Visite du pape en Irak : "J'ai fui Daesh", témoignage d'un étudiant à Marseille

Le pape François est en visite en Irak jusqu’à lundi. C’est la première fois que le chef de l'Eglise catholique va à la rencontre des chrétiens irakiens. Beaucoup ont fui Daesh, comme Sheet, étudiant à Marseille. Il témoigne.

Le Pape François a entamé ce vendredi une visite de quatre jours en Irak. C'est un moment historique pour les chrétiens irakiens, victimes des persécutions de l'organisation État islamique ces dernières années. Le souverain pontife se rendra notamment à Qaraqosh, la plus grande ville chrétienne du pays, d’où est originaire Sheet, 26 ans.

Il n’a pas revu sa ville natale depuis qu’elle est tombée aux mains des djihadistes le 6 août 2014. "On s’est réveillés le matin, il n’y avait plus d’armée kurde, il y avait des gens de Daesh",  raconte Sheet.

"Il y avait des bombes qui tombaient sur Qaraqosh. C’est quelque chose qu’on n’oublie pas. On ne savait pas si on devait rester ou pas".

Avec l'arrivée de Daesh, les chrétiens doivent choisir, se convertir, partir ou mourir. "On ne voulait pas changer de religion", dit simplement Sheet, qui est le neveu de Mgr Yohanna Pétros Moshe, l'archevêque syro-catholique de Mossoul.

45 % des familles de Qaraqosh choisissent l'exil

Avec ses quatre soeurs et ses parents, il se lance en pleine nuit sur la route en direction du Kurdistan irakien. Son frère et une de ses sœurs ont déjà fui aux États-Unis.

"On est partis vers minuit, on n'a pas pris la voiture parce qu’il y avait des bombes qui tombaient. On a pris tous les papiers et chacun a pris quelques petites affaires vite fait. Depuis, je ne suis pas retourné à Qaraqosh." 

Comme eux, 45 % des familles de Qaraqosh ont choisi l'exil. Sheet était le seul à parler anglais. C’est lui qui s’est occupé de tout. Le jeune homme cherche un pays d’accueil pour les siens et choisit la France.

"J’ai envoyé 300 mails à des gens en France pour qu’ils nous aident et à une association à Paris qui a trouvé une famille d’accueil en Bourgogne".

"Nous sommes arrivés en France, on n’avait pas d’argent, pas de vêtement, on n’avait rien du tout, se souvient Sheet. Pour nous, le plus important c’était qu’on soit hors d’Irak et qu’on commence une autre vie".

"À Qaraqosh, on n’avait aucun avenir", confie le jeune réfugié, qui a appris ensuite que sa maison avait été entièrement détruite par les bombardements.

Le rêve hypothétique d'un retour en Irak

La famille se pose deux mois en Bourgogne puis s’installe à Lyon. Sheet apprend le français. Au bout de deux ans, il décide de venir à Marseille pour y faire une école du numérique. Il est aujourd’hui en 2e année.

Le jeune irakien rêve toujours d’un retour au pays, où il a encore de la famille et des amis. "Bien sûr, j’aimerais retourner chez moi et vivre comme avant. Mais il n’envisage pourtant pas de rentrer dans un futur proche, pas tant que la situation n’est pas stabilisée".

Depuis que la ville a été reprise par l’armée irakienne en octobre 2016, près de la moitié des habitants s'y est réinstallée, mais la confiance n'est pas pour autant revenue.

"Je n’ai pas envie de refaire ma vie en Irak comme mon grand-père et mon père, et un jour de devoir à nouveau tout quitter".

Dimanche 7 mars, le Pape François rencontrera les fidèles en l'église al-Tahira de Qaraqosh. Sa venue est un symbole d’espoir pour les chrétiens d'Irak.

"Pour nous, c’est un signe de paix. Et pour moi, le plus important c’est le message que porte le Pape : "vous êtes tous frères". Parce qu’aujourd’hui en Irak, il y a des problèmes avec les chiites, les sunnites et les Kurdes, et nous les chrétiens, on est au milieu. La réconciliation, c’est la première étape pour reconstruire l’Irak", ajoute Sheet.

Avant la chute de Saddam Hussein, l’Irak était l’un des pays qui comptaient le plus de chrétiens au Moyen-Orient. Selon un rapport du Sénat, leur nombre est passé de 1,2 million à la fin des années 1980 à moins de 300.000 aujourd’hui..

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