TEMOIGNAGE. Don d'organes : "sans cette greffe, il me restait deux semaines à vivre"

Un seul donneur peut sauver huit vies. Le pouvoir de donner est modéré par le droit de refus. La région Paca n'est pas bien placée en France, beaucoup de familles refusent le don. Des associations se battent pour informer et convaincre. Témoignages de donneurs et receveurs.

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"Le chirurgien de l'hôpital Nord m'a appelée à minuit. C'était une explosion de joie. Mélangée à de la peur." Marie-Edith Clément a été greffée des poumons en 2016. 

"Sans cette greffe, il me restait deux semaines à vivre." Atteinte d'une maladie auto immune, cette habitante de Piolenc, dans le Vaucluse ne peut plus marcher ni se laver seule. Elle est en fauteuil roulant et dépend de l'oxygène. "Quelle joie de revivre ! J'ai encore du mal à en parler."

Le corps du donneur est arrivé en hélicoptère. Les dons peuvent parvenir de toute l'Europe. L'opération a duré huit heures. "On nous ouvre comme un boîte de sardines, on scie les côtes, le sternum. Au réveil on regonfle les poumons, comme un bébé qui vient de naître. C'est pas facile."

Ensuite, il faut attendre six jours. "Pendant ces six jours, les médecins ne peuvent pas se prononcer. C'est pile ou face. Le personnel est d'une grande gentillesse, ce sont des gens magnifiques." 

La greffe des poumons est un succès. "On ne voit plus les choses de la même façon ensuite. On est plus sensible, plus patient. Revivre c'est merveilleux, magnifique," témoigne Marie-Edith. "On n'oublie pas qu'on respire avec les poumons d'un autre. On remplace la personne qui est partie, il faut en prendre soin." 

La première année est compliquée "On doit utiliser une goutte d'eau de javel pour laver chaque légume, par exemple. Mais quel bonheur de respirer !"

"Tout sauf les yeux"

L'oeil gauche de Danielle Hamou s'est abîmé pendant son opération de la cataracte, lorsqu'une machine est tombée en panne. "Pour me servir de l'eau, je devais poser mon doigt sur le verre. Je n'avais plus la notion des distances." Après sept opérations consécutives, les médecins décident de pratiquer une greffe de cornée. "Je n'avais pas seulement perdu un oeil, j'avais perdu mon équilibre, ma confiance en moi. Je ne pouvais plus conduire, ni faire de sport, j'ai pris du poids." 

Danielle Hamou a 53 ans, elle vit à Marignane et possède une carte de donneuse d'organes depuis une quinzaine d'années "J'ai toujours eu la carte." Dessus, elle a écrit "Tout sauf les yeux." 

"J'ai les mêmes yeux bleu-vert que mon père. J'avais peur que quelqu'un voit à travers les yeux d'un autre. C'est incroyable ! C'est comme une mise à l'épreuve. C'est la seule chose que je ne voulais pas donner et aujourd'hui, on m'en fait cadeau." 

L'opération se déroule en juillet 2021. Danielle retrouve la vue progressivement.   

"Il y a quelqu'un qui vous a donné sa cornée. Je voyage beaucoup, je pense au donneur et je lui dis, qu'il va voir de belles choses encore. La Thaïlande, la Grèce, le Vietnam..."

Mais en mai dernier, son corps fait un rejet. "Je pensais que la greffe avait pris. Je commençais à revoir, je me sentais mieux. "Le don c'est de l'amour. C'est la dernière chose que l'être humain peut faire de beau."   

"Je ne voulais pas perdre mes implants mammaires"

Pour ce témoignage, Danielle G. gardera son nom de famille pour elle. Elle a hésité pendant plus de six mois avant d'accepter une greffe des poumons "Le 19 février 2021, j'allais si mal que j'ai signé l'accord. J'étais au bout du bout. Je ne voulais pas mourir étouffée."   

Danielle G. a des implants mammaires et souhaitait les conserver. Ce qui est incompatible avec sa greffe.

Avant la greffe, elle vivait avec un apport d'oxygène et dormait avec un masque. "Socialement, sentimentalement, sexuellement, tout est entre parenthèses".

Deux jours après son accord, l'hôpital Nord l'appelle "A 1h38, ce qui est la contraction de ma date de naissance," s'amuse cette Marseillaise âgée de 57 ans.

"J'ai toujours été convaincue que la greffe allait prendre, le contraire me paraissait impossible." Pour ses enfants et sa petite-fille, elle choisit "entre prendre et mourir". Sa famille ne lui met pas de pression, de toute façon "C'est un choix personnel".  

En juillet, Danielle a rendez-vous avec ses pneumologues et leur demandera si ses poumons pourraient être greffés une deuxième fois. 

Avec ses 48 kilos pour 1m48, elle dit n'a pas l'air d'une combattante mais qu'elle est une vraie guerrière.

"Nous sommes tous des présumés consentants"

Si l'on applique scrupuleusement la loi sur la bioéthique, "nous sommes tous des donneurs présumés. En cas d'opposition, il faut être inscrit sur la liste de refus."  Pour la région Paca, Jacques Orofino est président de l'association Dons d'organes Dons de vie, Maryse pour la vie.

"En pratique, aucun chirurgien n'accepte de prélever des organes sans savoir si la personne était pour ou contre."  La carte de donneur ne sert plus à rien. Il faut indiquer son consentement ou son refus à ses proches. Si la famille ne sait pas répondre, il n'y a pas de prélèvement.

En région Paca, le taux de refus est de 35% alors que certaines régions françaises sont plus proches des 30%. L'Espagne est en tête des donneurs européens avec 18 à 20% de refus.

Une application été créée pour informer le donneur d'organes. Dans cette application, il est simplement proposé de choisir trois personnes et de leur envoyer son choix. 

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application donneur d'organe ©Don d'organe

"Aucune religion monothéiste ne refuse le don d'organes," précise Jacques Orofino. Les bénévoles travaillent sur leur communication. Un ruban vert a été créé comme symbole du don.

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