À 23 ans, Anaïs Tortel est déjà chef d'entreprise. A Clermont-Ferrand, elle fabrique des bijoux fantaisie à partir de bonbons, dans le cadre d'une "résidence" financée par la région et l'Europe parallèlement à ses études de commerce.
Si Anaïs Tortel a réussi, c'est en partie grâce à l'Agence régionale de développement des territoires d'Auvergne (ARDTA), qui l'aide en lui apportant un revenu mensuel fixe et une enveloppe de 3.000 euros pour couvrir ses frais de fonctionnement. Un financement tiré du fonds Feder de l'Union européenne.
En 2006, l'ARDTA a mis en place des "résidences" (comme pour les artistes) pour accompagner la création ou la reprise d'entreprises. En plus d'une aide financière, elle met à disposition des conseillers, pour un accompagnement juridique, commercial ou technique qui dure en général trois ans. "Depuis huit ans, ce dispositif a fait ses preuves: nous avons porté plus de 700 projets, dont deux tiers sont toujours installés en Auvergne", se félicite Jean-Michel Guerre, président de l'agence. Ces résidences, ouvertes à quiconque veut installer son entreprise dans la région, ont ainsi permis, de 2006 à 2011, de gagner environ un millier d'habitants, dont un tiers d'enfants. Venus le plus souvent de l'agglomération parisienne ou du sud de la France, mais aussi de l'étranger, pour trouver, entre autres, une meilleure qualité de vie.
Les retombées sont aussi économiques: pour trois millions d'euros investis par la région de 2006 à 2011, les installations d'entreprises ont rapporté plus de 47 millions, selon M. Guerre. Chaque année, l'ARDTA reçoit et étudie plusieurs centaines de dossiers. Elle en retient une centaine pour des résidences dites longues, des projets qui nécessitent plusieurs mois pour se concrétiser.
Ça encourage et ça réconforte
"Nos priorités, ce sont la jeunesse et le numérique. L'Auvergne a fait le choix, depuis plusieurs années, de mettre l'accent sur le numérique. Nous sommes la première région de France en termes de très haut débit et nous comptons bien le rester. De plus, nous sommes la seule région qui a mis la priorité sur la jeunesse", fait valoir le président de l'ARDTA. Le dispositif "Auverboost" notamment aide les moins de 30 ans à créer ou reprendre une entreprise.
"Ça encourage et ça réconforte, confie Anaïs Tortel. Au moins, vous ne vous faites pas de souci pour savoir comment payer votre loyer. Étudiant ou jeune entrepreneur, on ne peut pas tous investir des milliers d'euros d'économies, si tant est qu'on les ait." En 2009, le capital de sa société fondée à Avignon, d'où elle vient, n'était que de 60 euros. Arrivée à Clermont en 2010, elle dispose de l'aide de l'ARDTA depuis mars.
Sébastien Goude, 33 ans, a lui aussi été en résidence. Après des années à Nantes et en Bourgogne, il est venu s'installer en Auvergne. Il y a six mois, il a monté son entreprise d'informatique, spécialisée dans la 3D et la réalité augmentée. Actuellement seul salarié, il emploie deux jeunes ingénieurs en sous-traitance, qu'il espère embaucher à la fin de l'année. "Maintenant que je suis installé ici, j'ai l'intention de rester. L'Auvergne m'a aidé financièrement (en payant son loyer, ndlr), c'est normal que je reste basé ici", dit-il.
Même fidélité chez Anaïs Tortel : "Dans mes bijoux, à part les bonbons, tout est fabriqué en Auvergne. Ils sont montés par des employés d'un CAT (Centre d'Aide par le Travail), basé à Thiers. C'est important pour moi d'être proche des gens avec qui je travaille, de pouvoir les rencontrer". La jeune créatrice a fait le calcul, fabriquer en Auvergne ne lui coûte pas plus cher que de produire en Chine. "Entre les droits de douane et le transport que je payerais, je m'y retrouve. Et au moins, le 'made in France' est garant d'une certaine qualité." Ses bagues et boucles d'oreille en bonbons colorés ont d'ailleurs séduit une célèbre marque de luxe, avec laquelle elle est en pourparlers pour les vendre dans plusieurs boutiques en France.