L’ADN environnemental, une nouvelle méthode scientifique pour inventorier la biodiversité marine

La collecte d'ADNe permet d'inventorier les espèces marines en détectant des espèces rares ou invasives, difficilement inventoriées par les méthodes classiques.

Mieux connaître l'océan et ses mers pour favoriser la conservation et la préservation de la biodiversité marine, tel est l’objectif de la Mission BiodivMed, initiée par Pierre Boissery de l'Agence de l'eau Rhône Méditerranée Corse, placée sous la coordination scientifique du professeur David Mouillot de l'unité mixte de recherche rarbec (IRD-Ifremer-CNRS) - université de Montpellier, avec le concours de Spygen, jeune société innovante fleuron français de l'étude de l'ADNe.

Cette démarche s'inscrit dans la Stratégie nationale biodiversité 2030 (SNB 2030), actée par le gouvernement en novembre, qui fixe les objectifs pour la décennie à venir afin de réduire les pressions sur la biodiversité, de protéger et de restaurer les écosystèmes en suscitant des changements en profondeur pour inverser la trajectoire du déclin de la biodiversité.

Répéter la collecte pour augmenter la fiabilité scientifique  

La particularité de la Mission BiodivMed ? Dresser l’inventaire des espèces marines de notre littoral grâce à des prélèvements d’ADN environnemental (ADNe) à la surface de la mer dans des zones où le fond est à inférieur à 30 m.

Jusqu’à présent, il n’existait que deux manières de recenser la biodiversité marine. Le comptage par des plongeurs ; l'observation des "retours de pêche", histoire d'observer ce que les pêcheurs côtiers capturent. Deux méthodes approximatives difficilement qualifiables de "scientifiques".

Depuis la mission BiodivMed 2023, en recueillant les particules d'ADN que les poissons et les crustacés libèrent dans leur environnement, comme les êtres humains dans le leur, les scientifiques de l'équipe du professeur Mouillot sont en capacité de dire quelles espèces vivent le long du littoral. Une première, dans un secteur de recherche scientifique où la France joue un rôle de leader incontesté.

"Mieux connaitre la biodiversité marine de notre région"

Le long du rivage de la Région Sud, le catamaran "Love The Ocean" de l'association philanthropique d'intérêt général OceanoScientific sert de plateforme de logistique océanographique pour aller d'un Site sentinelle de biodiversité marine (SSBM) à l'autre afin de réaliser les précieuses collectes d'ADNe. Sous la direction d'Yvan Griboval, président de l'association et skipper du grand cata, Justine Camus, coordinatrice des expéditions OceanoScientific ADNe Méditerranée, met en œuvre les procédures définies conjointement par l'UMR Marbec-université de Montpellier et Spygen. 

Après avoir réalisé de Menton à Gruissan la collecte de 104 échantillons sur les 700 de la mission BiodivMed 2023, l'équipe OceanoScientific collecte cette année une quarantaine d'échantillons de Menton au phare de Beauduc, la pointe sud-ouest de la Camargue, soit quasiment à l'extrémité est de la région Provence-Alpes-Côte d'Azur.

Au terme de la collecte OceanoScientific dans le cadre de la Mission BiodivMed 2024, des analyses scientifiques de Spygen, puis de l'interprétation par l'équipe dédiée de l'université de Montpellier, la cartographie à fine échelle de la biodiversité marine du littoral méditerranéen de la région sud sera optimisée par rapport à celle établie il y a un an.

"Il est primordial d'aider les scientifiques à mieux connaitre la biodiversité marine de notre région, affirme Justine Camus. Car on ne peut bien protéger que ce qu'on connaît et ces informations servent donc aux collectivités locales dans leurs démarches de conservation et de préservation".

Et Pierre Boissery d'ajouter : "Si, grâce à la Mission BiodivMed 2023, nous avons constaté sans équivoque que l'état de santé de la biodiversité marine du littoral méditerranéen français est bien meilleur que dans les années 1980-1990, c'est effectivement la conséquence des procédures de préservation mises en place par l'État et par les collectivités locales, aidées en cela par des acteurs privés, dont les associations qui œuvrent sans relâche, parfois depuis plus de trente ans, à ce que la Côte d'Azur préserve son fantastique patrimoine maritime naturel".

Une mission sur le long terme 

"Faire une 'photo' scientifique fiable de la biodiversité marine une fois, c'est bien, surtout lorsque cela n'a jamais été réalisé avant la Mission BiodivMed 2023, affirme Yvan Griboval. Mais la nature est en perpétuelle évolution et ce n'est que dans la durée qu'il sera possible d'observer les évolutions, dont notamment la présence d'espèces invasives qui impactent la pêche côtière, ou le départ de certaines espèces vers des eaux moins chaudes. Ou encore l'arrivée d'autres justement du fait de l'élévation de la température de l'eau, comme les dorades coryphènes que les marins qui traversent l'Atlantique à la voile rencontrent dans les eaux chaudes des alizés entre les Iles du Cap-Vert et les Antilles."

"C'est pourquoi nous développons le concept de Sites sentinelles de biodiversité marine (SSBM) afin de recueillir chaque année, à la même période estivale - de fin juin à fin août - des échantillons d'ADNe qui permettront des comparaisons scientifiques d'une année à l'autre, assure-t-il. À terme, sous trois à cinq ans, nous espérons être en mesure d'apporter une assistance scientifique gratuite aux pêcheurs côtiers pour favoriser une pêche durable pour une alimentation durable en circuits courts." 

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