Plan contre le harcèlement scolaire : mesure par mesure, qu'en pensent les enseignants et les parents d'élèves de Marseille ?

Le gouvernement a annoncé ce mercredi le lancement d'un plan interministériel de lutte contre le harcèlement à l'École. Des mesures qui vont être également déclinées au niveau de la Région Sud. Interrogés, les syndicats d'enseignants et les associations de parents d'élèves des Bouches-du-Rhône restent sceptiques.

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La Première ministre Elisabeth Borne et le ministre de l’Éducation nationale Gabriel Attal ont présenté ce mercredi 27 septembre, un plan interministériel contre le harcèlement scolaire qui repose sur trois piliers : "sensibiliser, détecter et traiter".

France 3 Provence-Alpes a interrogé la Fédération des Conseils de Parents d'Elèves (FCPE) des Bouches-du -Rhône et le Syndicat général de l'éducation national Sgen-CFDT Provence Alpes sur la pertinence des principales mesures proposées par le gouvernement et leur déclinaison par la région Sud.

Les cours d'empathie : oui, "reste à voir comment"

Dans le cadre de sa politique de prévention, Gabriel Attal a annoncé la mise en place "de cours d'empathie", dès la maternelle et l'instauration de deux heures d'enseignement dans tous les établissements scolaires pour aborder avec les élèves la thématique du harcèlement.

"Je suis favorable à ce genre de mesure", valide Christophe Merlino, président de la FCPE 13. La FCPE des Bouche des Rhônes a elle-même mis en place avec le Point écoute famille sur Marignane des ateliers de sensibilisation dans les collèges qui comprennent des cours d'empathie. Il restera à voir comment et de quelle manière" le gouvernement va mettre en oeuvre ces cours.

La saisine "systématique" du procureur : "Cela risque d'être très compliqué"

Élisabeth Borne a annoncé la saisine "systématique" du procureur en cas de fait de harcèlement. Une mesure qui laisse plutôt sceptique Gilles Grabert, secrétaire général du Sgen CFDT Provence Alpes, quant à sa faisabilité: "Si les chefs d'établissement d'un établissement doivent à chaque fois faire un signalement lorsque le mot "harcèlement" apparaît, cela risque d'être très compliqué". Des doutes partagés par Christophe Merlino : "Dans quel délai une saisine pourra être traitée ? Saisir le procureur est une chose, mais ce qui va se passer ensuite en est une autre".  

Le bannissement des réseaux sociaux : "Cela va concerner beaucoup d'élèves"

La Première ministre a promis "d'exclure les élèves harceleurs des réseaux sociaux", et renvoie pour la mise en oeuvre de la mesure aux "dispositions actuellement débattues au Parlement, dans le cadre du projet de loi pour réguler et sécuriser l'espace numérique".

Une annonce peu réaliste pour Christophe Merlino : "si on devait exclure tous ceux qui à un moment donné ont [un mauvais comportement] sur les réseaux sociaux, cela va concerner beaucoup d'élèves", prédit-il. "Maintenant, je pense que le gouvernement a pris la mesure de la gravité de ce qui se passe dans les établissements scolaires notamment en termes de réseaux sociaux."

La confiscation des téléphones : "Le téléphone est devenu une arme entre adolescents"

Pour les situations les plus graves, le gouvernement entend "développer la confiscation des téléphones" des harceleurs. Une peine sera "décidée par la juridiction des mineurs", a précisé Eric Dupond-Moretti.

" Je ne sais pas comment ils vont faire", commente Gilles Grabert qui confirme cependant que le téléphone est une raison pour laquelle le harcèlement ne s'arrête "jamais" . "On attend de voir ce que ça va donner dans les établissements", abonde, Christophe Merlino . "Mais il est vrai que le téléphone est devenu une arme entre adolescents", constate-t-il. "Il faudrait faire du téléphone de nouveau un outil et pas une arme entre élèves."

Un questionnaire pour libérer la parole : "On est dans le flou"

 "Tous les élèves du CE2 à la troisième rempliront une grille d'auto évaluation", qui servira a repéré les situations de harcèlement, a révélé Élisabeth Borne.

"Il va falloir savoir comment va être utilisé le questionnaire, est-ce qu'il sera à la charge des directeurs d'écoles ou d'un référent ? Aujourd'hui, on est dans le flou, nous n'avons pas été sollicités" regrette Christophe Merlino.  Le gouvernement a également décidé de faire du 3018, un numéro d'aide d'urgence actuellement dédié au cyberharcèlement. "Un numéro vert peut être un outil complémentaire" de signalement, acquiesce le président de la FCPE 13 qui estime cependant que les élèves ont peut-être plus de facilités à utiliser des applications.

Des formations : "Nous prônons des embauches supplémentaires"

Le gouvernement annonce "la formation de tous les acteurs de la communauté éducative : les élèves, les parents, les personnels de l'Éducation nationale, avec l'objectif que chacun soit formé d'ici à la fin du quinquennat", a promis Élisabeth Borne. La première ministre souhaite également que la formation des policiers et des magistrats soit améliorée.

"Il faut avoir le temps de former les enseignants et que ça ne se fasse pas au détriment des apprentissages" avertit Christophe Merlino. "Nous ce que nous prônons, c'est plutôt des référents avec des embauches supplémentaires".

"Cette mesure est assez contradictoire avec la restriction mise en place sur la formation continue" des enseignants, juge Gilles Grabert. "Comme il a été décidé par l'administration qu'il ne fallait plus qu'il y ait d'absence des professeurs pendant les heures de cours, la première chose sacrifiée a été justement le temps de formation continue."

"La question [contre le harcèlement] ne se pose pas en tant qu'un problème de formation des personnels, ou du moins pas que sur cela, mais sur les moyens humains supplémentaires à mettre", estime le syndicaliste."Le jour où on nous fera des annonces avec l'embauche de moyens supplémentaires sur des thématiques importantes qui peuvent mener à des drames, là, on pourra commenter de manière extrêmement positive [les actions du gouvernement] et avoir confiance en l'avenir."

Les mesures de la Région Sud : "Nous n'avons pas été consultés"

Dans un communiqué publié ce mercredi, la Région Sud et le département des Bouches-du-Rhône ont annoncé leur propre plan d'actions "très concrètes" contre le harcèlement. Les mesures comprennent entre autres la création d'un "fonds de lutte commune Région et Département" doté d'un million d'euros, la mise en place de formations, la création de "gardes régionaux" pour la médiation dans les établissements et l'instauration de "zones-refuge" pour les élèves harcelés.

Des mesures que les syndicats et les associations d'élèves refusent pour le moment de commenter, en l'absence d'informations plus précises.

"Nous avons découvert le communiqué [de la Région Sud] dans la presse et nous n'avons pas été consultés sur ces questions" , déplore Gilles Grabert. "Nous n'avons pas également été sollicités", s'étonne également Christophe Merlino. "La FCPE 13 avait devancé l'actualité en lançant une application contre le harcèlement, il y a une semaine de cela. Elle permet de déclarer les situations de harcèlement et elle avait été présentée à l'Éducation nationale", rèvele le président de la FCPE 13. "Si on avait eu écho de ce que voulait faire le département ou la région nous aurions pu lier notre application à [ces initiatives]."

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