Des enseignants du lycée Saint-Exupéry de Marseille se mobilisent pour obtenir des accompagnants pour les élèves en situation de handicap. Le SNES-FSU réclame un véritable statut pour rendre le métier plus attractif.
Saint-Exupéry, le grand lycée des quartiers nord de Marseille, accueille parmi ses 900 élèves une vingtaine de jeunes en situation de handicap. La moitié ne dispose pas du nombre d'heures d'accompagnants (AESH) qui leur est nécessaire ou n'a tout bonnement pas d'accompagnement du tout, selon le SNES-FSU. Une vingtaine d'enseignants en grève s'est rassemblée, ce jeudi 21 novembre, devant la Direction des Services Départementaux de l'Éducation nationale (DSDEN) pour dénoncer cette situation et demander plus de moyens.
"Ce n'est pas superflu"
Présent dans la délégation reçue ce matin, Jérémy Abram, professeur d'histoire et élu SNES-FSU, compte parmi ses élèves de terminale, une jeune fille qui souffre de problèmes d'audition auxquels s'ajoutent des problèmes de compréhensions orale et écrite. "Elle a besoin d'une AESH en permanence pour reformuler et expliquer, pour qu'elle puisse faire les activités et les évaluations en cours. Elle n'a que deux heures avec moi le vendredi et parfois pour la deuxième heure, l'AESH ne peut pas rester parce qu'elle a fini son temps de travail ou qu'elle doit aller sur le suivi d'une autre élève, donc elle se retrouve avec moi sans AESH et c'est très compliqué, déplore le professeur, cette élève a un besoin permanent et ce n'est pas superflu."
L'AESH fait vraiment un travail formidable dans des conditions de travail qui sont compliquées pour une rémunération extrêmement basse.
Jérémy Abram, professeur élu SNES-FSU13France 3 Provence-Alpes
Dans ce lycée marseillais, la situation est d'autant plus tendue qu'une des AESH est en arrêt maladie depuis un mois. "Et quand ces collègues ne sont pas là, ces élèves qui sont suivis habituellement sont 'à la dérive', c'est le prof qui devient un peu AESH, parce qu'il faut bien qu'ils suivent avec les autres, et ça demande beaucoup de temps", témoigne Pascal Faure, élu SNES-FSU et professeur en Sciences de la Vie et de la Terre, qui a deux élèves en situation de handicap en classe. "Ce métier est devenu indispensable, vu le nombre d'élèves en situation de handicap qui doivent bénéficier d'un accompagnement qui a explosé ces 20 dernières années", souligne-t-il.
Les discours officiels prônant l'inclusion scolaire se heurtent bien souvent à cette réalité : le manque criant d'AESH. La pénurie se fait sentir sur tout le territoire.
Le gouvernement annonce 2000 emplois créés en 2025
À la dernière rentrée en France, 513 000 jeunes en situation de handicap ont été scolarisés en milieu ordinaire, de la maternelle au lycée. Plus de 132 000 AESH les accompagnent dans leurs apprentissages, représentant, selon la Cour des comptes, 78 816 agents en équivalents temps plein, ce qui en fait le deuxième métier de l'éducation nationale.
Selon l'Union nationale des associations de parents, de personnes handicapées mentales et de leurs amis (UNAPEI), 23% des enfants accompagnés par ces associations n'ont aucune heure de scolarisation et 28% ont entre une heure et six heures de scolarisation par semaine.
De son côté, le ministère de l'Éducation nationale met en avant l'augmentation de 67 % des effectifs d'accompagnants depuis 2017. Lors de la présentation de la loi de finance 2025, le gouvernement a annoncé la création de 2000 postes supplémentaires. Rien que dans les Alpes-Maritimes les besoins sont évalués à 1000 AESH.
"C'est nettement insuffisant, confirme Jérémy Abram, pour qui il sera impossible d'attirer des "candidats qualifiés", sans une revalorisation des salaires et une amélioration des conditions de travail. "L'État ne se donne pas les moyens de ses ambitions", ajoute-t-il.
Une AESH pour 8 à 10 élèves
"Les conditions de travail, les temps partiels imposés à 24h/semaine et les salaires de 850 € par mois en moyenne sont si rudes que les rectorats n’arrivent même pas à recruter des personnels sur les postes déjà existants", estime le SNES-FSU. Il souligne qu'une AESH, ce sont souvent des femmes, accompagne entre huit et dix élèves, avec des problématiques variés et des types d'accompagnement différents. Le syndicat réclame des mesures pour rendre le métier plus attractif et moins précaire : un statut de fonctionnaire de catégorie B, une formation spécifique (les AESH ne suivent actuellement qu'une formation initiale de 60 heures), le temps plein pour les aides qui le souhaitent et un salaire minimum à 1850 euros net.