Une "légende" de l'alpinisme francais, Maurice Herzog, disparaît à l'âge de 93 ans. Ce lyonnais d'origine fût le premier à gravir l'Annapurna en 1950. Il fût aussi député du Rhône et de Haute-Savoie.
Alpiniste, homme politique et industriel, Maurice Herzog, qui vient de décéder à l'âge de 93 ans, est devenu, avec sa victoire sur l'Annapurna en 1950, un "héros" français mais, pour avoir tiré toute la gloire de cette première ascension à 8.000 m, sa belle image n'a cessé depuis des années de se ternir.
Il a payé sa victoire par une amputation des doigts et des orteils. "Vous voyez ce que j'ai en moins mais, moi, je sens ce que j'ai en plus. Et c'est incomparablement plus grand que ce que j'ai en moins", disait-il.
Dans la France de l'après-guerre, qui sortait de grandes souffrances, "notre exploit devait être celui de la nation, nous grimpions avec au coeur la pensée du pays et de toute la jeunesse que nous représentions", disait-il. Dix ans plus tard, tous les sommets de plus de 8.000 mètres seraient gravis. A son retour en France, avec son physique d'acteur de cinéma, "il était auréolé d'une gloire dont il est difficile de se faire une idée. Il était notre Lindbergh, notre Redford, un des rares Français à être connus partout dans le monde", a écrit l'académicien Jean d'Ormesson en 1997.
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Maurice Herzog a fait, en le romançant un peu, un récit revisité de la grande aventure de sa vie :Le best-seller absolu de la littérature de montagne: "Annapurna, premier 8000" (éd Arthaud, 1951), a été vendu à une douzaine de millions d'exemplaires et traduit en 40 langues.
Une "légende" révisée
Il a écrit d'autres ouvrages sur l'Annapurna. Mais la statue du héros s'est lézardée. La mémoire collective tend à faire d'Herzog le grand vainqueur de l'Annapurna, reléguant au second rang Lachenal, ainsi que les grands alpinistes qui les accompagnaient, Lionel Terray et Gaston Rébuffat. La version des faits, trop à la gloire du seul Herzog, a commencé à être révisée.En 1996, date de publication du texte intégral des mémoires de Lachenal, "Carnets du vertige". Ceux-ci étaient parus en 1956, peu après la mort du guide, mais Maurice Herzog et ses amis avaient réussi à supprimer des passages sur l'Annapurna ou à "réécrire" le texte dans un sens moins favorable à Lachenal. Louis Lachenal expliquait avoir "agi en guide" et poursuivi l'ascension au-delà de ses limites parce qu'il était persuadé que Maurice Herzog, décidé à atteindre le sommet, ne reviendrait pas vivant s'il partait seul. Lachenal, mais aussi Rébuffat, étaient avant tout des professionnels, passionnés par leur métier, et qui supportaient mal l'aspect cocardier de l'expédition. Ceux-ci pensaient "montagne" quand Herzog pensait "France".
En 2012, Félicité Herzog - la fille que Maurice Herzog eut avec Marie-Pierre de Cossé-Brissac, issue d'une grande famille de la noblesse française - n'a pas arrangé l'image de son père qu'elle a traité, dans un "roman" qui n'en est pas vraiment un, ironiquement intitulé "Un héros", de menteur et d'"hémiplégique de la pensée".
Né le 15 janvier 1919 à Lyon (Rhône), Maurice Herzog est diplômé de l'Ecole des Hautes études commerciales (HEC). Son temps libre, il le passe à escalader les grandes parois des Alpes. Après l'Annapurna, ce gaulliste de la première heure devient directeur de la société Kléber-Colombes. En 1958, le pouvoir gaulliste cherche des hommes capables de redonner un idéal à la jeunesse. Maurice Herzog devient cette année-là Haut-commissaire à la Jeunesse et aux sports et, en 1963, secrétaire d'Etat à la Jeunesse et aux sports. Député de Haute-Savoie, il sera maire de Chamonix de 1968 à 1977. M. Herzog a dirigé jusqu'à sa retraite plusieurs entreprises, dont la Société du tunnel sous le Mont-Blanc (1981-84). Père de quatre enfants, il vivait entre Neuilly et Chamonix. Depuis 1995, il était membre honoraire du Comité international olympique (CIO).
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Décès de Herzog : Buffet fait part de sa "grande tristesse"
L'ancienne ministre des Sports communiste Marie-George Buffet a rendu hommage vendredi à Maurice Herzog, qui avait lui aussi détenu ce portefeuille sous le général de Gaulle, soulignant avoir appris son décès "avec une grande tristesse".
"Quelques jours après mon arrivée au ministère de la jeunesse et des Sports, en 1997", se remémore-t-elle, "M. Herzog était venu me raconter l'histoire de ce ministère.Ce gaulliste était très soucieux d'expliquer comment il avait voulu éradiquer tout ce que le régime de Vichy avait voulu imprimer à ce ministère". "Il fut un ministre marquant", poursuit la responsable communiste. "Certains ont pu s'étonner de notre complicité. Mais elle était fondée, pour moi, sur un profond respect, et, pour lui, je le crois, sur son désir de transmettre un héritage"