Ni la FO, ni la CGC, ni même la CGT d'Airbus ne s'inquiètent des conséquences immédiates de l'assemblage des premiers avions du groupe aux Etats-Unis en terme d'emploi en Europe. Mais tous s'interrogent sur la pertinence de la stratégie d'Airbus.
Ni enthousiasme forcené, ni inquiétude particulière. Mais des interrogations. Les syndicats d'Airbus, en effet, "attendent de voir" les résultats de la stratégie de l'avionneur qui inaugure en grandes pompes médiatiques ce lundi à Mobile (Alabama, sud) son premier site d'assemblage aux Etats-Unis, pré carré de son grand rival Boeing, dans l'espoir d'y accroître sa part de marché et d'augmenter sa cadence de production face à une forte demande mondiale.
Cette seconde usine du groupe Airbus hors de ses terres européennes après celle de Tianjin en Chine ne représente pas pour les syndicats d'Airbus une menace directe pour l'emploi sur les lignes d'assemblage européennes. Airbus espère produire en Alabama "seulement" quatre avions par mois à partir de 2018, soit 40 à 50 par an, rappellent-ils.
"Les tronçons de ces avions seront toujours fabriqués en Europe", souligne la déléguée CGC Françoise Vallin. "Et tout emploi créé aux Etats-Unis en générera 4 en Europe", ajoute-t-elle.
"Oui, mais, objecte le délégué central FO Jean-François Knepper, le prix des transports et de la logistique est tel que le coût d'un avion assemblé en Alabama, même avec des salaires plus faibles, sera nécessairement plus important. Et à terme, Airbus sera tenté de transférer aux Etats-Unis d'autres activités que l'assemblage". "On sera particulièrement vigilants sur cette question", prévient-il.
Tandis que le délégué syndical CGT Christophe Lloret estime qu"il y a une montée en cadence en terme de production qui va être absorbée par l'usine des Etats-Unis". "Nous ne sommes pas persuadés, ajoute-t-il pourtant, de la pertinence de la stratégie". "Ce projet mis en oeuvre il y a déjà trois ans n'a pas pour l'instant engendré le flot de commande espéré", conclut-il. "Ces avions auraient bien pu être assemblés à Toulouse".
Ce sentiment est partagé du côté de FO. "Cette seconde usine du groupe Airbus hors d'Europe après celle de Tianjin en Chine "ne se met pas du tout en place dans les mêmes conditions", renchérit Jean-François Knepper. "Même si le marché américain est intéressant, admet-t-il, les choses ne vont pas se passer comme en Chine, car ce n'est pas l'Etat américain qui dicte aux compagnies américaines quel avion il faut acheter. On regrette qu'Airbus considère cette usine en Alabama comme la panacée. La proportion de commandes risque fort de ne pas aussi massive qu'espéré. Nous jugerons donc sur pièce.Mais nous sommes loin d'applaudir des deux mains. Nous n'oublions pas non plus que l'Airbus A320 est né grâce à des fonds publics européens."
Avec cette implantation locale, Airbus vise 50% du marché de l'aviation civile aux Etats-Unis, contre 40% actuellement. "Cette implantation devrait favoriser les achats d'Airbus par les compagnies américaines", pronostique pour sa part Françoise Vallin. "C'est une décision stratégique, dont il faudra suivre les objectifs dans le temps".