Des femmes de la Résistance sortent enfin de l'ombre à Bourg-en-Bresse

Ce jeudi matin, 20 avril, Bourg-en-Bresse a rebaptisé deux de ses rues. Le prénom Louise est venu s’ajouter à celui de Paul Pioda en hommage à la sœur du résistant. Hélène a rejoint son époux Victor Basch comme victimes reconnues du nazisme.

Société
De la vie quotidienne aux grands enjeux, découvrez les sujets qui font la société locale, comme la justice, l’éducation, la santé et la famille.
France Télévisions utilise votre adresse e-mail afin de vous envoyer la newsletter "Société". Vous pouvez vous désinscrire à tout moment via le lien en bas de cette newsletter. Notre politique de confidentialité

La rue ne change pas de nom, mais de prénom. Hélène vient s’ajouter à Paul. Les Pioda, frère et sœur, sont désormais unis dans l’Histoire. La résistante a rejoint le résistant. Ce jeudi matin, la rue Paul Pioda à Bourg-en-Bresse, est devenue la rue Paul et Louise Pioda. La ville rend ainsi hommage à une Burgienne qui a lutté activement au sein des mouvements de la Résistance dans l'Ain.

Louise Pioda, une résistante burgienne 

Louise Pioda s'était très vite opposée avec son frère au régime de Vichy. Des actions de propagande, hébergement des résistants, fabrication de faux papier, cache de matériel et d'armes, participations à des opérations de sabotage... Autant de faits qui lui ont valu la médaille de la Résistance et Légion d'honneur après-guerre, mais peu de place dans les livres d'histoire. Alors l'hommage rendu aujourd'hui par la ville de Bourg-en-Bresse ne laisse pas sa nièce Colette indifférente. À presque 90 ans, la vieille dame se souvient d'une femme de caractère.

"Elle a joué un rôle important dans la Résistance, elle a fait distribuer des tracts, elle recevait les jeunes résistants dans l'arrière-boutique... Elle a beaucoup participé. C'était une femme de caractère, ma tante" se souvient l'octogénaire.

Louise Pioba est décédée en 1995, à l'âge de 89 ans. 

Victor et Hélène Basch, assassinés dans l'Ain

La rue Victor Basch a également été renommée rue Victor et Hélène Basch. Cette dernière, exécutée avec son mari pendant la guerre, a enfin reçu les honneurs. Un juste retour des choses pour les femmes de l’ombre pourtant nombreuses. 

Avant d’être victime du nazisme, le couple Basch participa à la création de la Ligue des Droits de l’Homme. D'où l’émotion de l’actuel président Patrick Baudouin : "c'est un moment de très grande émotion pour moi. On est dans une période difficile pour les libertés, Victor Basch a donné sa vie pour les libertés, j'en suis aujourd'hui l'héritier. (...) Devant cette plaque qui honore une femme et un homme qui ont passé 60 ans de vie ensemble, qui ont disparu ensemble dans des conditions tragiques, ça me donne du baume au cœur pour mener les combats d'aujourd'hui et de demain". 

La plaque mentionne aussi la manière dont le couple âgé de 80 ans a tragiquement perdu la vie durant la guerre : "assassinés par la milice le 10 janvier 1944 à Neyron". Les époux Basch, qui avaient trouvé refuge à Lyon en juillet 1940, avaient été arrêtés à leur domicile de Caluire-et-Cuire. Le couple a été inhumé dans la Nécropole nationale de la Doua, à Villeurbanne. Dans l'Ain, un mémorial a été érigé à Neyron, à l’endroit même où ils ont été assassinés.

Les femmes de l'armée des ombres

Féminiser les noms sur les plaques de rue pour rendre aux femmes résistantes une juste place, Florence Gherardi de l'Office des Combattants et Victimes de Guerre se félicite de cette initiative. "Souvent les femmes agissaient avec leur mari ou leur frère. Malgré l'arrestation de ces derniers, elles ont souvent continué le combat", ajoute-t-elle. C'est notamment le cas de Louise Pioba qui a continué son combat dans la Résistance après la mort de son frère en déportation, en 1944. 

"Peu de femmes ont été reconnues alors qu'elles ont joué un rôle fondamental. Seules six femmes ont obtenu la croix de la Libération sur 1036 décorations données. Selon les mots de l'historien Laurent Douzou, elles étaient résistantes. "Au seuil de la porte" car très souvent c'étaient ces femmes qui accueillaient la police", explique Florence Gherardi. "Elles avaient un rôle fondamental dans la solidarité, pour la confection des faux papiers, pour aider des personnes à se cacher". 

"Compléter la mémoire collective"

La ville comptait déjà une rue "Lucie et Raymond Aubrac". En collaboration avec la Ligue des Droits de l'Homme, la ville a choisi de mettre à l'honneur deux autres femmes pour saluer leur courage et leur engagement dans le combat pour la liberté : Louise Pioba et Hélène Basch. 

Alexa Cortinovis ne cache pas sa fierté. Pour la conseillère municipale déléguée aux Droits humains, renommer ces rues est un acte en faveur de la lutte pour l'égalité. "Les femmes de la Résistance ont été honorées très tard. Elles ont un peu été les oubliées de la Libération. Elles étaient pourtant l'égale de l'homme dans leur engagement".

Pour le maire PS de Bourg-en-Bresse, Jean-François Debat, il s'agit aussi aujourd'hui de "compléter" la mémoire collective des Bressans. Plus qu'un geste symbolique ou qu'un geste de "féminisation", c'est surtout "un geste de justice" pour ces grandes oubliées, selon l'élu. "Au cours des décennies passées, trop souvent, l'action des femmes a été moins valorisée que l'action des hommes, même lorsqu'elles avaient mené les mêmes combats. Elles méritent de la même manière de figurer dans notre mémoire", explique Jean-François Debat. La mémoire de ces femmes entre aujourd'hui effectivement dans le quotidien des Bressans. 

Tous les jours, recevez l’actualité de votre région par newsletter.
Tous les jours, recevez l’actualité de votre région par newsletter.
choisir une région
France Télévisions utilise votre adresse e-mail pour vous envoyer la newsletter de votre région. Vous pouvez vous désabonner à tout moment via le lien en bas de ces newsletters. Notre politique de confidentialité