Martial Darbon, l'ex-leader de "C'est qui le patron ?!", prend sa retraite

Martial Darbon, le charismatique président de la coopérative Bresse-Val de Saône qui vend son lait sous le label "C'est qui le patron ?!", a pris sa retraite. L'occasion pour les cinquante producteurs qu'il a sauvés de la faillite, de lui rendre hommage vendredi 7 février.

Salle des fêtes de Chevroux, petite commune de l'Ain, vendredi dernier. Il est 20h30. L'impatience est palpable parmi la centaine de personnes réunies. Chacun est dans la confidence, tous ont pris soin de se rassembler bien avant l'arrivée du "héros" de la soirée. 

Martial Darbon, désormais ancien président de la coopérative Bresse-Val de Saône, pense venir à une fête de village. Il est loin de se douter que c'est à son propre pot de retraite qu'il va assister. Lui, l'homme qui a sauvé des familles de la banqueroute, il y a un peu plus de trois ans.

A la découverte du pot-aux-roses, l'émotion est grande. Des applaudissements par-ci, quelques blagues par-là, des embrassades partout. Mais pas de larmes pour ce grand sensible, comme s'il se faisait violence. "Je veux que ça reste joyeux !"

Et d'ajouter : "si on est là ce soir, c'est parce qu'on a, ensemble, fait un truc un peu surhumain. Mais aussi parce qu'on a pris beaucoup de coups ensemble avant."
 

Retour en 2016

A l'époque, lui et ses collègues éleveurs de vaches laitières sont au bord du gouffre financier. Ils ne vendent alors leur lait qu'au prix de 22 centimes d'euros le litre. Insuffisant pour pouvoir vivre de l'activité. "Quand il y a cinquante exploitations en jeu et qu'on ne sait pas comment ça va se terminer, c'est dur !", se remémore Martine Darbon, l'épouse de Martial, qui se souvient aussi "des nuits blanches à essayer de trouver des solutions". "A cette période, notre souci c'était que le téléphone sonne pour nous apprendre qu'un producteur était passé à l'acte. Heureusement, on n'a perdu personne", complète Wilfried Paccaud, aujourd'hui à la tête de la coopérative.

Lorsqu'elle perd son dernier client, Bresse-Val de Saône est à l'agonie. Martial tente d'alerter les habitants et les commerces alentours. Il part distribuer des tracts dans les supermarchés de la région. L'un des prospectus arrivera entre les mains du directeur du Carrefour Market de Vonnas. Emu par la démarche de l'agriculteur, il le rencontre et lui assure qu'il fera remonter l'information au siège.
 

Une histoire d'hommes et de consom'acteurs

Le miracle opère. Très vite, Martial est mis en relation avec Nicolas Chabanne, le père des "Gueules cassées", cette campagne en faveur de la consommation des fruits et légumes "moches". Un alignement des planètes qui donnera naissance à "C’est qui le patron ?! La marque du consommateur" . En coulisses, l'usine de conditionnement LSDH, basée dans l'Indre, joue aussi le jeu et le groupe Carrefour devient partenaire. "C'est une histoire d'hommes avant tout. Au début, on n'a pas eu besoin de contrats entre nous, on s'est promis des choses, on les a réalisées", a expliqué Emmanuel Vasseneix, PDG de la laiterie, dans un message vidéo diffusé lors de la soirée. 
 
Sur un litre de lait vendu 99 centimes d'euros, les producteurs touchent désormais 39. Grâce au succès de la brique bleue, vendue à plus de 114 millions d'exemplaires entre 2016 et 2019, la rémunération des éleveurs augmente. En trois ans, un couple d'exploitants agricoles par exemple triple son salaire, passant de 500 euros pour deux à 1500.

"Il y a des moments où je suis un peu obtus. Et ce côté têtu m'a permis d'aller de l’avant, et de toujours croire au meilleur de l'homme", philosophe celui qui a ouvert la voie d'une juste rémunération des producteurs de lait.

Présent à la fête, Bertrand Swiderski, directeur Monde développement durable de Carrefour, rebondit : "Il faut que le paiement du producteur soit quelque chose de standard. Il faut qu'on emmène tout le monde. Je dirais qu'on a fait un gros pas. Mais on n'a pas encore fait tous les pas."  

"C'est qui le patron ?!" commercialise aujourd'hui une trentaine de produits, à l'image de la viande et, très prochainement, des pommes de terre. 3000 familles vivent de cette marque partie de l'Ain. 

Reportage Franck Grassaud, Maryne Zammit
Moment d'émotion, vendredi 7 février, dans une salle des fêtes de l'Ain... Les agriculteurs à l'origine de la marque ©France 3
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