Comment le suicide d'un boulanger à Marseille est devenu le symbole de la détresse des artisans face à l'inflation

Un boulanger marseillais s'est suicidé dans son établissement dimanche. Ce drame est rapidement devenu viral sur les réseaux sociaux, affiché comme un exemple du mal-être général chez les artisans pris à la gorge par la hausse des factures.

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En 24 heures, tout s'est emballé. Pascal Autexier est devenu le nom de la souffrance de tous les boulangers de France. Et jusqu'à l'Assemblée nationale, mardi 26 septembre, l'homme sert d'argument à l'amélioration des conditions de travail de tous les artisans. Les raisons de son geste, elles, restent incertaines. Comment la vague médiatique a-t-elle déferlé sur ce drame ?

"Une figure de Saint-Louis"

Pascal Autexier, boulanger au "fournil de Saint Louis", dans le 15ᵉ arrondissement de Marseille, s'est donné la mort dimanche 24 septembre. Il a été retrouvé pendu au sein de son établissement.

L'information, révélée sur les réseaux sociaux le lendemain par le député Insoumis des Bouches-du-Rhône Sébastien Delogu, a été confirmée à la rédaction de France 3 Provence-Alpes par la Direction nationale de la Sécurité publique, ainsi que par les marins-pompiers. Les secours sont arrivés sur place peu avant 22h, mais il était déjà trop tard.

"Pascal était une véritable figure à Saint-Louis, boulanger historique de quartier, apprécié de tous", écrit l'élu des quartiers nord. 

Plus de 700 000 vues sur X

Quelques minutes plus tard, une vidéo est partagée sur les réseaux sociaux au sujet de ce drame. Son auteur, Stéphane Ravacley, est également boulanger, à Besançon. Il se filme, très ému, évoquant un mal-être généralisé chez les artisans. 

"Il s'est battu jusqu'au bout avec ses factures d'électricité et d'ingrédients, jusqu'à ce qu'il se trouve à côté d'une corde et qu'il se pende", déclare-t-il dans la vidéo. "On ne fait déjà pas attention à nos paysans, on ne fera de toute façon pas plus attention à nos artisans."

Au moment de l'écriture de cet article, la vidéo comptabilise plus de 700 000 vues sur le réseau social X (anciennement Twitter), plus de 3 000 partages et des centaines de commentaires.

Sur X, Stéphane Ravacley se définit comme un "homme de causes", et bénéficie d'une communauté de 21 500 abonnés. Une notoriété amenée par la médiatisation de sa grève de la faim, en janvier 2021, pour la régularisation de son apprenti guinéen. Stéphane Ravacley a par la suite été investi par la Nupes pour les élections législatives de juin 2022. 

"Je me sers de cette notoriété pour que l'Etat revienne à la raison, déclare-t-il. J'ai fait cette vidéo pour alerter l'Etat, pour qu'il sauvegarde les entreprises".

"Il faut protéger nos PME. Cela fait un an et demi que je tape à la porte de la Confédération nationale des boulangers, pour qu’ils fassent quelque chose pour nos boulangers, pour l’instant pas de réponse."

"Je ne connais pas un boulanger qui n'est pas endetté. J’ai été en redressement judiciaire pendant 10 ans. Je vis ce drame parce que moi, j’ai failli le vivre aussi."

Stéphane Ravacley, boulanger dans le Doubs

à France 3 Provence-Alpes

Stéphane Ravacley évoque des factures d'électricité multipliée "par quatre, cinq six", des factures d'ingrédients "multipliées par deux", l'augmentation des salaires des employés face à l'inflation. "Comment on fait ? Et de l'autre côté du comptoir, il y a la même inflation. Les clients ne vont pas tous acheter des pains au chocolat à 1 euro 50."

L'artisan de Besançon affirme qu'une action "assez forte" se prépare, en fin de semaine, à Paris. "Ce geste abominable ne doit pas partir aux oublis. Il doit devenir un symbole pour la continuité de nos métiers d’artisan."

Jusqu'à l'Assemblée nationale

La vidéo a été, mardi, relayée par de nombreux politiques comme Pierre Larrouturou, député européen Nouvelle Donne ou Olivier Faure, patron du PS, qui écrit sur X : "Un homme est mort. Pendu. Pendu à son désespoir et à ses dettes d’artisan boulanger. Stéphane Ravacley sonne le tocsin. Il a raison. Il faut sortir du déni. Nos artisans, nos agriculteurs ont besoin de notre soutien".

Ce mardi 26 septembre, le député socialiste de l'Eure Philippe Brun a lui interpellé la Première ministre Elisabeth Borne lors des questions au gouvernement à l'Assemblée nationale.

"Nos artisans boulangers sont en deuil, alors qu'ils viennent de perdre l'un des leurs, à Marseille.(...) La situation de nos artisans est catastrophique. Ils sont pris à la gorge par l'explosion des prix de l'énergie, et en particulier des prix de l'électricité. (...) Est-ce que cette fois-ci enfin, le gouvernement soutiendra notre proposition de loi ?"

La proposition de loi évoquée a pour objet de permettre la détention du capital d'EDF à 100% par l'État et de faire de l'entreprise une société anonyme "d'intérêt national". Elle étend également le bouclier tarifaire aux petites et moyennes entreprises (PME). Le 4 mai dernier, l'Assemblée a adopté en deuxième lecture cette proposition de loi.

Les causes du suicide restent floues

Si le décès de ce boulanger est largement assimilé à des difficultés liées à sa profession, les causes du suicide ne sont pas connues à ce jour. Selon nos informations, Pascal Autexier a laissé une lettre dans laquelle il évoque, entre autres, des problèmes d'argent. Du côté de sa famille, l'heure est au deuil. Son épouse ne souhaite pas communiquer. 

Contacté, Stéphane Ravacley explique avoir appris le suicide de Pascal Autexier via le député Sébastien Delogu mais ne pas connaître personnellement ce boulanger marseillais.

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