A la veille de l'appel à la grève générale contre la reforme des retraites, la menace de blocage fait trembler le pays, le gouvernement attaque et les syndicats ripostent. Quatre questions à Alain Rei, secrétaire départemental de la CFDT des Bouches-du-Rhône.
D'un coté, la menace de mettre le pays à l'arrêt, brandie par l'Intersyndicale. De l'autre, l'incitation des Français au télétravail et la communication autour de la baisse de pouvoir d'achat, opérée par Matignon. La situation se tend dans le conflit autour de la réforme des retraites. Alain Rei, secrétaire général de l'Union départementale CFDT 13, évoque une stratégie de dissuasion de la part du gouvernement pour faire passer une réforme impopulaire.
- Pour l'intersyndicale, mettre le pays à l'arrêt, c'est abattre sa dernière carte ?
Alain Rei : Depuis le 19 janvier, le gouvernement n'écoute pas la rue et ne prend pas la mesure du mécontentement, donc malheureusement, le ton va se durcir. Nous avons des retours de la base, les militants et sympathisants sont massivement portés par un sentiment d'injustice et d'incompréhension face à l'obstination du gouvernement. L'Intersyndicale se réunira mardi soir à Paris à l'issu de la manifestation, pour décider de la suite à donner au mouvement dans les jours qui viennent, mais certaines actions pourront se prolonger.
"Il ne s'agit pas d'un combat pour obtenir une avancée mais pour empêcher une nouvelle régression sociale, c'est ça la force de ce mouvement."
Alain Rei, secrétaire départemental de la CFDT 13France 3 Provence-Alpes
- Vous pensez au porte-monnaie des manifestants à l'heure où l'inflation est à son niveau le plus haut et le pouvoir d'achat en chute libre ?
On sait que faire une journée de grève c'est toujours compliqué et, en tant qu'organisation syndicale, on sait faire preuve d'une certaine sagesse quand il s'agit de déclencher des conflits sociaux lourds. Nous sommes lucides, on sait qu'à un moment, quand ils n'auront plus rien à mettre dans l'assiette, les salariés ne pourront plus se mettre en grève, que ce ne sera plus économiquement tenable. La question est de savoir si le gouvernement, qui communique autour de l'inflation et de la baisse de pouvoir d'achat n'en fait pas un outil pour faire passer sa réforme impopulaire. Et malgré cette réalité économique, les collègues sont prêts à y aller, et ça c'est nouveau.
"Une grève ce n'est pas un carnaval, ce n'est pas une fête, c'est dramatique. Mais les gens n'ont plus d'autre option face à l'obstination et la surdité du gouvernement."
Alain Rei, secrétaire départemental de la CFDT 13
- L'appel au télétravail le ministre des Transports ne vient-il pas parasiter le mot d'ordre syndical ?
Il est dans son rôle de ministre, il cherche une stratégie là encore pour rendre la grève impopulaire, Le télétravail est un dispositif pour permettre la continuité d'une activité dans certaines conditions, mais ce n'est en aucun cas un outil de lutte contre la grève. C'est presque malhonnête de le présenter comme ça. Le télétravail n'est pas une alternative à "l'empêchement du travail" dans un contexte social. Un salarié en grève ne travaille pas, tout court.
- Clément Beaune prédit également "la pire journée que l'on ait jamais connu" ? Est-ce à dire qu'il joue le jeu des syndicats ?
Pas du tout, le gouvernement développe des stratégies qui jouent sur les peurs et accentuent les craintes. Ca me désole mais cela ne me surprend pas. Mais si la mobilisation entraine des difficultés pour certaines personnes, dans les transports par exemple, ce ne sont pas les grévistes qui sont responsables mais bien le gouvernement par son refus de changer de posture face à sa réforme des retraites.