Jean-Yves Collet, Forcalquiéren de fraîche date, signe un film en forme de promenade aux accents de garrigue : Senteurs et Saveurs au pays de Forcalquier. Comment vous vient la passion d'un territoire... et autres questions auxquelles le réalisateur a bien voulu répondre.
Entretien
Pernette Zumthor-Masson : Quel a été votre déclic pour axer votre travail sur cet univers des senteurs ?Jean-Yves Collet : J'habite Forcalquier depuis deux ans et comme je suis consommateur bio et amateur d'huiles essentielles depuis longtemps, j'ai été rapidement en contact avec des personnes remarquables dans le domaine local des arômes. Le pays de Forcalquier jouit d'une réputation d'excellence en la matière, autant pour ce qui concerne les cultures de plantes aromatiques que pour les moyens permettant leur transformation - en alcools avec, notamment, les Distilleries et Domaines de Provence - ou en huiles essentielles, avec les laboratoires Florame.
PZ-M : Dans le film, vous nous faites rencontrer des personnages très attachants qui portent en eux la douceur de ce pays. Jeannot Augier, pour commencer, bouilleur de cru de père en fils, dont les distillations sont récompensées presque chaque année. Mais aussi François Tessari, jardinier du Musée des Senteurs, dont on perçoit toute la dimension poétique et « drôlatique » lorsqu’on le suit dans les dédales de son jardin des odeurs. Pouvez-vous nous en dire un peu plus sur ces deux personnes, votre rencontre, ce qui vous a donné envie de les suivre ?
JYC : J'ai rencontré Jeannot Augier, bouilleur de cru, il y a plus de 5 ans lors du tournage d'un documentaire sur l'anthropologie de l'alcool pour France 5 (c'est d'ailleurs au cours de ce tournage que j'ai eu un coup de coeur pour Forcalquier). Jeannot est surprenant, il a un air à ne pas y toucher, mais derrière cette modestie, c'est un puits de sciences en matière de distillation alcoolique et aromatique. Son grand-père, concepteur de l'alambic extraordinaire qu'il utilise, était ingénieur des Arts et Métiers. Il a su transmettre à Jeannot une connaissance scientifique doublée d'une connaissance empirique des subtilités de la distillation.
Quant à François Tessari, le jardinier concepteur du Musée de Salagon à Mane, je l'ai découvert à l'occasion de ce film. Il m'a d'abord paru discret, puis on a fait connaissance et c'est aujourd'hui un ami. L'homme qui se documente et lit sans cesse, possède une connaissance encyclopédique sur les plantes, les jardins, leur architecture, leur entretien (en bio de préférence). Il a conservé un rare enthousiasme pour son travail et les plantes qu'il chouchoutte avec art, et nous fait une description épique de son jardin des senteurs... un vrai moment de bonheur.
PZ-M : Le pays que vous nous faites découvrir, entre Forcalquier et Mane, se livre comme un véritable pays de Cocagne. Dans l’une de vos séquences, tournée à l’Université européenne des senteurs et des saveurs, on y voit un bon nombre d’étudiants occupés à créer des parfums. Qui sont ces gens ? A-t-on affaire à des professionnels en reconversion ? ou bien des amateurs en quête de nouveauté ? Comment fonctionne cette Université ?
JYC : L'Université des Senteurs et des Saveurs de Forcalquier, installée dans l'ancien couvent des Cordeliers, est une institution locale et internationale. Son directeur, Olivier Bagarri, est un personnage aussi accessible que compétent. L'univers des parfums et des arômes le passionne et il aime partager son savoir, soit lors de sessions de formations professionnalisantes, soit lors de cours destinés à des personnes comme vous et moi, qui veulent simplement tester une immersion dans le monde des senteurs. Dans le film, on voit une quarantaine de chefs d'entreprise de la région PACA issus d'un séminaire de type "business-coaching" qui participent à une demi-journée de "leçons de choses" en matière de parfumerie. Un moment de détente incomparable pendant lequel Olivier Bagarri les initie à l'univers des odeurs et leur montre même comment se fabriquer un parfum personnalisé.
PZ-M : Pensez-vous que le Pays de Forcalquier soit une terre à part dans notre région ?
JYC : Le Pays de Forcalquier est une région qui attire de nombreuses personnes en quête d'expériences novatrices en matière de retour au terroir. La communauté de Longo Maï en est un exemple très original. Nombre d'entre eux s'adonnent aux plantes aromatiques car les conditions géographiques et climatiques sont favorables à ce genre de cultures. Comme il s'agit d'un secteur d'avenir, en relation avec l'appel à la naturalité exprimée par nombre de nos concitoyens, ils ne font pas d'erreur de choix en matière économique. La plupart de ces personnes cultive une démarche de respect de l'environnement que je trouve vraiment rassurante. Il faut dire que les habitants du pays de Forcalquier profitent des plantes aromatiques naturellement présentes dans les collines environnantes depuis des siècles. C'est une région douce à vivre.
Extraits savoureux
Senteurs et Saveurs au pays de Forcalquier
Au cœur des Alpes-de-Haute-Provence, le pays de Forcalquier est réputé depuis des siècles pour un savoir-faire incomparable : l’exploitation des plantes aromatiques que la nature et l’agriculture locales mettent à sa disposition. De Jeannot Augier, bouilleur de cru à l’alambic centenaire, au royaume des parfums de l’Université Européenne des Senteurs et des Saveurs, en passant par le chef étoilé Jany Gleize, l’Institut des Huiles Essentielles, le jardin des senteurs de Salagon ou encore la guide de pays Nicole Massel, le film nous entraîne dans une balade aromatique haute en couleurs, en senteurs et en saveurs.Chroniques Méditerranéennes - Le Doc
Diffusion le 27 mars à 12h55
"Senteurs et Saveurs au pays de Forcalquier"
Une coproduction : 13 Productions / France Télévisions
Réalisé par Jean-Yves Collet
