"On ne sait pas quand nous serons livrés" : le manque de vaccins contre la grippe inquiète médecins et pharmaciens

Alors que l'assurance-maladie a distribué 15,8 millions de bons de vaccination contre la grippe aux plus de 65 ans et aux personnes à risques, les vaccins manquent. Par peur du coronavirus, ou d'une surinfection, les médecins et pharmaciens ont reçu de nouveaux candidats à la vaccination.

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La situation se tend. Les pharmacies peinent à honorer les bons de vaccination contre la grippe que leur présentent les personnes de plus de 65 ans, ou celles présentant des maladies chroniques, considérées comme personnes à risques. Pourtant, le bon a été envoyé par l'assurance-maladie à ce public considéré comme prioritaire.

Mais cette année, en raison de l'épidémie de coronavirus, d'autres candidats aux vaccins se sont présentés dès le mois d'octobre. "Nous n'avons pas fait attention à cela tout de suite", explique Florence Zemour, médecin généraliste à Vitrolles, et représentante des médecins libéraux au sein de l'Union Régionale des Professionnels de santé (URPS) Paca.

On a vacciné largement des gens qui ont eu peur du Covid, parce qu’il y a une inquiétude ambiante.

Florence Zemour, médecin généraliste



"Des gens qui habituellement ne se faisaient pas vacciner contre la grippe, mais qui ont voulu le faire cette année, précise-t-elle. Du coup, il n'y a plus assez de vaccins pour les prioritaires." Résultat, dans les Alpes, comme dans les Bouches-du-Rhône et partout dans la région, de nombreuses pharmacies sont en rupture de stock.

L'une d'elle, située dans les Alpes de Haute-Provence, a inscrit sur une liste d'attente tous les "prioritaires" qui se présentent avec leurs bons. "On ne sait pas quand nous serons de nouveau livrés, raconte désapointée, la pharmacienne. Et si nous le serons".

20% de commande supplémentaire

De son côté, Nghi Tran, qui tient une pharmacie dans le quartier Belsunce à Marseille, comptait lundi encore sur une centaine de vaccins à disposition des plus fragiles et des plus âgés.

"J'avais prévu d'en prendre 20% de plus cette année, explique-t-il. Nous avons reçu la visite d'une représentante de Sanofi, qui nous a avertis qu'il allait y avoir une augmentation de la demande de vaccins cette année, en raison de l'épidémie de Covid."

Le pharmacien assure ne vendre "qu'aux personnes prioritaires", et devoir "refuser à ceux, autres que les personnes âgées ou à risques, qui avaient l'habitude de se vacciner chaque année".

Le Dr Florence Zemour rajoute : "Beaucoup ont voulu se faire vacciner contre la grippe en imaginant que ça allait peut-être les protéger contre le covid."

La médecin généraliste déplore une "communication contradictoire" au niveau national, entre celle des autorités de santé, et celle "de certains médias et personnalités politiques" qui affichent des positions anti-vaccination. Le tout a concourru, selon elle, à une mauvaise compréhension de la campagne de vaccination.

Une épidémie de grippe ralentie par les gestes barrières ?

Reste que l'épidémie de grippe pourrait être moins sévère cet hiver. L'hypothèse est soulevée par le docteur Stanislas Rebaudet, infectiologue à l'Hôpital Européen à Marseille. "C’est tout à fait probable au vu de ce qui a été observé dans l’hémisphère sud cet été où la saison grippale est inversée par rapport à la nôtre, avance le médecin. Une étude américaine montre que le Chili, l’Australie, l’Afrique du Sud, contrairement aux années précédentes, n’ont enregistré que très peu de cas après avoir fait des milliers de tests."

La courbe épidémique est restée quasi nulle grâce aux mesures barrières.


Dr Stanislas Rebaudet, infectiologue (Marseille)

L'infectiologue avance plusieurs raisons à cela :  l'arrêt des voyages internationaux et les mesures barrières, comme le masque, les gels hydroalcooliques et la distanciation physique. "C'est bien la preuve qu’il n’est pas bien compliqué de lutter contre la grippe".

Si on s’en donnait les moyens il n’y aurait pas 5000 morts de la grippe chaque année en France avec des pics à 13000 morts.


Stanislas Rebaudet, infectiologue

Ceci dit, il ne s'agit encore que d'une étude, et l'infectiologue conseille la vaccination aux plus fragiles et aux soignants, déplorant qu'un tiers seulement des soignants se fait vacciner contre la grippe chaque année.
 
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