Particulièrement présent dans le sud du Var, l'arrière pays niçois et sur une bonne moitié des Hautes-Alpes, le radon peut, à forte concentration et suite à une exposition prolongée, causer des cancers des poumons. Heureusement, il existe plusieurs solutions pour réduire les risques.
Le radon est un gaz radioactif naturel inodore, incolore et inerte. Peu connu, il est présent dans le sol. Autre particularité à savoir, ce gaz s’accumule dans les espaces clos, notamment dans les bâtiments, donc les maisons !
Depuis 1987, il a été reconnu cancérigène pulmonaire certain pour l’homme par le centre international de recherche sur le cancer (CIRC) de l’Organisation mondiale pour la santé (OMS).
Sur la carte de potentiel radon de l'IRSN (Institut de Radioprotection et de Sureté Nucléaire), trois grosses bandes rouges définissent clairement les zones où le potentiel d'exposition pour les habitants est le plus élevé dans notre région (catégorie 3).
Elles s'étendent de Toulon à Fréjus dans le Var, et sur toute la moitié nord des Hautes-Alpes de Saint-Firmin jusqu'à Briançon.
Dans les Alpes-Maritimes, l'arrière-pays est également concerné, de Daluis jusqu'à Tende, le long de la frontière italienne.
125 communes classées à risque élevé
En PACA, près de 125 communes sont classées depuis 2018 en catégorie 3, autrement dit "en zone à risque potentiel élevé". En voici, le "palmarès" :
- Le Var est le département le plus concerné (60 communes)
- Les Alpes-Maritimes (35 communes)
- Les Hautes-Alpes (28 communes)
- Les Alpes de Haute-Provence (2) .
C'est sur cette carte interactive que s'appuie l'ARS PACA ( Agence Régionale de Santé) pour mener ses campagnes de prévention. Car même si le radon est un gaz naturellement présent dans nos sols un peu partout en France, sa présence n'est pas à prendre à la légère. Sa radioactivité peut être mortelle.
"Selon des estimations menées sur des cohortes de témoins et plusieurs études de cas, 10% des cancers du poumon en France seraient déclenchés par le radon, nous explique Laurent Poumarat, ingénieur au département "santé environnement" de l'ARS PACA.
On évalue à 700 le nombre de personnes qui pourraient décéder à cause du radon en Provence-Alpes-Côte d'Azur
Laurent Poumarat, ingénieur au département "santé environnement" de l'ARS
"Des chiffres à prendre avec précaution "précise-t-il, "car il est très difficile de faire une évaluation exacte".
Le radon invisible, inodore, mais pas inoffensif
En effet, le radon est un gaz invisible, inodore et surtout radioactif. Il est issu de la désintégration du radium présent dans nos sous-sols. Il est présent en quantités plus importantes dans les roches d’origine magmatiques qui se sont formées en profondeur mais qui, en montagne, affleurent à la surface, d'où la forte exposition en Provence-Alpes-Côte d'Azur.
"Dans l'air extérieur, les concentrations en radon sont faibles, car le gaz se disperse. Ce qui pose problème, c'est plutôt sa concentration dans les bâtiments où nous passons 80 % de notre temps, surtout en hiver" nous explique Catherine Schlouck, chargée de mission à l'association Gap Sciences Animations, "Lorsqu'on le respire trop souvent et trop longtemps, le radon peut affecter nos cellules pulmonaires" Alors que faire si on vit dans ces zones à risque ?
Le risque pour la santé est proportionnel à l’exposition au radon subie tout au long de la vie,
Catherine Schlouck, chargée de mission à l'association Gap Sciences Animations
Les dosimètres, seule solution pour mesurer
"La première étape pour se rendre compte de la concentration en radon dans sa maison, c'est de le mesurer. Car contrairement à d'autres gaz, celui-ci ne provoque aucun symptômes", nous explique Laurent Poumarat de l'ARS. Pour cela il suffit d'acheter un dosimètre, et de le faire analyser.
"Ils sont disponibles sur plusieurs sites de laboratoires spécialisés pour une petite vingtaine d'euros, analyses comprises", précise Catherine Schlouck de Gap Sciences Animations.
Cette chargée de mission connait bien le sujet, c'est elle qui organise les conférences pour le public dans toutes les Hautes-Alpes, et les formations dans les écoles.
