Avec la décision gouvernementale de ne pas rouvrir les remontées mécaniques au 1er février, la petite station de Saint-Léger-les-Mélèzes accuse un coup dur. Le directeur de l'école de ski et enfant du pays témoigne de l'impact de cette crise pour sa vallée.
Frédéric Degril est directeur de l'École de ski française (ESF) à Saint-Léger-les-Mélèzes, une petite commune des Hautes-Alpes située dans le Champsaur.
Comme tous les professionnels de la montagne, il accuse le coup après la décision prise par le gouvernement de ne pas rouvrir les remontées mécaniques au 1er février.
"La sécurité, on sait ce que c'est"
Cet enfant du pays regrette la manière dont sont faites les annonces à chaque fois :
"Ce qui me fait le plus mal au cœur depuis le début de l’automne, c’est qu’il faut toujours anticiper et analyser ce qu’ils vont nous dire. Et on a toujours l’impression que c’est l’inverse du bon sens. C’est ça qui nous fait peur"http://www.francebleu.fr/infos/economie-social/les-stations-de-ski-ne-devraient-pas-rouvrir-pour-les-vacances-de-fevrier-1611038018.
La crise sanitaire actuelle, Frédéric Degril dit en avoir pris conscience, comme tous ses collègues de la montagne.
"La sécurité, on sait ce que sait. Dans les écoles de ski, on y fait très attention. On n’a jamais imaginé faire les choses dans l’irrespect ou en faisant prendre des risques aux autres".
Pour les vacances de février, Frédéric Degril espérait bien un retour à la normale. Mais les autorités pourraient rallonger l'interdiction jusqu'au 1er mars en raison d'une actualité sanitaire préoccupante. Pour les habitants de la vallée, la situation est particulièrement difficile. La quasi-totalité des familles est liée à l'activité touristique du ski.
Montagnards et pluriactifs
En montagne, au fil du temps et du développement des domaines skiables, agriculteurs, éleveurs, bergers ont basculé dans la pluriactivité. L'hiver, ils sont aussi moniteurs de ski ou loueurs de matériel.
"Ils peuvent avoir des chambres d'hôtes aussi, comme c'est le cas pour mon épouse et mon fils. En temps normal, à ma table d'hôte, je partage mes repas avec mes clients du ski. Beaucoup sont devenus des amis".
C'est cela l'ambiance en temps normal, dans les petites stations de montagne, comme celle de Saint-Léger-les-Mélèzes. Tout le monde se connait... Aussi, tous pensent à ceux que la crise sanitaire touche de plein fouet.
"Derrière les bars, les restaurants, les magasins, les remontées, les centres de vacances, il y a des salariés... qui ne pourront pas être embauchés cette année. Les salariés non réguliers sont les oubliés. Chez les moniteurs, je pense particulièrement aux jeunes qui ont commencé dans le métier l'an dernier à peine. Ils n'ont pas eu de référence à présenter en 2019 pour pouvoir toucher les aides".
Pour ceux concernés par la pluriactivité, le problème reste grave, mais différent.
"Si on a encore une agriculture dans nos petites vallées de montagne, c’est bien parce que nos agriculteurs peuvent encore avoir la pluriactivité," poursuit Frédéric Degril. "Alors cette année, c’est l’inverse. C’est grâce à l’agriculture qu’on va résister, car ça nous permet de nous "sauver" de la mauvaise année touristique. Mais voilà il ne faut pas que ça dure trop longtemps. On est dans un équilibre très fragile".
Pour les vacances de Noël, traditionnellement familiales, la petite station a proposé des activités de ski pour les petits, en faisant appel aux poneys et chevaux de trait du centre équestre voisin, pour les remontées.
Les vacances de février attirent bien plus les passionnés de ski. Sans remontées mécaniques, "les gens vont se retrouver concentrés sur le front de neige. Et cela nous inquiète", précise le directeur de l'école de ski. "Alors que si le domaine était ouvert, on étalerait les cours collectifs. On n’est pas obligés de partir à la même heure tous, on sait faire et organiser ça. Faire des files d’attente en respectant la distanciation, on sait faire".
Pour Frédéric Degril, l'arrêt des remontées mécaniques qui se poursuit en février, condamne la saison dans une station comme la sienne.
"Quand on arrête une remontée mécanique, on arrête une machine qu’on ne peut pas remettre en route simplement en appuyant sur un bouton. Pour nous, sans relance à la mi-janvier, la saison est finie.
Les petites stations en basse altitude comme la nôtre dans la vallée du Champsaur, arrêtent à fin mars. Mais souvent, ça n’est pas par manque de neige. C’est par manque de clients".
La semaine prochaine, le Premier ministre Jean Castex doit rencontrer les acteurs de la montagne pour "finaliser les mesures de soutien économique. "Les canons à neige ne vont pas fonctionner, les canons à indemnisation doivent être au rendez-vous", a rassuré Jean-Baptiste Lemoyne, le secrétaire d'État au Tourisme.