Le 24 juillet, Anaïs, mère de trois enfants, se rend à la piscine du Port Marchand à Toulon. Alors qu’elle allaite son bébé, un maître nageur lui interdit. Elle s’est exprimée sur les réseaux sociaux pour dénoncer cette situation qu'elle ne comprend pas.
Le 24 juillet, Anaïs s'en rappellera. Pendant le cours de natation de sa fille de six ans à la piscine du Port Marchand à Toulon, elle attend patiemment à la pataugeoire avec ses deux autres enfants, puis, alors que sa fille d'un an pleure, elle prend la décision naturelle de lui donner le sein : "je ne réfléchis jamais quand mon enfant a faim, je me suis décalée et je me suis installée sur les marches de la pataugeoire, un petit peu sur le côté pour allaiter ma fille, je veux pouvoir le faire partout mais ne pas déranger les autres". Mais un jeune maître-nageur, qu'elle qualifie de "poli" et "très gentil", vient lui dire qu'elle ne pouvait pas allaiter dans l'enceinte sportive puisqu'"il y a des enfants".
"Maman, pourquoi on l'empêche de manger ?"
Sous le choc, la mère de trois enfants répond un bref "OK" puis s'en va : "Dans les vestiaires, mes deux enfants, qui ont trois et six ans, m'ont prononcé une phrase qui a été le déclencheur de toute cette histoire, ils m'ont regardé et ils m'ont dit, "Maman, pourquoi on n'empêche notre sœur de manger ?". Cette phrase a résonné dans ma tête et je me suis dit que ce n'était pas possible".
Anaïs, sous le choc, envoie alors un mail à la mairie de Toulon en espérant, en tant que femme, qu'elle comprendrait et qu'elle ferait une note de service aux piscines de toute la ville pour que ça ne se reproduise plus. "En toute honnêteté, quand j'ai envoyé ce mail, je m'attendais à des excuses, mais ça ne s'est pas passé du tout comme ça".
Le 8 août, deux semaines plus tard, la Toulonnaise reçoit une réponse par mail : "J'ai commencé à le lire et là j'ai vraiment été scandalisée. Ils se dédouanent avec des arguments qui ne tiennent pas du tout la route".
Le premier argument est que le chlore peut représenter un danger pour son bébé. "Le chlore est réglementé par l'ARS au niveau des dosages et puis tous les enfants ou même des adultes boivent la tasse. Ça arrive très régulièrement, il n'y a pas de danger". Puis le deuxième argument, d'après la mairie, c'est que "certains gestes de la vie font partie de la sphère intime et n'ont pas leur place dans un lieu public". Une phrase qui fait bondir Anaïs : "Qu'on dise que l'allaitement qui sert à nourrir son enfant n'a pas sa place dans un lieu public, je ne peux pas l'entendre, ni le concevoir".
Ça revient à dire que toutes les femmes qui allaitent doivent rester chez elles enfermées. Pour moi c'est vraiment des propos qui sont complètement préhistoriques.
AnaïsMère de trois enfants
"On m'a traité d'allumeuse"
Pour cette mère de trois enfants, ces situations font reculer le droit des femmes et le droit naturel d'allaiter. "J'ai été aide-soignante, donc j'ai été amenée à discuter du sujet allaitement avec des personnes âgées et elles m'ont toutes affirmé qu'à leur époque, il n'y avait pas tant de problèmes avec l'allaitement. On recule alors qu'on avance dans le temps".
Anaïs reçoit de nombreux messages de soutien depuis qu'elle a partagé son expérience sur les réseaux sociaux, mais certains commentaires restent très accusateurs et négatifs : "Tout à l'heure, une dame m'a traité d'allumeuse. Je trouve ça scandaleux d'avoir encore ce genre de discours en 2024. C'est lamentable. Faut vraiment que les gens se mettent dans la tête que l'allaitement n'est pas malsain".
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Le samedi 10 août, la maire de Toulon, Josée Massi, a publié un communiqué "pour mettre un terme à une polémique qui est en train d'enfler sur les réseaux sociaux". Les raisons sanitaires sont évoquées en mentionnant le fait que "les employés municipaux ont recommandé de ne pas allaiter directement dans l'eau mais sur les gradins ou dans une "zone sèche"". Mais pour la maman, cette affirmation est fausse. On lui aurait simplement dit qu'elle n'avait pas le droit d'allaiter à la piscine : "Avant de publier son communiqué, la maire ne m'a même pas contacté pour avoir ma version des faits. Il n'y a même pas d'excuses. Elle décrit juste le mail comme une formule maladroite".
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Un grand soutien sur les réseaux sociaux
Cependant, elle tient à signaler qu'elle "apprécie énormément la partie où elle indique qu'un rappel a été fait dès samedi dernier concernant tous les lieux sportifs, où dorénavant, il est possible d'allaiter". La personne en charge de la communication de la mairie a pris contact avec elle et s'est engagée à lui proposer, éventuellement si la maire est d'accord, d'avoir un entretien téléphonique afin d'éclaircir la situation.
Autre point positif, Anaïs reçoit de nombreux messages de mères, de pères, d'associations : "J'ai même reçu un message d'un juriste qui m'a proposé de m'accompagner si besoin". Elle ne s'imaginait pas que sa publication prendrait autant d'ampleur mais elle est "satisfaite et très contente du soutien" qu'elle a pu recevoir ces derniers jours.