir le précieux sésame sans avoir à se présenter aux épreuves dans un centre d'examen, moyennant rémunération.

Les escrocs recrutaient les candidats par des intermédiaires ou en utilisant les réseaux sociaux pour faire leur publicité. Les règlements se faisaient en espaces, via Paypal, ou ticket PCS. En échange, au bout de quelques jours, les bénéficiaires recevaient leur attestation de réussite à l'examen du code de la route.

Tous les candidats qui ont payé pour obtenir leur code feront l'objet d'une "poursuite sous la forme d'une ordonnance pénale et d'un signalement aux services de la préfecture aux fins de retrait de leur permis de conduire", avait indiqué le 21 mars dernier, le procureur de la République d'Aix-en-Provence, Jean-Luc Blachon.

Comment la fraude a-t-elle été découverte ? 

L'enquête ouverte pour escroquerie a débuté en juin 2023. Plusieurs éléménts douteux laissant présumé des irrégularités ont attiré l'attention du Comité Opérationnel Anti-Fraude (CODAF) 13, sur le centre d'examen privé Dekra, à Gardanne. Des candidats ne parlant pas du tout le français y ont réussi l'examen sans avoir recours à des traducteurs. De nombreux inscrits à ce centre ne résidaient pas dans les Bouches-du-Rhône. Des candidats ont même passé l'examen alors que le centre était fermé. 

Après des mois de surveillance physique et téléphonique, le juge d'instruction requalifie les faits d'escroquerie et de blanchiment en retenant la bande organisée, le 20 novembre 2023. Les investigations ont mis en évidence un réseau dont l'ampleur dépasse largement le cadre de la petite commune de Gardanne et le département des Bouches-du-Rhône .   

Quelle est l'ampleur de cette fraude ? 

Les investigations menées sur les inscriptions de 3103 candidats ayant passé l'examen du code au centre Dekra de Gardanne entre le 1er janvier 2022 et le 1er septembre 2023, ont permis d'identifier 1165 fraudeurs potentiels, dans toute la France. La fraude s'étend à 29 départements répartis dans 11 régions.

Les enquêteurs ont auditionné 119 candidats ciblés comme potentiels fraudeurs. Cela a permis l'identification de neuf personnes physiques mises en cause et six auto-écoles agissant en qualité d'intermédiaires pour le compte de l'organisation criminelle.

Les profits illicites sont évalués à au moins 350 000 euros. 

Les fraudes à l'examen du code de la route sont-elles fréquentes ?  

Cette escroquerie au code de la route n'est pas un cas isolé. La fraude a explosé depuis l'externalisation de l'épreuve de théorie générale (ETG) du permis de conduire en 2016. Jusque-là encadrées par les inspecteurs du permis de conduire, les épreuves ont été confiées des opérateurs privés agréés par l'Etat : La Poste, Bureau Véritas (Coden'Go), SGS (ObjectifCode), Pearson Vue (Point Code), Dekra (Le code Dekra), Exacode. Le cout de l'inscription est de 30 euros. 

Selon le Syndicat national des inspecteurs, cadres et administratifs du permis de conduire (Snica FO), 40% des attestations de code délivrées seraient frauduleuses, obtenues avec la complicité des surveillants de l'épreuve ou achetées en ligne sur les réseaux sociaux. "Il faudrait à peu près 90 inspecteurs du permis de conduire pour pouvoir faire tous ces examens", a estimé, sur BFMTV, Simon Bergue, secrétaire général du Snica FO qui réclame le retour de l'examen dans le giron public.  "Nous savons que lorsque c'était l'administration qui faisait passer l'examen, la fraude était presque inexistante",a-t-il ajouté. 

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