"Le radon remonte dans les maisons par les défaut d'étanchéité des habitations, les fissures, les dalles sans vide sanitaire qui sont mal isolées ».
La concentration en radon est donc propre à chaque maison. "Il faut aussi comprendre que vous pouvez avoir une habitation bien isolée en zone de risque 3, qui aura une faible concentration, et un logement en zone de faible risque (catégorie 1) mais très mal isolé et ventilé qui sera dangereux potentiellement pour les habitants" précise-t-elle.
Une bonne ventilation fait chuter les risques
Comme nous l'avons vu plus haut, le radon devient inoffensif lorsqu'il est en extérieur car il se dilue dans l'air. "La mesure la plus importante à prendre est donc d'assurer une bonne ventilation des pièces", nous explique Ambre Marchand-Moury, spécialiste du Radon au Cerema ( Centre d'études et d'expertise sur les risques, l'environnement, la mobilité et l'aménagement)
"Il faut aérer régulièrement le logement, minimum une fois par jour, et plusieurs fois lorsque cela est possible. Ensuite il faut s'assurer que le logement est équipé d'une bonne VMC, de préférence en auto-régulation ou en double-flux, afin que l'air frais qui rentre soit légèrement supérieur à celui qui sort. Sinon les extracteurs aspirent le radon et entrainent l'effet inverse".
Selon ses chiffres, 50 % des VMC posées dans les maison neuves ne sont pas conformes pour l'évacuation du radon. D'où la mise en place d'une obligation de mesure avant réception des travaux dès cette année. Elle est inscrite dans la RE 2020 qui remplace la RT 2012.
Il existe également d'autres méthodes un peu plus techniques comme par exemple étanchéifier sa dalle avec une membrane pare-radon posée entre le sol et la dalle de la maison. Un surcoût très faible pour une maison neuve. On peut aussi boucher tous les défaut d'étanchéité, fissures et trous. Il y en a beaucoup notamment au niveau des canalisations créées pour laisser passer l'eau ou l'électricité, comme nous l'explique très bien cette courte vidéo de l'ARS de Bourgogne Franche Comté.
On peut aussi construire sa maison sur pilotis, dans ce cas il n'y aura aucune trace de radon dans la maison.
Pour vous aider à réaliser les travaux, une aide de l'Agence Nationale de l'habitat ( ANAH) peut être attribuée lorsque les travaux de réduction du radon s’avèrent importants, sous réserve de respecter certains plafonds de ressources.
Briançon : écoles sous haute surveillance
"Pour les bâtiments recevant du public, comme les hôpitaux, les écoles et les crèches, la réglementation est déjà bien présente depuis 2018 avec une obligation de mesure dans les zones de catégorie 3", nous explique Laurent Poumarat de l'ARS.
Ainsi, la ville de Briançon, pionnière dans la région, a déjà mené des campagnes de mesures dès 2019 dans les écoles et les crèches. "Quelques classes ont dû être momentanément fermées car elles dépassaient les 300 Bécquerel par m3 d'air" selon l'ARS.
"Dès l'été 2020, la ville et la communauté de communes ont entrepris des travaux de sécurisation", nous informe Liz Leromain de la mairie de Briançon.
"Dans les établissement de Fortville, St Blaise et Pont de Cervières, on a équipé les classes et parfois même les sous-planchers de ventilations performantes. Et depuis cet hiver de nouvelles campagnes de mesures avec des dosimètres sont en cours pour voir si les résultats sont concluants".
Toulon installe des dosimètres
Même démarche du côté de la ville de Toulon qui a entrepris depuis cet hiver de mesurer la concentration de ce gaz dans 104 établissements scolaires et crèches avec des dosimètres.
"Nous les avons tous équipés de détecteur de CO2 pour obliger les responsables à aérer régulièrement les classes et les pièces. Maintenant nous mesurons le résultat" nous explique Yannick Chenevard, 1er adjoint en charge du dossier Radon .
Les premières réponses seront obtenues dès la fin février, à Toulon comme à Briançon et s'étaleront jusqu'à cet été. Des démarches similaires ont été menées dans les Ehpad et les établissements recevant du public comme les hôpitaux nous précise l'ARS.
Le nombre annuel de décès par cancers du poumon attribuable au radon est estimé à 3000 décès en France.