Ce lundi 12 septembre, un grand requin blanc adulte de près de 5 mètres de long a été aperçu près des côtes camarguaises par des pêcheurs à l'embouchure du Rhône. C'est une observation assez rare.
"En méditerranée, seulement une quarantaine de requins blancs auraient été aperçus près des côtes depuis le Moyen-Age", tient à souligner Nicolas Ziani, responsable scientifique du groupe phocéen d'étude des requins.
C'est bien pour cela que cette observation du lundi 12 septembre dernier est assez exceptionnelle.
Une rencontre insolite
D'autant que ce requin blanc "est une femelle d'environ cinq mètres de long, présentant des traces de morsures", précise le scientifique.
Ces morsures sont le signe d'un accouplement.
En effet, chez les requins blancs, le mâle lors de la période de reproduction mord la femelle pour l'accouplement.
"Ces morsures et le ventre arrondi de l'individu observé laissent penser que cette femelle est enceinte", analyse le spécialiste.
Le requin devait être à cet endroit pour se nourrir, en pleine zone Natura 2000 du parc naturel régional de Camargue, sur la rive gauche du Rhône à environ neuf kilomètres de l'embouchure du fleuve.
Ce sont trois pêcheurs/plaisanciers qui ont fait cette rencontre insolite au petit matin alors qu'ils partaient en mer pêcher.
La rencontre a duré quelques minutes.
Cette observation documentée par des vidéos a permis au groupe d'étude phocéen des requins de recenser peut-être un nouveau membre de la famille des requins blancs de méditerranée. "Selon une estimation qui reste approximative, il ne subsisterait que 250 individus de cette espèce", indique le scientifique.
En 2018, l'espèce était considérée comme quasi éteinte, à 98%. "Cette nouvelle observation redonne l'espoir d'un repeuplement progressif. Et prouve l'efficacité de la réglementation pour interdire la prise et la vente du grand requin blanc sur la globalité de la Méditerranée", explique Nicolas Ziani.
Les dernières observations en méditerranée date de 2012 dans le golfe de Saint-Tropez et 2020 au large de la Sicile.
Une vie de solitaire
Cette observation ne doit pas laisser penser qu'un banc entier de requins blancs se promène près des côtes méditerranéennes. En réalité, c'est une espèce dont les individus sont très solitaires.
Et c'est une population qui ne se mélange pas aux autres espèces de requins.
Il existe six espèces différentes de requins blancs dans le monde, dont celle présente en méditerranée, mais aussi sur la côte Ouest des Etats-Unis, en Australie et Nouvelle-Zélande, en Afrique du Sud, dans le Pacifique Est et autour du Japon.
Aucune de ces espèces géographiquement distantes ne se mélange.
Pour le spécialiste, "si la femelle est bien en gestation, elle est probablement dans notre zone pour se nourrir et est sur le chemin de la nurserie pour accoucher".
Selon les études précédentes, la zone de naissance des requins blancs de méditerranée se situe entre la Sicile, la Tunisie et la mer Egée. C'est ce que les scientifiques appellent la nurserie.
La femelle requin blanc peut-être en gestation pendant près de deux ans.
De grands voyageurs
"Si les requins blancs sont assez discrets dans la méditerranée, en août et septembre, c'est normal de pouvoir les observer car c'est la saison de pleine présence en méditerranée", explique Nicolas Ziani.
En effet, les requins blancs sont de grands voyageurs, ils parcourent près de 20.000 kilomètres par an entre leur zone de naissance et les zones où ils se nourrissent.
Pour le scientifique cette présence prouve aussi que "le thon rouge, principal aliment du requin blanc (comme l'espadon, les tortues etc..) est de retour dans les zones marines préservées et que la réglementation de 2009 interdisant la pêche du thon rouge porte ses fruits ".
"Pour autant aucune crainte pour les baigneurs, on est loin des dents de la mer", s'amuse Nicolas Ziani qui veut rassurer les plus craintifs d'entre nous au sujet des requins.
"En cas d'observation, n'hésitez pas à contacter le groupe phocéen d'étude des requins", insiste Nicolas Ziani.