Le Festival d'Avignon revisite les classiques, des "Âmes mortes" de Gogol aux "Damnés" de Visconti avec la Comédie-Française en passant par "Les frères Karamazov" de Dostoïevski. Olivier Py a présenté ce jeudi une programmation très inspirée par "les grands chefs d'oeuvres littéraires".
Olivier Py, directeur du festival d'Avignon, sera l'invité du journal de 19 heures ce vendredi soir.
Pour la 70e édition, le festival est raccourci de 3 jours et se déroulera du 6 au 24 juillet, du fait du calendrier scolaire.
Un feuilleton tous les midis
La jeune compagnie de Thomas Jolly "La Piccola Familia" plongera dans l'histoire du Festival fondé par Jean Vilar en 1947, avec un feuilleton donné tous les jours à midi dans le jardin Ceccano. La formule du feuilleton gratuit lancée l'an dernier avait connu un grand succès avec "La République de Platon".Olivier Py a tenu à rouvrir tous les grands lieux du festival pour la 70e édition, dont la Carrière de Boulbon, fermée l'an dernier par mesure d'économie.
Boulbon, située à une quinzaine de km d'Avignon, accueillera à ciel ouvert "Karamazov" mis en scène par le jeune directeur du théâtre de Saint-Denis
Jean Bellorini.
La Comédie-Française ouvre les festivités dans la Cour d'honneur avec "Les Damnés", adaptés par le belge Ivo van Hove, un des metteurs en scène les plus innovants d'Europe. "Le but d'Ivo van Hove est moins de raconter l'histoire que tout le monde connait, à savoir la montée du national socialisme en Allemagne et la corruption des grandes familles bourgeoises et des élites financières que d'essayer de comprendre ce qui se passe aujourd'hui", souligne Olivier Py.
Politique, populismes et nationalismes
Parmi les grands thèmes du festival cette année, Olivier Py a évoqué "l'impuissance politique et la montée des populismes et des nationalismes, qui curieusement interpellent plus les artistes que les politiques". Plusieurs pièces, outre "Les Damnés", abordent le retour des "vieux démons" de
l'Europe. Le Polonais Krystian Lupa présente, comme l'an dernier, une oeuvre de l'Autrichien Thomas Bernhard. "Place des héros", conçue pour les 50 ans de l'annexion de l'Autriche par l'Allemagne, avait fait scandale en proclamant qu'il "y a aujourd'hui plus de nazis à Vienne qu'en 1938."
Le Russe Kirill Serebrennikov s'attaque aux "Âmes mortes" de Gogol, (20- 23 juillet), critique féroce de la médiocrité humaine, laissé inachevé par l'écrivain décédé en 1852.
Pas de festival d'Avignon sans son marathon théâtral
Le jeune Julien Gosselin, qui avait frappé un grand coup en 2013 à seulement 26 ans avec l'adaptation des "Particules élémentaires" de Michel Houellebecq, donne en 12 heures "2666", le "roman monde" de 1350 pages du Chilien Roberto Bolano (1953-2003).
Après un focus argentin l'an dernier, Avignon présente un focus Moyen-Orient (deux pièces de Beyrouth, une de Damas, une de Téhéran), même si on pourrait parler aussi de "focus belge" avec 6 spectacles, a observé Olivier Py.
L'Israélien Amos Gitai donnera une version théâtre de son film "Le Dernier Jour d'Yitzhak Rabin" avec Hanna Schygulla (10 juillet dans la Cour d'honneur).
L'Espagnole radicale Angelica Liddell, habituée du festival, revient avec l'histoire d'un célèbre cannibale japonais. "On peut s'attendre au pire", a plaisanté Olivier
Py.
Parmi les découvertes de cette édition, beaucoup de collectifs, comme les Grecs du "Blitztheatregroup" ou des Belges "FC Bergman", qui montent un spectacle monumental autour de l'accrochage dans un musée d'une crucifixion de Rubens (Parc des expositions).