Le 25 avril, la cour d'Appel de Bourges a accordé la liberté conditionnelle à Jean-Claude Romand, faux médecin qui avait tué 5 membres de sa famille en 1993. Autour de la maison du drame, où sont morts femme et enfants de Romand, la colère est vive. Témoignage.
Rappel. Jean-Claude Romand, qui vient d'obtenir sa libération conditionnelle après 26 années derrière les barreaux, avait trompé ses proches pendant plus de 15 ans, avant de tuer son épouse, ses deux enfants et ses propres parents lorsque la vérité menaçait d'éclater. Durant des années, il avait prétendu être médecin-chercheur à l'Organisation mondiale de la santé (OMS) à Genève. En fait, Jean-Claude Romand passait ses journées dans sa voiture, à la cafétéria ou à la bibliothèque. Ses lectures lui permettant d'approfondir ses connaissances médicales. Il faisait vivre son ménage en escroquant parents et amis, prétendant placer leurs économies en Suisse pour les faire fructifier.
Le 9 janvier 1993 au matin, il a tué son épouse Florence, âgée de 37 ans, endormie dans leur maison de Prévessin, près de la frontière suisse. Il a également donné la mort à ses deux enfants âgés de 5 et 7 ans. Il s'est ensuite rendu chez ses parents à Clairvaux-les-Lacs (Jura), à environ 80 km. Après un déjeuner tranquille, il les a tués. Il reviendra enfin dans le Pays de Gex pour mettre le feu à sa maison.
Condamné à perpétuité, Romand devrait désormais sortir de prison avant l'été.
On est anéantis...
Cette libération conditionnelle continue de susciter des réactions et de l'émoi, notamment à Prévessin. Une proche de Florence Romand s'exprime pour la première fois devant une caméra. Cela lui a demandé un gros effort mais Catherine dit faire ça pour Florence et sa famille, elle ne comprend pas que le meurtrier puisse être ainsi libéré. "Cette homme n'est pas un humain d'avoir fait ça et on ne veut pas qu'il se retrouve dans la vie comme il la demande, une vie libre."Reportage Franck Grassaud et Béatrice Tardy
©France 3 RA
Romand a été bouleversé à l'annonce de sa libération... mais bouleversé de quoi ?
"On s'est connues par l'intermédiaire de mon mari qui avait fait ses études avec Florence. Quand les Romand sont arrivés dans le Pays de Gex, on était déjà là depuis un an, donc logiquement on s'est rapprochées. Après il y a eu les enfants...", Catherine plante ainsi le décor d'une amitié qui dure, bien au-delà du drame. Elle se sent proche de Florence, elle a fait sienne la cause de sa famille qui lutte depuis 26 ans contre "un monstre".
C'est pour cela qu'elle parle aujourd'hui. Depuis qu'elle a appris la libération de Romand, elle se nourrit de toutes les réactions entendues à la radio à la télé, elle griffonne un petit carnet. "Quand j'entends l'avocat de Romand, Me Abad, dire que son client a été bouleversé à l'annonce de sa libération... mais bouleversé de quoi ? et comment elle doit être la mère de Florence ? J'ai aussi entendu : il va pouvoir envisager l'avenir, et ses victimes elles vont faire quoi à l'avenir ? elles sont mortes."
Interview en longueur
Catherine était une amie de Florence Romand tuée par son mari. A l'idée de savoir Romand dehors, la colère l'envahit.
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©France 3
Catherine explique aussi comment le mensonge de Romand a pu vivre dans le temps. "Quand on parlait de son travail, on voyait qu'il était mal à l'aise mais on mettait ça sur le compte de l'humilité (il se disait médecin émérite à l'OMS). Et puis, il fuyait les discussions, trouvait toujours une bonne occasion pour aller jouer avec les enfants. Florence se plaignait de ne pas savoir grand chose de la vie professionnelle de son époux, regrettait de ne pas connaître ses collègues, il lui répondait : ils sont trop vieux, ils vont t'ennuyer. En rigolant, on disait à Florence qu'il était espion de l'Est."
Je voudrais qu'il avoue tout ce qu'il n'a pas avoué
Même si Romand est aujourd'hui privé des territoires où son histoire a marqué la population (Rhône-Alpes, Franche-Comté et Île-de-France), Catherine ne redoute pas de le croiser. "Au contraire, je voudrais qu'il avoue tout ce qu'il n'a pas avoué."
Elle fait référence à deux morts mystérieuses. Celle du père de Florence, victime d'une chute mortelle en 1988 dans sa maison des bords du lac d'Annecy. Il y a aussi la mort du propriétaire de Romand, disparu dans l'incendie de sa caravane.
Des zones d'ombre dans l'environnement de Romand "qui ont été oubliées", regrette Catherine.