Anna Circé a lancé en avril une pétition en ligne pour interpeller le tribunal de Caen. Elle y dénonce la lenteur de la justice pour juger le viol dont elle a été victime en 2011. La procédure est-elle trop lente?
Plus de 100 000 signatures. Le cri de détresse d'Anna Circé, son nom d’auteure, victime d’un viol il y a cinq ans et demi, n'en finit pas de mobiliser, La pétition qu'elle a lancé en avril 2017 voit chaque jour le nombre de signataires augmenter.
+70.000 personnes se mobilisent derrière #JeSuisAnna pour que son violeur soit jugé après 6 ans de procédure. https://t.co/d8LEBZ6NAT pic.twitter.com/hPL1ZFNuIH
— Change.org France (@ChangeFrance) 7 août 2017
Malgré les preuves (identification de l'auteur grâce à l'ADN et de ses aveux du non consentement de ma part), mon agresseur est toujours en liberté, mène une vie paisible, s'est marié et travaille. Et de mon côté ? Quatre ans après l'agression, j'ai subi un syndrome de stress post traumatique.
Anna Circé avec cette pétition veut interpeller le Tribunal de Grande Instance de Caen, alerter pour que " son violeur toujours dehors et non jugé après cinq ans et demi de procédure" passe aux Assises .
Le témoignage d'Anna Circé:
Le viol, un crime presque ordinaire
A travers le cri de détresse d'Anna Circé, la question de la justice en la matière. D'abord parce que la grande majorité des victimes ne portent jamais plainte. Sur 75 000 femmes victimes de viol ou de tentatives de viols par an en France, seules 10% des victimes le signalent à la police.
Dans « Le Viol, un crime presque ordinaire », livre référence en la matière, on peut lire que sur ces 75 000 cas de viol, à peine 3% finissent par être jugés en cour d’assises!
D'abord parce que les victimes sont souvent dans le déni et n'ont pas confiance dans la procédure judiciaire mais surtout c'est une procédure qui prend du temps.
Un traumatisme supplémentaire
Une victime doit en moyenne attendre trois ans pour que l’instruction d’un viol soit achevée et cinq ans au total pour le jugement en cour d’assises.
Le procès aux Assises devrait se tenir en 2018, mais au point où j'en suis maintenant, il arrive trop tard. La justice m'a laissé tomber, a permis à mon agresseur de détruire ma vie même une fois l'acte commis et je croise sa route plusieurs fois par mois.
La " correctionnalisation " des viols
Tout le problème pour une victime de viol est d’arriver jusqu'aux assises. Enormément de plaintes pour viol débouchent sur un non-lieu ou un classement sans suite.
Mais aussi pour aller plus vite, le crime devient un délit, c’est la « déqualification » des viols.
Depuis 1980, le viol est un crime et doit être jugé dans une cour d’assises. Or, il y a beaucoup de viols qui sont correctionnalisés pour
désengorger les tribunaux. Dans ce cas de figure, pas de jurés mais seul un magistrat qui juge l'affaire...
L'écriture et la résilience
En attendant que le viol dont elle a été victime soit jugé, Anna Circé écrit. A nos confrères de Ouest-France, elle racontait sa démarche littéraire en mars 2017. L'ex-professeure de lettres originaire de Lisieux a publié récemment "Des étoiles dans le caniveau ". « J’y travaille depuis un an », explique-t-elle. L’histoire d’une jeune fille qui tente de se reconstruire après avoir subi une agression, et qui se trouve ensuite trahie par l’ami dont elle se sentait le plus proche…
Il me trouva, s’empara de moi, régna sur mon âme puis disparut définitivement. J’ai disparu avec lui, et je ne suis jamais parvenue à me retrouver…