L'usine Arkema de Saint-Menet à Marseille est classée Seveso seuil haut. 300 foyers situés dans un rayon de 450 mètres autour de l'usine possèdent une pièce de confinement en cas de nuage toxique. Le maigre joint en mousse placé autour de la porte ne parvient pas à rassurer les habitants.
L'incendie de l'usine Lubrizol a ravivé les inquiétudes. A Marseille, aux alentours de l'usine de pétrochimie Arkema à Saint-Menet, les habitants ne se sentent pas en sécurité.
Classée Seveso seuil haut, l'usine Arkema créée en 1955 produit de l'acide amino undécanoïque. L'acide en question n'est pas inquiétant mais les substances chimiques stockées dans l'usine sont potentiellement dangereuses : du brome, du chlore et de l'amoniaque.
Un Plan de Prévention des Risques Technologiques (PPRT) a été approuvé en 2013 sur ce cite pour éviter les risques toxiques, les risques d'incendie et les risques d'explosion. La loi sur le PPRT date de 2003, en réaction à la catastrophe de l'explosion de l'usine AZF en 2001.
Des "pièces de confinement" ont ainsi été installées au sein de 347 logements dans un rayon de 450 mètres autour de l'usine. Ces travaux, estimés à 15.000 euros, devaient être initialement à la charge des particuliers.
Ils n'ont coûté finalement en moyenne que 1600 euros par logement, à la charge de l'usine et des collectivités locales. Ce grâce à l'appui de Valérie Boyer, députée et maire du 6e secteur de Marseille, qui a réussi à obtenir par son amendement la prise en charge totale de ces frais supplémentaires.
Un confinement "très léger"
Concrêtement, les habitations ont été dotées en 2015 d'une pièce de mise à l'abri, "particulièrement étanche", selon le Programme d'accompagnement des risques industriels (PARI). Dans les faits, les habitants sont sceptiques.Lucien Calenzo habite depuis 30 ans à 300 mètres de l'usine Arkema. Dans sa maison, la pièce de confinement choisie par les experts est la "plus éloignée" de l'usine. Le joint en mousse très mince "que l'on voit dans n'importe quel magasin de bricolage" et la plinthe au bas de la porte de la pièce le font sourire. "C'est très léger comme confinement", ajoute Annie, son épouse, avec ironie.
Lucien et Annie nous ont ouvert leur porte :
Des aménagements aux normes PPRT
Myriam Janin, présidente du Comité d'intérêt de quartier (CIQ) de La Millière a suivi l'installation de ces pièces et tente d'apaiser les inquiétudes. "Par rapport à la loi et aux normes de sécurité, il faut que les personnes puissent rester deux heures dans cette pièce sans que l'air ne rentre le temps que les secours arrivent"."Avec un double vitrage et des portes qui ferment correctement, il n'y a besoin que de peu d'installations, et c'est le cas de Lucien et Annie Calenzo", explique-t-elle. En revanche pour les maisons anciennes, les travaux ont été bien plus importants.
Myriam Janin souligne de plus la particularité des gaz lourds utilisés dans l'usine Akema : "S'il y avait une émanation de gaz, ils ne monteraient même pas jusqu'au domicile de Lucien Calenzo. Le gaz va rester dans la vallée puis se dissiper par le vent s'il y en a, en amont ou en aval".
Enfin, face à la crainte d'une catastrophe comme celle de Lubrizol, Myriam Janin temporise : "A Arkema, il n'y a pas de matières aussi dangereuses que celles qui ont brûlé à Rouen. Donc pas de risques d'explosion."
Des pièces de confinement qui portent mal leur nom
Myriam Janin se souvient des premières réunions avec les habitants en 2009 : "Ca a été terrible ! Quand vous annoncez cela à des gens, qu'ils vont avoir à payer alors qu'ils étaient là avant l'usine et qu'en plus ils doivent faire une pièce de confinement, et que leur bien va être dévalorisé..."Le problème, c'est d'appeler ça "pièce de confinement", ça fait peur à tout le monde ! Ca a été très mal présenté.
La confusion des riverains viendrait donc du nom alarmant donné aux pièces hermétiques et de l'écart entre l'envergure de l'opération de sécurisation via le PPRT et les résultats visibles chez eux. Myriam Janin de conclure : "C'est toute la stratégie qui a été mal pensée".