Ils sont professionnels ou amateurs, tous bénévoles, et fournissent des masques en tissu aux associations, aux personnels qui travaillent pendant le confinement ou aux particuliers. A Marseille, de plus en plus de collectifs produisent des masques répondant aux recommandations de l’Afnor.
A vos masques – Marseille la Plaine existe depuis 10 jours seulement et compte déjà une vingtaine de couturières et couturiers bénévoles. Treize machines à coudre ont été mises gratuitement à leur disposition. Le but : fabriquer des masques en tissu selon les recommandations de l’Afnor, Association française de normalisation, et les distribuer aux associations.Pour les associations
Derrière cette initiative, le réalisateur marseillais Vincent Desombre. "Je voyage beaucoup, explique-t-il, et dans certains pays comme au Vietnam 80 % des personnes portent un masque. Il faut se faire à l’idée que ça va s’intégrer dans le décor."Alors que ses tournages en cours sont annulés, il veut rester actif pendant le confinement et lance sur les réseaux sociaux l’idée de confectionner des masques en tissu. Depuis, ses journées types ressemblent à ce lundi : "à 10 heures je suis passé chez une couturière récupérer une dizaine de masques que j’ai mis à laver à 60°C pour les stériliser puis je suis passé à l’Oeuvre allemand, une association catholique qui met à notre disposition six machines qu’on va porter chez les gens. Là, je vais en livrer deux dans les quartiers Nord où on va me remettre une trentaine de masques. Entre-temps, je vais passer à l’association On se gèle dehors et donner des masques qui ont été stérilisés. Ma dernière opération de la journée : je donne rendez-vous tous les soirs à 18h30 devant le Petit Nice où les gens m’amènent du matériel."
Aujourd’hui, alors qu’il a du tissu en quantité, Vincent Desombres manque grandement d’élastiques et aimerait trouver encore "deux ou trois bénévoles" pour les transports ou la collecte.
"Pour une fois Facebook, plutôt que de faire voir des chats trop mignons ou des crumbles, ça marche !", s’amuse-t-il.
Pour les professionnels
Justement, c’est sur Facebook qu’on a vu se multiplier ces derniers jours les initiatives autour de la confection de masques en tissu.Le groupe Les Couturiers Solidaires du Sud est certainement le plus structuré. En tout, il mobilise 600 personnes, professionnels et amateurs derrière des machines à coudre. C’est l’association FASK, pour le développement de la mode et de l’industrie textile dans la région qui coordonne ces énergies bénévoles.
Après avoir reçu des dons via une cagnotte en ligne et le support d’entreprises locales, l’association est une des rares en France à pouvoir fournir des masques dotés d’un tissu agrée par la Direction Générale de l'Armement.
"C’est très compliqué à comprendre la norme Afnor, précise Jocelyn Meire, le directeur général de FASK, elle fait au moins 30 pages. Heureusement que j’ai des spécialistes de la R&D (recherche et développement) et des juristes. C’est comme ça qu’on a sourcé le tissu qui va bien, que nos masques seront étiquetés avec les mentions légales sur l’entretien du masque et une notice d’utilisation."
En tout, FASK a pour ambition de fournir gratuitement 50.000 masques à des professionnels qui travaillent durant le confinement mais ne sont pas considérés par le gouvernement comme prioritaires dans l’accès aux masques : personnels des Ehpad et maisons de retraite, professionnels du service à la personne, etc. Mais la demande va bien au-delà : l’association a déjà reçu 300.000 demandes venues de toute la région Provence-Alpes-Côte d’Azur.
Ailleurs sur les réseaux, on trouve aussi le groupe Les couturier·e·s masqué·e·s, qui collaborent avec FASK ou Entraide et création de masques à Marseille, qui met en relation les personnes ayant besoin de masques dans le cadre de leur travail et les couturiers bénévoles. De plus en plus, des particuliers y font des demandes pour les personnes fragiles de leur entourage.
Pour les particuliers
Nombreux sont les particuliers à souhaiter acquérir leurs propres masques.Pour le grand public, l’atelier Costumes de l’Opéra de Marseille s’est lancé dans la production. Ses masques seront distribués en priorité aux personnels municipaux et devraient par la suite être distribués plus largement aux marseillais.
Actuellement, peu de couturiers en proposent à Marseille. Dans son atelier du centre-ville, la chapelière Blanche Abel produit chaque jour une centaine de masques à l’aide de bénévoles. Ils sont vendus à prix libre à des particuliers ou des associations.
En vente aussi, les masques proposés sur les réseaux sociaux par la couturière de P'tites Bouilles - "quasiment à prix coûtant, soit 6€ la paire", explique-t-elle.
Normes et recommandations
Pendant plusieurs semaines, le gouvernement et les autorités sanitaires ont répété que le port du masque par le grand public n'était pas conseillé pour les personnes ne présentant pas de symptômes de la maladie. Mais désormais, certains spécialistes expliquent que selon sa fabrication, le masque en tissu constitue tout de même une barrière permettant de limiter les projections de gouttelettes. Depuis début avril, l’Association française de normalisation a étudié les différents patrons qui circulaient en ligne et diffusé des recommandations pour les rendre plus sûrs.De là à les généraliser au grand public ? "Aujourd’hui dans les hôpitaux, même les personnels de santé, les personnels prioritaires sont en pénurie, explique Jocelyn Meire. Donc c’est vous dire combien vous et moi on n’est pas près d’avoir des masques"