Les chasseurs ont rencontré leur nouvelle ministre, Barbara Pompili. La chasse à la glu est fortement remise en question. Autorisé dans cinq départements du sud de la France et nulle part ailleurs en Europe, ce mode de chasse confronte chasseurs et écologistes, alors que tout se joue ailleurs.
Entre les chasseurs et les écologistes s'interpose une nouvelle ministre, Barbara Pompili, en charge de la Transition écologique.
Le 16 juillet, dès le lendemain de sa nomination, elle reçoit des associations et fédérations écologistes, dont la LPO (Ligue de Protection des Oiseaux). Le 17 juillet, elle reçoit la Fédération nationale des Chasseurs.
Parmi les sujets abordés : la chasse à la glu.
Les chasseurs ont reçu une mauvaise nouvelle : ils ne pourront pas chasser à la glu cette saison. Ils sont ressortis "indignés", et la LPO enchantée.
Une pratique ancestrale, selon les chasseurs
Cette chasse consiste à capturer des oiseaux avec de la glu étalée sur des baguettes ou des branches d'arbres. Les grives et les merles sont les espèces recherchées.Cette étape se déroule du lever du jour à 11 heures du matin. Le chasseur est présent, caché. Si un oiseau d'une espèce protégée se pose et se colle, il doit intervenir tout de suite et le décoller (avec de l'essence, en général).
Une fois capturé, l'oiseau est placé en volière. Pendant la saison de la chasse, il est placé en hauteur, dans une cage, et chante à tue-tête. Un "appelant", c'est le nom donné par les chasseurs.
Son chant attire d'autres oiseaux, les chasseurs leur tirent dessus.
Une chasse cruelle, selon la LPO
Cette technique est interdite partout en France sauf dans cinq départements : les Alpes-de-Haute-Provence, les Alpes-Maritimes, les Bouches-du-Rhône, le Var et le Vaucluse.Pour la LPO, cette chasse dite traditionnelle est "cruelle et inutile", dans une période où les effectifs d'oiseaux ne cessent de chuter.
"Les oiseaux appelants sont enfermés pendant des mois dans le noir", explique Yves Verhilhac, directeur général de la LPO.
"C'est absolument faux, répond Edmond Rolland, président de la Fédération départementale des chasseurs du Vaucluse. Enfermer des oiseaux dans le noir est une pratique totalement interdite".
"En cherchant à capturer des grives, les chasseurs nuisent aussi à des espèces protégées", affirme la LPO, qui se bat vigoureusement et depuis longtemps contre cette pratique.
"Emmanuel Macron a toujours dit qu'il défendait les chasses traditionnelles, on ne comprend pas", ajoute le président de la Fédération départementale des chasseurs du Vaucluse.
Selon Yves Verhilhac, directeur général de la LPO, la ministre connait très bien le sujet de la biodiversité. "On n'a jamais eu une ministre qui s'y connait autant".
C'est l'Europe qui décide
Mais ces débats "ministre-écolos-chasseurs" se jouent bien au-delà. Ou au-dessus. Les deux camps peuvent toujours s'époumoner, le sujet est parti dans une autre sphère : l'Union Européenne.Depuis toujours, le Conseil d'Etat, plus haute juridiction de France, rejette les demandes d'interdiction de la chasse à la glu. Sauf le 29 novembre 2019.
Le Conseil d’État décide de saisir la Cour de justice de l’Union européenne pour qu’elle précise si la directive Oiseaux permet d’autoriser la capture à la glu.
Cette directive du 30 novembre 2009 interdit le recours à des méthodes de capture massive ou non sélective et cite notamment la technique des gluaux.
Le 2 juillet 2020, la Commission européenne a donc donné trois mois à la France pour arrêter cette pratique de chasse. Le 2 octobre, ce délai arrivera à terme.
Si la France n'a rien fait, la Cour de justice de l'Union européenne s'emparera du dossier. Et ces amendes, sous forme d'astreinte, sont connues pour être élevées. Très élevées.
Le sort de la chasse à la glu semble du coup presque joué.