Un an après le drame, la maison est encore sous scellés à Saint-Paul-Trois-Châteaux (Drôme). Abdelkarim El Kadaoui, soupçonné d'avoir sauvagement tué son épouse de 29 ans et leurs trois enfants, est toujours en fuite malgré un mandat d'arrêt international.
Sur une colline boisée, "chemin de la Justice", c'est là que le 24 juin 2013, chez sa mère où elle s'était réfugiée, Fouzia El Kadaoui était découverte dans une mare de sang. Criblée de 47 coups de couteau, ses trois enfants ayant disparu. Ils étaient retrouvés sans vie, le lendemain, dans la voiture de leur père stationnée sur la commune: Ayoub, 8 ans, étranglé, et ses deux soeurs, Yasmine et Homaima, âgées de 2 et 7 ans, "axphyxiées de cause ignorée", selon le parquet de Valence.
La voix entrecoupée de sanglots, leur grand-mère raconte comment en rentrant chez elle vers 17h30, elle avait "vu du sang partout, sur la terrasse, dans la cuisine", croyant au début qu'un des enfants s'était blessé. "Il y avait un silence
terrible et là, dans le salon, j'ai découvert ma fille dans une mare de sang, seule", souffle cette quinquagénaire qui veut garder l'anonymat. L'autopsie dénombrera 47 coups de couteau. Une arme qui n'a jamais été retrouvée.
Nul doute pour elle, "les enfants ont tenté de défendre leur mère". En témoignent les graves blessures à la main et au bras relevées sur les deux aînés lorsqu'ils ont été retrouvés le lendemain par un membre de la famille. "Mais on peut penser qu'ils ont été tués le même jour que leur mère", observe le parquet, qui a ouvert le 25 juin 2013 une information judiciaire pour "homicide volontaire sur conjoint et sur mineurs de 15 ans".
En fuite au Maroc?
Dès le 28 juin, un mandat d'arrêt européen était lancé contre Abdelkarim El Kadaoui, un ancien maçon de 43 ans, en arrêt de travail, connu de la justice et déjà condamné notamment pour trafic de stupéfiants. En vain. Certaines rumeurs le disent en fuite au Maroc. Sans certitude."Pour le moment ça n'a rien donné, mais s'il revient en Europe, le mandat d'arrêt s'appliquera", note le procureur de la République à Valence, Antoine Paganelli. "S'il était situé avec certitude au Maroc, on demanderait aux autorités marocaines de l'extrader, très vraisemblablement elles nous répondraient que la loi marocaine ne le permet pas, on leur proposerait de le juger chez eux, mais rien ne dit qu'il ne reviendra pas en France", souligne le magistrat.
Un an après le drame, la grand-mère des enfants se dit "très en colère" et dénonce pêle-mêle la "lenteur de la justice" et le sentiment d'avoir été abandonnée. "Je ne peux pas faire mon deuil, tant que ce monstre est en liberté. J'ai tout
le temps peur de lui. Avec mes autres filles, on a toujours une boule au ventre", témoigne cette femme qui "ne voit plus personne" et a été contrainte de déménager hors de la commune. "J'ai peur de revenir ici où j'ai trop de souvenirs", dit-elle. Elle évoque le "harcèlement" et les "violences" subies par sa fille, mariée depuis près de 10 ans à cet homme qu'elle voulait quitter et qui avait déjà trois enfants d'un premier mariage. Ainsi que les deux plaintes pour "violences conjugales" déposées à la gendarmerie. Sans suite.
"Cette information judiciaire n'a pas vocation à durer des années, ce qui ne veut pas dire que le dossier est enterré", souligne le procureur. "Il n'y a pas de témoins, pas de mise en examen. On est confronté à un travail technique sur les corps, l'audition de proches de la famille, après c'est terminé", dit-il, ajoutant: "Rien n'empêche que l'intéressé soit jugé en son absence".