Les nageurs en eau libre de Marseille réclament une meilleure signalisation pour les protéger des bateaux et scooters des mers. Les "sans bouées" se sont donnés rendez-vous ce lundi à la plage des Catalans pour faire entendre leurs revendications.
"Lorsque je suis en train de nager et que je vois un bateau de loin, j'ai l'impression qu'il fonce droit sur moi", décrit Benjamin Clasen, un habitué du littoral marseillais et nageur aguerri.
Comme lui, ils sont de plus en plus nombreux à dépasser les premières bouées de la plage des Catalans pour nager un peu plus loin, le long du rivage. On appelle cela de la nage en eau libre, une discipline olympique mais aussi un loisir pour tous les âges.
Un sport à risques ?
Avec ses 57 kilomètres de façade maritime, la ville de Marseille offre un cadre idyllique pour ce sport dont l'engouement est accentué "par l’état et les horaires d’ouverture des piscines municipales et ce, à plus forte raison, pendant la crise sanitaire", note l'association locale des Libres Nageurs. Mais jusqu'à présent, la discipline n'est pas sans danger près des côtes de la Cité phocéenne.
"Le plus grand frein à cette pratique est aujourd’hui la peur d’une collision, explique le collectif dans un communiqué. Tous les nageurs en eau libre partagent la peur d’être coupés en deux par la proue d’un scooter de mer, hachés menu par l’hélice d’un bateau, repassés par la planche d’un kite-surf".
Pour alerter sur cette situation, l'association a organisé une action symbolique ce lundi 31 mai à la plage des Catalans. Les nageurs munis de fausses bouées se sont mis à l'eau pour réaliser une chaîne.
Ils souhaitent ainsi indiquer la zone dans laquelle ils pourraient nager en toute sécurité, sans le passage de bateaux motorisés.
Des bouées pour la sécurité
Parmi leurs revendications, les Libres Nageurs demandent tout d'abord un dispositif de "bouées de 300 mètres" "réellement" positionnées à 300 mètres du rivage, et ce sur toute la longueur du littoral.
Comme il est indiqué sur le site du gouvernement, dans une zone dite côtière de 300 mètres, les embarcations motorisées ou à moteur (ZIEM) peuvent circuler mais sans dépasser 5 nœuds, soit 9km.
Dans un arrêté prefectoral datant de juin 2020 concernant la réglementation de la navigation dans cette bande littorale, il est écrit que la zone réservée uniquement à la baignade (ZRUB) sur la plage des Catalans ne concerne pas toute la zone des 300 mètres.
Dans les faits, les nageurs rencontrent régulièrement des bateaux et scooters à pleine vitesse dans la zone des 300 mètres. Et notamment entre la plage des Catalans et la digue des Catalans.
"Si les bateaux faisaient un détour, de l'autre côté de la digue, ça nous changerait la vie", explique Benjamin Clasen, président de l'association Libres Nageurs. Idem pour le passage entre la côte de l'Anse de Malmousque les îles en face. "Il y énormément de bateaux qui passent alors que c'est interdit", regrette le nageur.
L'association demande par ailleurs l'installation généralisée de "bouées avec poignées" spécifiques pour nageurs afin de pouvoir faire des pauses en toute sécurité par exemple en cas de crampes. "L'idée c'est de rendre cet espace accessible et hospitalier", nous explique cet amoureux de la mer qui, pour l'instant, se sent "vulnérable".
Une mer pour tous
Au-delà d'un sentiment d'insécurité "très fort", les nageurs en eau libre dénoncent un partage inégal de l'espace. "La mer n'appartient pas aux bateaux... et tout le monde n'a pas de bateau", lance Benjamin Clasen.
"C'est un enjeu de santé publique, de bien-être, mais aussi de justice sociale. Cette nouvelle réglementation permettrait à tout le monde de profiter de la mer. Or, pour l'instant, on a l'impression qu'on veut empêcher les gens de quitter les plages", note le président de l'association.
Toucher les collectivités
Avec ce rassemblement aux Catalans, l'association espère toucher les collectivités. Avec les Jeux Olympiques à l'horizon, cela pourrait être "un joli atout". "Il y a un nouvel usage de la mer qui doit être pris en compte et encouragé. Tout le monde y gagnera", conclut Benjamin Clasen.
L'association qui souffle sa première bougie a déjà tenté d'attirer l'attention des pouvoirs publics à deux reprises.
D'abord en réalisant une traversée à la nage de la plage de Corbière jusqu'aux Goudes pour alerter sur la pollution du littoral, puis en piquant une tête près dans le bassin du MuCEM pour demander sa tranformation en piscine d'eau de mer.
Une action relayé sur Twitter par Hervé Menchon, adjoint au maire en charge de la gestion des espaces marins littoraux mais aussi des plages, des équipements balnéaires, du nautisme, de la voile et de la plongée.
"Panier Plage", une revendication ludique et citoyenne portée par les libres nageurs. https://t.co/m0VccokvX5
— Hervé Menchon (@Menchon_Herve) March 1, 2021
Au-delà du périmètre des Catalans, les Libres Nageurs invitent également à une réflexion sur la limitation généralisée de l'accès des bateaux motorisés dans les Calanques.