IMAGES. "Regarder en face la violence masculine" : des féministes commémorent les 14 victimes d'un féminicide de masse

Ce mercredi 6 décembre, les automobilistes ont pu découvrir à Avignon sur l'avenue Montclar, un message fort, en mémoire des 14 femmes tuées par un masculiniste dans l'école polytechnique de Montréal le 6 décembre 1989. Un collage réalisé la veille au soir par le collectif les Amazones d'Avignon.

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"Le 6/12/1989, un masculiniste commet un féminicide de masse à l'école polytechnique de Montréal. Il assassine 14 femmes". C'est le message collé sur les murs de l'avenue Montclar à Avignon par le collectif " les Amazones d'Avignon" mardi 5 décembre dans la nuit pour qu'il soit visible le 6 décembre au matin, jour de commémoration de ce féminicide.

"Je hais les féministes"

Le 6 décembre 1989, à 17h10, dans la salle C-230.4 de l’École polytechnique de Montréal, Marc Lépine fait irruption, force les hommes à sortir et annonce : "Vous êtes toutes des féministes et je hais les féministes". Après ces paroles de haine, il oblige les femmes à s'aligner contre le mur et les exécute au fusil automatique. Elles sont neuf à mourir sur place. Ensuite il va arpenter les couloirs et tuer chaque femme qu'il va rencontrer. Il va jusqu'à achever au poignard la dernière avant de se suicider.

Au total, elles seront 14 à mourir et 10 autres seront gravement blessées. Ce geste était prémédité, puisqu'il a laissé un message manuscrit dans lequel il explique son geste et sa haine des femmes.

Un "femmage"

Pour la deuxième année consécutive, le collectif féministe des Amazones d'Avignon a décidé de rappeler ce féminicide de masse en rendant hommage ou plutôt "femmage" aux victimes.  "C'est comme un hommage mais pour les femmes", explique Blandine, membre du collectif les Amazones d'Avignon.

Elles ont réalisé le collage la veille au soir pour que le message soit lu ce 6 décembre au petit matin. Les activistes ont choisi l'avenue Montclar à Avignon, située entre la gare routière et la gare SNCF. "Le 6/12/1989, un masculiniste commet un féminicide de masse à l'école polytechnique de Montréal. Il assassine 14 femmes", peut-on lire, assorti des portraits des 14 jeunes femmes tuées.

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Collage féministe en souvenir du féminicide de Montréal de 1989 ©Amazones d'Avignon

"Il y avait la phrase et les portraits au niveau du feu rouge pour que les automobilistes aient le temps de bien regarder les visages souriants de ces jeunes femmes et qu'ils aient le temps de retenir leurs noms et leurs dates de naissance", insiste Blandine.

"Poser les vrais mots"

Cette date est importante, à plusieurs niveaux pour les féministes du monde entier. "D’abord parce que le terme de féminicide de masse n'a été employé que tardivement. Avant on parlait de drame, d'attentat de tuerie de masse, mais il a fallu énormément de temps pour que l'on pose les vrais mots sur ce qui s'est passé", détaille Blandine.

Pour les militantes du collectif, "même en 2023 le mot féministe fait peur", et elle donne comme exemple : "Preuve en est, le collage a été immédiatement arraché". En effet, très rapidement dans la journée, le message a presque totalement disparu, seuls quelques portraits subsistent. Pour Blandine, "Cela montre que la société n'est pas prête à regarder en face la violence masculine".

L'an dernier, les membres du collectif avaient réalisé un collage mais seulement avec les noms des victimes, "cette action avait été relayée jusqu'aux familles des victimes et cela les avait énormément touchés. Pour continuer à honorer la mémoire de leurs filles, sœurs et amies, nous avons décidé de refaire une action cette année".

Des victimes niées pendant des années

"C’est important d'en parler, ne pas le faire serait les tuer une deuxième fois. Et c'est très important d'utiliser les mots corrects et ne plus avoir de complaisance avec la violence masculine", détaille Blandine.

Autre chose que Blandine ne veut pas oublier, c'est le documentaire de Patric Jean La domination masculine. Le cinéaste belge revient notamment dans ce documentaire sur le féminicide de masse.

"On apprend que pendant des années, des hommes de l'armée canadienne ont commémoré cet événement du 6 décembre, en mettant en valeur l'acte du tueur". Les victimes étaient totalement niées, et d'ailleurs le réalisateur n'a pas pu présenter son film à Montréal, menacé par des membres de la mouvance masculiniste canadienne.

Des collages pour "porter la parole des femmes"

Pour Blandine et les autres femmes membre du collectif, il est important "de porter la parole des femmes que l'on veut faire taire". Régulièrement elles organisent des collages nocturnes sur différentes thématiques.

Des actions militantes dont Blandine se passerait bien. "Si ce n'était plus nécessaire, on ferait autre chose de nos soirées, mais tant qu'il faudra le répéter nous serons là."

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