Le conseil de prud'hommes de Bourg-en-Bresse (Ain) a reconnu le harcèlement sexuel d'une ex-collaboratrice du député LREM Stéphane Trompille. Le parlementaire est également condamné pour le licenciement abusif de cette victime et d'un autre collaborateur. Il entend faire appel.
"J'ai pleuré quand j'ai ouvert le courrier du conseil de prud'hommes. C'était un immense soulagement. Je suis encore sous traitements pour me sortir de cette affaire (...) En tout cas, j'espère que ça pourra encourager d'autres personnes harcelées à sortir du silence", explique l'ancienne chargée de com' de Stéphane Trompille. Elle vit aujourd'hui à 600km de Bourg-en-Bresse, avec pour objectif de "se reconstruire".
Embauchée en juin 2017, cette femme de 32 ans aura supporté "des propos sexistes et salaces" durant presque 7 mois, avant un arrêt maladie inhérent à son mal-être au travail. Le député de l'Ain l'avait ensuite licenciée, -durant cet arrêt maladie-, pour "insuffisance professionnelle".
Après l'audience du 13 février dernier, le conseil de prud'hommes a non seulement annulé ce licenciement, jugé abusif, mais il a aussi reconnu la collaboratrice victime "de faits de harcèlement sexuel". Stéphane Trompille doit lui verser 20.900 euros en guise de dédommagement global. La peine incluant le harcèlement, le défaut de visite médicale, le licenciement abusif et la prise en charge des frais d'avocat.
"Tu bosses ou tu te touches là ?"
"J'ai pas fait ça pour l'argent mais pour être reconnue comme victime d'un homme qui s'est montré souvent odieux avec moi, vous n'imaginez pas à quel point", conclut l'ex-collaboratrice. On sait depuis l'audience que le député envoyait, entre autres choses, des messages du style: "Tu bosses ou tu te touches là ?"Un autre ancien salarié de Stéphane Trompille se félicite de la décision du tribunal. Poussé à témoigner contre sa collègue, il avait refusé et écopé d'un licenciement pour "cause réelle et sérieuse". Les prud'hommes ont également fait sauter ce motif. Il touchera l'équivalent d'un mois de salaire et 500 euros pour payer son avocat.
"J'avais suivi la campagne de M. Trompille, je l'ai vraiment vu changer après son élection", détaille l'ancien collaborateur qui décrit un homme de plus en plus hautain.
Le député "serein"
Stéphane Trompille a fait savoir à nos confrères du Progrès, qu'il entendait faire appel. "J'ai pleinement confiance dans la décision qui sera rendue par la cour d'appel de Lyon", a-t-il déclaré. Il a également déposé 2 plaintes au pénal pour se dresser contre ses anciens collaborateurs, contestant notamment la véracité d'un témoignage contenu dans le dossier."Il est extrêmement serein quant à la suite qui sera donnée par la justice", assure son avocat Me Éric Dez.
Remous à l'Assemblée
A l'Assemblée nationale, le patron des députés LREM, Gilles Le Gendre, a annoncé la "mise en retrait" de Stéphane Trompille du groupe majoritaire, le temps de la procédure d'appel."Si cette condamnation devenait définitive, nous en tirerions toutes les conséquences", a indiqué le chef de file des "marcheurs" lors d'un point presse, ce mardi 26 mai.
Dans un communiqué, le collectif "Chair collaboratrice" ainsi que 39 députés de gauche et du centre jugent qu'"il est donc temps que l'institution (Assemblée) réagisse". "Si la cellule de veille mise en place en janvier dernier est une avancée incontestable, en ne proposant qu'un accompagnement des victimes elle ne suffit pas à prendre en charge de manière transversale la question des violences sexistes et sexuelles à l'Assemblée nationale", estiment le collectif de collaboratrices et ces députés, parmi lesquels Valérie Rabault (PS), Clémentine Autain (LFI) et Cédric Villani (EDS).
"Nous attendons de l'institution qu'elle cesse, par son silence, de contribuer à ce climat délétère, qu'elle puisse prendre des sanctions disciplinaires, et qu'elle apporte une protection plus importante aux collaboratrices et collaborateurs qui prennent la parole", ajoutent-ils.