Coronavirus : "tout se fait en urgence", le difficile travail des agents de pompes funèbres

Selon l'Insee, pas de hausse significative des décès comparé aux années précédentes, pourtant certaines pompes funèbres tournent à plein régime. Considérées comme bénéficiaires prioritaires pour les équipements sanitaires, elles peinent à trouver des masques et des combinaisons. 

Combien y a-t-il réellement de décès dûs au Covid-19 ? Le chiffre reste compliqué à savoir. Seules les personnes décédées à l'hôpital sont dépistées et donc identifiées clairement.

Le difficile travail des agents funéraires


"On ne sait pas quels corps sont contaminés" explique Yohann Ben Mouha, agent funéraire du groupe prestations funéraires Duriez. Son entreprise est présente dans quatre villes des Alpes-Maritimes et du Var : Nice, Menton, Draguignan et Roquefort-les-Pins. 

Pour le moment, l'agence a traité officiellement cinq cas de Covid-19. "Ces corps venaient de l'hôpital, ils vont systématiquement à l'Institut médico-légal Pasteur à Nice pour des dépistages". 

Un flou souligné par le maire de Cannes, David Lisnard dans un tweet le 28 mars dernier. 
Yohan Ben Mouha explique que la plupart des autres corps en ce moment proviennent des Ephads : "on n'a pas accès aux certificats de décès pour vérifier la cause réelle de la mort, il faut donc se prémunir et adopter des équipements sanitaires de précaution", poursuit-il.
 

"On redouble de vigilance niveau hygiène, j'ai les mains sèches à force de mettre de gel hydroalcoolique", explique Yohann Ben Mouha.  

Désormais alors que je ne suis pas croyant, je fais des prières, je croise les doigts le matin pour que tout se passe bien

confie Yohann Ben Mouha. 

Le transport du corps depuis le lieu du décès, c'est pendant cette phase que les employés sont le plus exposés. 

Pourtant sur la liste des bénéficiaires prioritaires aux équipements de protection comme d'autres professions, les pompes funèbres peinent à trouver du matériel. 

"Nos fournisseurs sont en rupture"

Combinaisons de chantier, masques de soudeurs, "on prend ce qu'on trouve".

"Les masques, on pleure pour en avoir dans les pharmacies, car nos fournisseurs sont en rupture. C'est à nous de nous fournir donc on galère" explique Yohann Ben Mouha avant de rajouter :"Souvent les pharmacies nous disent qu'on n'est pas prioritaires, que les équipements sont seulement pour le personnel soignant".

Pour lui, le retrait des corps n'est pas effectué dans de bonnes conditions : "normalement lorsque l'on récupère le défunt dans un Ephad, on laisse une bombe désinfectante, agissant pendant deux heures. Elle permet d'assainir la chambre avant l'arrivée d'un nouveau résident. Aujourd'hui on n'en a plus, nos fournisseurs sont à sec."

L'inquiètude est aussi vive sur la question du manque de cercueils :"on a reçu un mail de l'ARS pour faire l'inventaire de tous nos cercueils disponibles, mais le problème c'est que les usines tournent au ralenti." Même si pour le moment, la région n'accuse pas une mortalité telle que celle du Grand-Est, les entreprises ont peur de manquer :"on avait anticipé et passé de nombreuses commandes au mois de mars, mais on n'est pas rassuré" explique Yohann Ben Mouha. 

"On fait des horaires de fous"

Même constat pour Fabrice Fillon, agent des pompes funèbres de la liberté à Cannes "On fait avec ce qu'on a, masques chirurgicaux et gants, mais je ne me sens pas du tout protégé."
 


Si les pompes funèbres de la liberté à Cannes n'ont pas relevé d'augmentation d'activité, les quatres agences Duriez, elles tournent à plein régime. "Avant l'épidémie, je tournais à un décès par jour, là ça avoisine plutôt les quatre décès jour" raconte Yohann Ben Mouha. 
 
Les mises en bières doivent être immédiates en cette période d'épidémie pour minimiser le risque de contagion. "Tout se fait en urgence, on fait des horaires de fous."

Un décret publié le 1 avril au Journal officiel complète les mesures déjà prises par le gouvernement dans le cadre de l'état d'urgence sanitaire. Il précise que jusqu'au 30 avril, "les soins de conservation [...] sont interdits sur le corps des personnes décédées".

En clair, les familles ne peuvent pas dire aurevoir à leur proche décèdé. "On a des familles traumatisées par les conditions dans lesquels se déroulent les obsèques tantôt par visio ou téléphone avec l'officier de culte, cette mesure nous affecte aussi beaucoup, on ne peut pas répondre à notre mission première" détaille l'agent funéraire.

Pour Morgane Auger, thanatopractrice "c'est une bonne chose mais cela aurait dû être fait avant, comme le confinement".

   

Ce que dit l'Insee

 
Exceptionnellement, pendant la pandémie du Covid-19, l’Insee diffuse le nombre de décès par jour et par département. Au niveau national, on remarque depuis début mars, une légère hausse par rapport à 2019. 

Au 23 mars, il y avait 39 707 morts en France, hors Bouches-du-Rhône en 2020 légérement moins en 2019, mais 44 443 en 2018.

Ces chiffres ne montrent pas donc un lien significatif entre le Covid-19 et l'année 2020. "Au niveau départemental, quatre départements se distinguent par un fort excédent de mortalité entre le 1er et le 23 mars 2020 par rapport à la même période en 2019 : le Haut-Rhin (+ 84 %), la Corse du Sud (+ 40 %), les Vosges et Mayotte".

"Il n’est cependant pas possible d’imputer systématiquement cet excès de mortalité à l’épidémie du Covid-19" explique l'Insee. 
 


Dans la région, il n'y a pas de hausse, on peut même remarquer une infime baisse des décès. 
Pour 100 décès en 2019 dans les Alpes-Maritimes du 1 au 23 mars, il y en a 98 en 2020 pour la même période, c'est-à-dire -2%. 

 
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