Affaiblis par trois ans de Covid puis par la hausse des prix de l'énergie, les thermes de Camoins-les-Bains, à Marseille, créés en 1862, cessent leurs soins mercredi 26 avril.
L'odeur de l'eau soufrée ne flottera plus aux Camoins. Après 160 ans d'exploitation, les thermes de Marseille vont définitivement fermer leurs portes, selon les informations de France 3 Provence-Alpes. L'établissement thermal de Camoins-les-Bains, déclaré d’utilité publique par décret impérial du 17 novembre 1862, cessera de dispenser ses soins mercredi 26 avril. Les curistes qui fréquentent l'institution ont reçu des SMS leur confirmant leurs rendez-vous des mardi 25 et mercredi 26 avril, mais pas au-delà.
Plusieurs raisons ont conduit le conseil d'administration de la Socoma, propriétaire de la station thermale depuis 2004, à prendre la douloureuse décision de sa fermeture lors d'une réunion tenue mercredi 19 avril 2023, selon nos informations. Les salariés de la structure ont été informés et une réunion s'est tenue avec eux lundi 24 avril. La direction n'a pas souhaité faire de commentaires.
"Les trois années de Covid leur ont fait beaucoup de mal, avec une patientèle qui n'est jamais totalement revenue après la fermeture qui avait été imposée à ce type d'établissement", explique un spécialiste des cures thermales. La fréquentation a été été divisée par deux après la pandémie, avec un fort impact sur le compte d'exploitation en 2021 et 2022.
A cela s'ajoute la hausse du coût de l'énergie, le gaz comme l'électricité, qui grève le budget de fonctionnement ces derniers mois.
Enfin, la question de la ressource - l'eau soufrée, captée par un forage - devenait centrale ces dernières années car en forte réduction, assure un expert. La réalisation d'un deuxième forage avait été envisagé dès 2019 pour toujours disposer de la précieuse eau thermale, qui venait à manquer.
Une institution à Marseille
Avec cette fermeture, c'est une institution qui disparait à Marseille. L'histoire avait débuté au début du XIXe siècle, alors que le roi d’Espagne Charles IV, détrôné par Napoléon 1er et emprisonné à Marseille, se rendait tous les jours dans une maison de campagne à Mazargues, un quartier excentré de Marseille. C'est là qu'il buvait l'eau des Camoins dont il avait mesuré l'effet bénéfique sur la goutte, maladie dont il souffrait.
La source retient alors l’attention des administrateurs du Département. Et le gouvernement nomme une commission spéciale pour étudier la composition de l'eau qui en sort et en affirmer l’efficacité. Le docteur Durand-Farel la définit comme "source d’eau sulfureuse calcique." C'est le début de la gloire : l'eau des Camoins est alors recommandée dans le Bulletin de l’Académie de médecine de Paris, dans le Dictionnaire encyclopédique des Sciences médicales et dans le Formulaire pratique de médecine.
L’action curative de l’eau des Camoins est confirmée en 1839. Puis un décret impérial du 17 novembre 1862 la déclare d’utilité publique.
Cela ne suffira hélas pas aujourd'hui à sauver l'établissement. Tout comme la pétition de soutien lancée il y a quelques jours par une curiste fidèle de Camoins-les-Bains : elle restera une goutte d'eau face à la conjoncture économique. Une goutte d'eau soufrée, bien entendu.