Tous les modèles météo sont unanimes: la planète se réchauffe. Dans les Alpes, cette hausse des températures bouscule l'activité économique des stations, surtout en moyenne montagne. Quel avenir pour les petites stations?
Comment savoir si l'enneigement a changé ?
A Météo France, une des missions du Centre d'Étude de la Neige consiste à étudier l'évolution de l'enneigement en fonction du climat.En Isère, des mesures sont effectués sur deux sites: au Col de Porte (1325 mètres d'altitude, Chartreuse) et au Col du Lac Blanc (2800 mètres d'altitude, massif des Grandes Rousses).
Au Col de Porte, les mesures ont commencé en 1960 et apportent un éclairage édifiant: en février, le mois le plus enneigé de l'hiver, l'enneigement baisse de 16 cm tous les dix ans depuis un demi-siècle.
Cette baisse est liée à la hausse des températures hivernales. Ces dernières ont déjà gagné 2 degrés en 50 ans et cette hausse pourrait doubler d'ici la fin du siècle.
Quelles conséquences sur l'enneigement ?
La tendance va vers un enneigement décalé de 15 jours à un mois en dessous de 1500 mètres d'altitude. La neige tombe moins abondamment et reste moins longtemps.
Selon certaines estimations, 10% des stations de montagne souffrent déjà d'un manque d'enneigement. Pour certaines, des questions de rentabilité commencent déjà à se poser, d'autres s'interrogent pour l'avenir.
La reconversion en question
Ce problème de neige est souvent accompagné de difficultés économiques. Moins de neige, moins de clients et pourtant il faut renouveler les remontées mécaniques vétustes.
A Drouzin-le-Mont en Haute-Savoie par exemple, le maire aimerait arrêter une partie des remontées mécaniques et se tourner vers une diversification des activités. Le conseil général le soutient, mais il se heurte à une forte opposition des commerçants et des propriétaires de la station.
Certaines stations de ski alpin voire de ski nordique voient leur salut du côté des enneigeurs. Le ski reste leur moteur. Mais la réflexion sur la multiplication des activités avance.
Presque toutes les stations proposent désormais des sorties en raquettes, en chiens de traîneau, des visites culturelles, etc. Ces activités sont d'autant plus appréciées que, selon certaines études, dans une famille de quatre, seule une personne skie tous les jours.
A Saint-Pierre de Chartreuse, la reconversion est passé par le trail, une activité en plein boum qui se pratique toute l'année. Mais le sociologue Philippe Bourdeau pousse la réflexion plus loin. Le changement climatique ne pourrait-il pas être l'occasion de remettre en question non seulement une économie basée sur le "tout-ski" et le "tout-neige" mais aussi le "tout-tourisme"?
"L’univers du tourisme hivernal est parcouru par de nombreuses incertitudes liées au changement climatique, mais aussi à des évolutions et des ruptures structurelles qui remettent en question le modèle de développement sur lequel il repose. Ce contexte de mutation permet d’interroger les limites du modèle industriel qui a présidé à l’aménagement des Alpes pour la pratique du ski et d’examiner des figures d’avenir alternatives au 'tout ski' et même au 'tout tourisme'."
Philippe Bourdeau, De l’après-ski à l’après-tourisme, une figure de transition pour les Alpes ? Réflexions à partir du cas français, Revue de Géographie Alpine.
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