Après d'innombrables recours juridiques par les habitants et les associations, contre le projet de la carrière de Mazaugues dans le Var, nouvelle étape. Des opposants ont fait le choix de s'établir dans les souterrains du site et ceux malgré les risques d'effondrement encourus.
Depuis une dizaine d'années, plusieurs militants et défenseurs de l'environnement tentent d'empêcher, à Mazaugues dans le Var, l'implantation d'une carrière sur cette commune classée à 80% Natura 2000. Le lieu contient entre autres, l'une des plus grandes réserve d'eau du département.
Après plusieurs années de batailles juridiques, le carrier Provence Granulats-Audemar, a obtenu gain de cause. Les travaux en vue de l'exploitation ont débuté, sur les 50 hectares choisis par la société, pour y extraire des granulats destinés à la production de béton :
Mais pour les habitants et les opposants au projet, cette décision n'est pas acceptable :
On insiste auprès des pouvoirs publics, que de nouvelles données sont apparues depuis que l'entreprise a reçu toutes ses autorisations. Ces rapports montrent qu'il y des espèces protégées sur le site et des risques d’effondrements importants.
Pour les dirigeants de la carrière, toutes les mesures ont été prises pour assurer une parfaite exploitation du site. "Toutes les études ont montré qu'il n'y avait aucune pollution possible. Notre procédé d'élaboration des granulats n'emploie aucun produit chimique", explique Denis Luneau directeur de la société Audemard qui exploite le site de Mazaugues.
Création d'une "ZAD souterraine"
Face aux sentiments d'inaction des pouvoirs publics, une dizaine de personnes originaires de tout l'hexagone, auraient décidé de s'installer dans les souterrains de la carrière afin de protester contre ses travaux et d'empêcher le carrier d'exploiter le site. Une occupation illégale et dangereuse. Une zone à défendre (ZAD).
Nina Millet, qui se représente comme la porte-parole du mouvement, l'affirme :
Actuellement, ils sont dans le froid, dans le noir, l'humidité, ils dorment beaucoup, suite à diverses conversations je me dis qu'ils dorment beaucoup à cause du manque d'oxygène, certains se sont enfoncés dans d'autres galeries. J'ai vu 6 personnes.
Une vidéo a également été postée sur YouTube, cela ferait 11 jours qu'ils seraient sous terre dans des conditions précaires :
"Ces occupants ne sont en tout cas pas identifiés comme appartenant à une association du collectif", précise Thierry Gontier du membre du collectif anti-carrière.
Difficile, à ce stade, d’être certain que l’occupation se situe bien dans le labyrinthe de galeries de la carrière, et que les "zadistes" sont toujours sur les lieux. Contacté, le service communication de l'entreprise exploitante explique : "ne pas être sûr que quelqu'un est sur le site, les travaux de terrassement continuent donc." Et ceux malgré les risques potentiels...
Un huissier devrait constater sous 15 jours la présence des occupants. La préfecture du Var a mis en place un périmètre de sécurité, le maire a quant à lui préféré ne pas s'exprimer sur le sujet.
Des rapports accablants
Des animaux protégés comme des chauves-souris se trouveraient notamment dans les souterrains. Une expertise menée en mars 2021, conclu a la présence d'espèces très rares dans les carrières, et affirme : "le potentiel et l’intérêt de la "Mine des 3 Pins" semblent extrêmement importants vis-à-vis des chiroptères." Des données également affirmées par ECO-MED. D'autres espèces en surface comme des insectes, des oiseaux ou des reptiles seraient elles aussi ménacées.
Un rapport plus ancien de 2015, dirigé par le GIP Géodéris, à la demande de la DREAL Provence-Alpes-Côte d’Azur, confirme également les craintes des militants. Six phénomènes de « mouvements de terrain » ont été retenus :
l’effondrement généralisé, l’affaissement, l’effondrement localisé, l’écroulement rocheux, le glissement et le tassement. En fonction des types de phénomènes, les niveaux retenus varient de faible à fort.
Des risques d'affaissement des routes avec le trafic régulier des camions de chantier inquiètent les opposants au projet.
Une catastrophe pour les réserves d'eau
7 millions de m3 d'eau se trouve en dessous de la carrière, dans les anciennes galeries minières si un effondrement avait lieu les risques seraient considérables. De plus, les risques de pollution des eaux inquiètent les militants.
En 2019, Robert Durand, hydrogéologue, président de la Confédération Environnement Méditerranée affirmait : "cette carrière va écraser la plus grande réserve d'eau potable qui alimente le littoral varois et l'aire toulonnaise. Si on détruit cette réserve et qu'il y a de la sècheresse comment va t-on s'alimenter ?".
Sur ce point, le jugement a néanmoins été rendu en faveur de l'entreprise exploitante, aucun nouvel élément est à apporter au dossier.
A ce jour, les recours juridiques et légaux sont allés en faveur du projet, pourtant les opposants refusent encore de baisser les bras. Selon un juriste proche du dossier, le collectif aurait écrit à la Ministre de la transition écologique Barbara Pompili, début avril puisque l'alerte lancée auprès de l'OFB - Office français de la biodiversité n'aurait pas abouti, pas d'enquête ni de réponse.
Après retour du ministère, le parquet de Draguignan aurait demandé à l'OFB d'ouvrir une enquête au vu des nouveaux éléments concernant la présence d'espèce protégées sur le site.
En attendant ce verdict, l'entreprise continue de mener ses travaux sur le site malgré les risques.