Le PDG de Total Patrick Pouyanné a menacé mardi de "réviser sérieusement" les investissements du groupe pétrolier prévus en France, en raison du blocage total ou partiel de ses 5 raffineries à l'appel de la CGT qui proteste ainsi contre le projet de loi Travail.
Alors que le syndicat CGT appelle à la grève dans les raffineries, le PDG de Total menace de réviser sérieusement les investissements du groupe en France.
"Si nos collègues veulent prendre en otage, pour une cause qui est étrangère à l'entreprise, un outil industriel, il faut qu'on se pose la question de savoir si c'est là que nous devons investir.
explique le respondable en marge de l'assemblée générale des actionnaires, avant de poursuivre : "En tout cas, nous devrons, avec lucidité, au niveau du management et du conseil d'administration, réfléchir à cette question",
"C'est quelque part une forme de rupture du pacte qui lie à la fois nos employés et notre entreprise"
a poursuivi Patrick Pouyanné devant les journalistes. "Cela va nous conduire à réviser sérieusement les plans que nous avons d'investissements dans l'ensemble de ces sites en France", a-t-il ajouté.
"Une situation grave"
Total avait poursuivi en 2015 la restructuration de son activité de raffinage en France, incluant 600 millions d'investissements pour moderniser le site de Donges (Loire-Atlantique) et reconvertir celui de La Mède (Bouches-du-Rhône) vers la production de biocarburants, moyennant la suppression sur ce dernier de 180 postes."Nous avions travaillé tous ensemble pour trouver ce plan modernisation, aujourd'hui je suis un peu triste de voir ce qui se passe dans le groupe"
a déclaré Patrick Pouyanné, estimant que la situation était "grave".
"Cela veut dire que nous allons regarder, notamment sur le plan de Donges, qui était un plan d'investissement lourd, si nous devons effectivement investir 500 millions d'euros. Je ne dis pas que nous ne le ferons pas, je vous dis simplement que nous devrons tirer des leçons de ce qui se passe et réviser ces plans pour voir si nous devons aller au bout de notre logique industrielle", a-t-il précisé,
ajoutant qu'il n'y avait "pas de remise en cause" à La Mède.
"Je n'ai pas l'impression que c'est nous qui faisons le chantage, j'ai plutôt l'impression que c'est l'inverse en ce moment"
a-t-il relevé, jugeant "prématuré" d'évaluer le coût des actions menées par la CGT pour son groupe.
Le patron de la branche raffinage-chimie de Total, Philippe Sauquet, avait déjà laissé entendre à demi-mot, dans un courriel adressé vendredi aux directions des raffineries, que le groupe pourrait revoir ses projets dans le raffinage en France, un secteur qui a permis de soutenir les résultats du groupe en 2015 dans un contexte marqué par la chute du prix du pétrole.
Au total, six raffineries sur les huit que compte la France étaient à l'arrêt ou tournaient au ralenti mardi tandis que plusieurs dépôts restaient en grève ou bloqués par des manifestants extérieurs, opposés au projet de loi travail.
Mobilisation pour l'alimentation des stations-service
Total a dénombré 188 stations-service en rupture totale et 513 en rupture partielle à 10 heures dans son réseau de 2.200 stations. Mais Patrick Pouyanné a assuré que son groupe mettait tout en oeuvre pour assurer leur approvisionnement."Nous faisons le maximum. Nous avons mobilisé deux à trois plus de camions que ce que nous faisons d'habitude pour réalimenter l'ensemble des stations-service.
J'en appelle justement à la responsabilité de nos clients pour qu'ils ne se précipitent pas en créant des ruptures artificielles,
comme c'est en train de se passer dans des régions qui en fait, fondamentalement, n'ont pas de problème d'approvisionnement", a-t-il dit.
En avril 2015, Total avait présenté un vaste plan de restructuration de l'activité du raffinage, notamment en France.
Ce plan prévoyait un investissement de 600 millions d'euros, dont 400 millions pour moderniser la raffinerie de Donges (Loire-Atlantique), déficitaire, et 200 millions d'euros pour le site de La Mède (Bouches-du-Rhône), qui perdait plus de 100 millions d'euros par an, selon la direction, et a dû supprimer de nombreux emplois.