"Beaucoup de gens imaginent que l'on arrache les plumes des oiseaux", Cécile Couédou, plumassière

A Saint-Jean-le-Vieux, dans l'Ain, Cécile Couédou s’est prise de passion pour la plumasserie. Un artisanat d'art qui utilise les plumes d’oiseaux dans la confection d’objets ou d’ornements. Ce métier d'art minutieux et spectaculaire est devenu une rareté. Entre règlementation stricte et passion, la plumassière a levé le voile sur son métier pour l'équipe de VOST.

L'Éperonnier chinquis, le Lophophore resplendissant, le Hokki bleu... Cécile Couédou est incollable sur les faisans. Mais ne vous y trompez pas ! Elle n'est pas ornithologue. Installée à Saint-Jean-le-Vieux, elle est plumassière de son état. Un métier d'art en voie d'extinction. Il est encore présent dans les métiers de la haute-couture et du cabaret. 

Son truc, c'est la plume !

Elle aurait pu d'ailleurs se tourner vers la création pour les spectacles de cabaret. L'un des derniers débouchés de cet artisanat d'art. Paradoxalement, les structures ornées de plumes utilisées sur scène pèsent parfois jusqu'à une vingtaine de kilos. Mais Cécile Couédou a choisi la légèreté et la fabrication de vêtements, d'accessoires de mode et de décoration. "Nous ne sommes plus qu'un quinzaine d'indépendants dans toute la France aujourd'hui à travailler la plume sous toutes ses formes", explique-t-elle. Cécile Couédou est donc bel et bien un oiseau rare.

A la suite d'une reconversion professionnelle, elle a suivi une formation dirigée par Nelly Saunier, maître d’art en plumasserie. "Dans ma famille, on disait qu'il n'y avait pas de débouchés dans les Beaux-Arts. Mais j'avais toujours en tête de pouvoir travailler avec mes mains. Je n'étais pas forcément attirée par les métiers de la haute-couture mais j'ai toujours été très manuelle", résume-t-elle. Elle a alors pris conscience qu'elle pouvait utiliser les plumes pour créer des objets de rêve. Ce métier, c'était "une évidence".

Ornithologue dans l'âme

Une révélation qui est arrivée tardivement. Tout a commencé par une passion pour les oiseaux. Lors de ses nombreux voyages, Cécile prenait énormément de photos de volatiles. "J'aurais pu être ornithologue. C'était une passion de les observer aussi dans leur milieu naturel".  Cécile est une curieuse et une esthète. Son petit atelier installé à domicile résume d'ailleurs à merveille ses penchants pour les belles choses. Avec ses  papillons, des animaux sous globe, l'atelier ressemble à un cabinet de curiosités. Mais la véritable rareté du lieu, ce sont ces sachets de plumes colorées qui se cachent dans les boîtes et les tiroirs. Ces plumes  proviennent essentiellement de ses propres oiseaux. L'un de ses oiseaux préférés ne manque pas de panache. C'est un lophophore resplendissant. Emblème du Népal, le plumage de cet oiseau huppé est orné de reflets métalliques verts et bleus.

Beaucoup de gens imaginent qu'on arrache les plumes sur les oiseaux. Je l'entends régulièrement, c'est décourageant. Pas besoin de martyriser ces animaux, les plumes tombent naturellement chaque année.

Cécile Couédou

Plumassière

Cette plumassières a la particularité de posséder aussi plusieurs dizaines d’oiseaux de différentes espèces, principalement des faisans et des perruches. Des volatiles dont elle prend grand soin dans ses volières arc-en-ciel. Les plumes qu'elle utilise dans son activité proviennent de leur mue, entre mai et octobre. Cécile les récupère quotidiennement durant cette période. La collecte peut s'étaler sur plusieurs années "pour pouvoir avoir un maximum de possibilités de confection".

Travail préparatoire

Ces plumes, il faut aussi les nettoyer. "On peut réaliser jusqu'à 6 bains d'un antibactérien pour que les plumes soient totalement propres". Laborieux mais incontournable. Sans compter le triage : "je sélectionne les plumes par espèce et par type de plumes. Pour certaines espèces, comme les perruches, je trie aussi par couleurs". Ces tâches représentent environ la moitié de l'activité, l'autre moitié étant consacrée à la création et à la réalisation des produits.

Les plumes ne sont pas fragiles, dans la mesure où les oiseaux sont habitués à être en extérieur. Ils sont soumis aux conditions climatiques.

Cécile Couédou

Plumassière

Sont-elles faciles à travailler ? "Il faut savoir qu'un oiseau n'a jamais deux plumes identiques", explique-t-elle. C'est ce qui rend la confection d'un objet très complexe selon la plumassière. Les textures des plumes ne sont pas forcément identiques selon les espèces. Les plus rigides sont plus difficiles à travailler. "L'usage est différent selon les espèces. Par exemple, j'aime beaucoup travailler les plumes de Lophophore sur les tissus et supports vestimentaires". 

Si on ne maltraite pas les oiseaux, il n'en va pas de même pour les plumes. "On peut les couper, les brûler, les chauffer, les teinter, les coudre et les friser", énumère la plumassière. Les techniques sont aussi très variées pour parvenir à ses fins.

Illusion visuelle

Cécile confectionne des objets de décoration, des bijoux mais aussi des vêtements. Elle transforme et orne des souliers. Le métier offre une liberté infinie. La plumassière façonne  les plumes pour mettre en valeur leur texture, souligner leurs couleurs. Elle les détourne pour créer une illusion visuelle.  "Chaque chose que je crée, chaque objet, chaque vêtement, c'est toujours une pièce unique". 

"Créer de la mosaïque de plumes, c'est le plus bluffant. On a l'impression que c'est une autre matière que la plume", assure la plumassière. 

"Collectionneuse de plumes" 

Un plumassier peut-il utiliser tous les types de plumes ? "On ne fait pas n'importe quoi avec n'importe quelle plume, il y a une législation. On ne peut pas utiliser des plumes d'oiseaux sauvages, comme des plumes de chouettes ou de rapaces", explique Cécile Couédou. La législation sur les espèces protégées, dite Convention de Washington ou encore CITES (Convention sur le commerce international des espèces de faune et de flore sauvages menacées d'extinction) est sans appel. Et lorsqu'elle trouve des plumes dans la nature ? "Je vais les ramasser effectivement lorsque j'en trouve mais je vais les garder uniquement comme une collection. Je ne vais surtout pas les utiliser pour les exploiter et les vendre". Cécile Couédou entend respecter la règlementation à la lettre... ou plutôt à la plume.

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