Le transfert d'aides européennes vers le bio et l'agriculture de montagne inquiète la FNSEA. La baisse des versements en 2018 pourrait impacter les céréaliers, notamment dans l'Eure.
C'est une opposition totale entre deux modèles agricoles qui se joue dans les réactions aux annonces faites par le ministre de l'agriculture, Stéphane Travert, le 27 juillet.
Le gouvernement a décidé du transfert de 4,2 % des aides européennes de la PAC (Politique Agricole Commune) du premier pilier de celle-ci vers le second pilier. Le premier pilier, financièrement le plus important, est dédié à l'aide par hectare des agriculteurs et aux aides couplées pour certaines productions en difficulté. Le deuxième pilier (appelé FEADER) est consacré à des aides plus ciblées : agriculture biologique, de montagne (ou de tout "handicap naturel"), et les actions de développement du territoire rural.
L'augmentation du nombre d'exploitations situées dans ces zones d'agriculture difficiles, et la montée en puissance du modèle biologique provoquent la hausse des besoins dans ce second pilier pour assurer les aides, notamment à la conversion biologique et à l'accompagnement des jeunes agriculteurs.
Pour la FDSEA de l'Eure, dont une minorité de membres touchent des aides du second pilier, la décision de transfert "va peser une fois de plus sur [leur] revenu". Le syndicat national rapporte lui la faute sur une défaillance lors du gouvernement précédent. Et demande à ce que le financement du second pilier ne soit pas permis par une baisse de la première tranche d'aides européennes. Les Chambres d'Agriculture demandent elles un effort supplémentaire de la part de l'État pour compléter ces mêmes aides.
Pour certaines organisations environnementales, ainsi que les fédérations d'agriculteurs biologiques, la réaction est contraire : cette réorientation budgétaire, appliquée en 2018, ne serait pas suffisante pour accompagner le développement de l'agriculture biologique notamment, et des petites exploitations. La législation européenne permet, au maximum, le transfert de 15 % du premier pilier vers le second.
La seconde annonce du ministère concerne le maitient du "paiement redistributif", qui concerne spécifiquement les petites et moyennes exploitations, à 10 % du premier pilier de la PAC. La FNAB (Fédération Nationale d'Agriculture Biologique et des régions de France) demandait une hausse de ce paiement dans les mêmes orientations.
Dans l'Eure, les membres de la FNSEA mettent en avant leur "dépendance aux aides" qui les inquiète suite à ces annonces. Le gouvernement doit maintenant se concerter avec les Conseils régionaux, responsables de la distribution du second pilier FEADER. La FDSEA 27 n'exclut pas, dans un communiqué, pouvoir mener d'autres opérations dans les prochaines semaines.
Reportage de Ludivine Aurelle, Bruno Belamri et Alban Vian. Avec comme interlocuteurs :
- Samuel Feugere, Céréalier dans le Neubourg
- Thierry Demaegdt, Éleveur