Le slogan "L'eau est un bien commun" a été creusé sur un parcours du golf de Bandol (Var) ce 24 juin par des militants écologistes d'ANV-COP21 pour dénoncer "l'accaparement de l'eau pour l'intérêt privé des classes privilégiées". Le directeur du golf, navré par l'absence de dialogue, porte plainte.
À leur arrivée à 6h30 du matin ce 24 juin, les employés du Frégate-Provence golf de Bandol (Var) ont découvert des inscriptions creusées sur la pelouse d'un des parcours. "L'eau est un bien commun" peut-on lire sur le fairway scarifié sur une dizaine de mètres, à côté d'une banderole "La luttte (sic) des classes commence ici" signée "ANV-COP21".
Le mouvement écologiste Action non violente-COP21 a en effet revendiqué la dégradation sur ses réseaux sociaux.
Ce matin, 16 activistes ANV-COP21 ont marqué le fairway du golf Frégate Provence, à Bandol. Nous dénonçons l'accaparement de l'eau pour l'intérêt privé des classes privilégiées en période de sécheresse !
ANV-COP21
Par ce coup d'éclat, les militants souhaitent souligner un paradoxe : la consommation d'eau des golfs alors que "le département du Var est en alerte sécheresse". "Nous demandons une interdiction totale de l'arrosage des golfs, préconise le mouvement. Dans les prochaines décennies, les expert-es du climat prévoient une diminution de 10% à 40% de la disponibilité de la ressource en eau en France. Qui aura alors accès à l'eau ? Les riches ou l'ensemble de la population ?"
"On est ouverts à la discussion"
Atterré, le directeur du golf porte plainte. "Ils sont rentrés sur un domaine privé, tout a dû être savamment préparé à l'avance, glisse Franck Le Blevec, qui raconte avoir été averti par ses employés vers 7h30. Ils ont documenté toute leur action, notamment par des vidéos sur Instagram et avec des drones. C'est impressionnant", poursuit-il.
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Selon les vidéos postées sur Instagram, les seize militants sont passés à l'action "à l'aube" juste avant l'arrivée des salariés. On peut les voir creuser dans la terre, à la binette et au cordeau, les lettres qui formeront le slogan. "C'est un acte contreproductif, juge Franck Le Blevec, car on va devoir réparer ça en rebouchant avec un mélange de terre et de sable... et en arrosant." Le directeur du golf dit ignorer pourquoi le Frégate-Provence golf a été particulièrement ciblé par les militants.
C'est triste, car il n'y a pas de dialogue alors qu'on est ouverts à la discussion. On a affaire à des personnes qui ne se rendent pas compte des efforts déployés depuis des années par la filière golf pour économiser l'eau. On n'a pas attendu les problèmes de sécheresse des dernières années, ça fait vingt ans qu'on réfléchit à la question ici à Bandol (...) Je comprends le message écologiste, on fait du mieux possible.
Franck Le Blevec, directeur du Frégate-Provence golf de Bandol (Var)
Les efforts du golf
Si entretenir un fairway reste une activité gourmande en eau, le golf bandolais diminue sa consommation depuis 2003. Les pins qui ornent le parc, introduits dans les années 1980 et privilégiés par leur pousse rapide, sont remplacés au fil des ans par des espèces locales dont la soif est moins importante.
"De même, depuis 2019, nous introduisons progressivement des graminées [de la pelouse, NDLR] originaires de zones chaudes. Ces zones gardent leur couleur vert fluo malgré la chaleur, nécessitent bien moins d'arrosage - 10 minutes deux fois par semaine contre 20 min chaque jour - et d'intrants chimiques car tombent peu malades," ajoute Franck Le Blevec. Lorsque les 15 hectares de pelouses seront reconvertis, le responsable estime économiser "60% de sa consommation d'eau" par rapport aux graminées traditionnelles.
Concernant l'alerte sécheresse, le responsable indique qu'il respecte scrupuleusement les restrictions imposées par les pouvoirs publics. "Et de toutes façons, on n'a pas le choix : la police de l'eau nous contrôle régulièrement et nous soumettons systématiquement nos relevés de consommation d'eau à la préfecture," explique-t-il. L'arrosage ne puise pas dans les nappes phréatiques, mais dans le canal de Provence, propriété de l'État qui lui accorde le prélèvement.
Si l'État nous dit un jour que l'eau du canal de Provence doit être rendue potable pour alimenter davantage de personnes en eau, alors là, on aura évidemment un problème d'existence en tant que golf. (...) Il est évident qu'alimenter une ville en eau potable serait une priorité.
Franck Le Blevec, directeur du Frégate-Provence golf de Bandol (Var)
Le responsable de l'établissement se dit prêt à discuter et à dévoiler aux militants comment "le golf fait des efforts au quotidien". Le département du Var est placé en vigilance sécheresse depuis le 17 février et les restrictions de consommation d'eau subsistent malgré les récentes ondées.