Repris au bord de la faillite il y a quatre ans à la barre du tribunal de Commerce par l'industriel Alain de Krassny, le groupe chimique Kem One s'apprête à sortir de la procédure de redressement judiciaire après avoir remboursé ses dettes.
"Nous avons remboursé nos derniers créanciers le 22 janvier à hauteur de 19 millions d'euros et n'attendons plus que la décision du tribunal", indique la direction de Kem One.
Cette normalisation intervient beaucoup plus rapidement que prévu puisque l'échéancier retenu par le tribunal laissait à Kem One jusqu'à 2023 pour payer ses dettes. Mais dans l'intervalle, les fortunes de Kem One ont changé du tout au tout, passant d'une perte proche de 100 millions d'euros en 2013 à un bénéfice net de 50 millions d'euros en 2017.
Son excédent brut d'exploitation (Ebitda) a dépassé l'an dernier les 100 millions pour un chiffre d'affaires de 902 millions d'euros.
La bonne conjoncture a aidé, mais pour M. de Krassny le groupe tire surtout le bénéfice des importants investissements de remise à niveau de l'outil industriel consentis au cours de ces quatre ans.
Reportage
Kem One a ainsi dépensé 314 millions d'euros, dont la moitié pour remplacer ses installations d'électrolyse à Lavera (Bouches-du-Rhône), qui, "mécaniquement" bonifie les résultats de 40 millions par an.
Des investissements d'un montant similaire sont prévus pour les quatre prochaines années. La moitié pour construire à Fos-sur-Mer (Bouches-du-Rhône) un terminal et lieu de stockage d'éthylène, une grande matière première du PVC dont Kem One est le deuxième producteur européen. Le groupe va aussi convertir son unité d'électrolyse de Fos.
L'autre moitié de l'enveloppe servira à améliorer l'efficacité de l'ensemble des sites du groupe. "Fiabilité, fiabilité, fiabilité", a martelé M. de Krassny, qui y voit la clef d'une politique commerciale efficace.
A l'issue de ce plan, Kem One espère figurer parmi les meilleurs de la classe européenne. Pour y arriver, le groupe a entrepris de réinternaliser ses activités de maintenance.
Il a ainsi retrouvé ses effectifs d'avant la crise (1.351 salariés, contre 1.331 au moment de la reprise). Pour la première fois, le groupe distribuera cette année à ses employés 10% de son résultat net, soit 4.000 euros bruts pour chaque salarié quelle que soit sa position hiérarchique.
Objectifs ambitieux
M. de Krassny et son partenaire lors de la reprise, le fonds Open Gate, ont par ailleurs achevé de dénouer leurs liens: M. de Krassny est désormais propriétaire de l'intégralité des activités "amont" (production) et Open Gate de l'intégralité des activités "aval" (transformation).
Le groupe espère rembourser cette année l'Etat de son aide (90 millions d'euros) qui porte un intérêt supérieur à ceux pratiqués actuellement sur les marchés.
Pour l'exercice en cours, Kem One se fixe des objectifs "très ambitieux": un Ebitda de 170 millions d'euros et un résultat net de 100 millions. "Ce sera difficile à réaliser mais il faut de l'ambition", a commenté M. Krassny.
Pour autant, toujours pas question pour lui d'entrée en Bourse, qui oblige à une gestion, selon lui, à court terme. C'est d'autant moins nécessaire que des acquisitions ne sont toujours pas à l'ordre du jour. Pour lui, le seul objectif qui vaille est de hisser le groupe à un niveau d'efficacité tel qu'il ne perdra plus d'argent lors des retournements de cycle.
L'homme d'affaires de 75 ans, qui avait prévu de prendre du recul fin 2017, a reporté d'un an ses projets, arguant du fait que ses deux garçons (de 35 et 33 ans) étaient encore un peu jeunes pour lui succéder.