Un ruisseau qui fait couler de l'encre : des cours d'eaux qui ne sont plus entretenus et des riverains en zone inondable

Des habitants de plusieurs villages du bas Bugey sont en passe de constituer un collectif pour protester contre le classement en zone inondable de leurs terrains et maisons. En cause? Un ruisseau qui peut se mettre en colère lors de crues centennales. Selon eux, tout irait bien si le cours d'eau était normalement entretenu. Ce samedi, ils ont manifesté leur mécontentement.

Un coup dur, une douche froide. Les 4 000 habitants de  trois villages traversés par le Buizin ont la tête qui tourne depuis que leur secteur est l’objet d’une étude préliminaire à l’établissement d’un PPRN (Plan de prévoyance des risques naturels) autour des risques d’inondation.

Le Buizin ? Un ruisseau d’une douzaine de kilomètres de long qui, une fois par siècle, peut se transformer en ogre, sortir de son lit et donner des sueurs froides aux riverains. Précisément ce qui s’est passé quelques semaines avant l’été à Saint-Denis-en-Bugey. Les débordements ont entraîné des inondations, et comme le phénomène a tendance à se reproduire avec les fortes précipitations qui tombent sur le Bugey, la préfecture préfère prendre les devants, par principe de précaution.

Curage et nettoyage tombés à l'eau

Mais qui dit classement pour risques d’inondations dit réduction des possibilités de construire, à tout le moins respecter des règlementations strictes. Et pour certains propriétaires possédant déjà leur maison, on redoute de subir une décote de son bien. Dans les trois villages de Vaux-en-Bugey, Saint-Denis-en-Bugey, et Ambutrix, l’inquiétude gagne, de même que l’incompréhension. Passer en zone inondable revient à être marqué au fer rouge.

« La grande majorité du temps, le lit du Buizin, c’est  3 mètres de largeur, 15 cm de profondeur et un débit de moins d’un m3 par seconde. Oui, quand il y a de fortes pluies, ou en période de fortes crues, on a un bon mètre de profondeur par endroit, on passe à 4m3 par seconde, mais tout irait bien si le cours d’eau était correctement entretenu ! », explique Patrick Paccallet, qui habite la commune d’Ambutrix depuis 66 ans. En a été élu au conseil municipal de 1989 à 2014 dont les dix dernières années en tant que maire.

Alors, le ruisseau, Il dit bien le connaître. Sur certaines portions, son lit est très encaissé et souvent embarrassé de ronces et de branchages qui se mettent en travers. « C’est ce matériau qui va se coincer sous les ponts. Si le travail de curage et de tronçonnage était fait régulièrement sur les trois kilomètres qui peuvent poser problème, on n’aurait aucun souci à se faire », clame l’ancien édile qui se souvient d’une opération de nettoyage à laquelle avaient participé les gens du village d’Ambutrix, dans les années 90. « Là où nous avions nettoyé, nous n’avons connu aucun débordement depuis », constate-t-il avec satisfaction.

Si ces travaux étaient réalisés, les terrains et les maisons ne se retrouveraient pas en zone inondable

Patrick Paccallet, riverain

Envoyer une signal aux pouvoirs publics

Le Buizin, c'est un petit canal aménagé au XIV e siècle à flanc de colline par les moines qui voulaient ainsi abreuver leurs moulins, aurait donc tout pour s’écouler sans encombres. Dans les bourgs qu’il traverse, il est encadré par des parois de pierre qui facilitent la fluidité de son parcours.

Avec d’autres membres du collectif qui est en train de voir le jour pour se battre contre le projet de plan des risques et « envoyer un signal aux pouvoirs publics », Patrick Paccallet a tenté de chiffrer le coût pour les collectivités locales que représenterait un entretien effectué par une entreprise prestataire. Une entreprise qu’il a consultée avance un budget de 3600 euros TTC pour ce nettoyage. « Soit 1 200 euros par commune, une somme ridicule à l’échelle d’u budget communal. Si ces travaux étaient réalisés, les terrains et les maisons ne se retrouveraient pas en zone inondable. »

 

Surtout ne pas être classé en I3

A Saint-Denis-en-Bugey, Ludovic consacre une bonne part de son temps libre à construire des maisons. Depuis deux ans qu’il habite la commune, deux pavillons sont sortis de terre à 200 mètres du ruisseau. Cet hiver il a voulu acheter une parcelle de 600  m2 pour poursuivre ses constructions. « Mais à la mairie, on m’a présenté une carte de zone d’inondation qui montrait que j’étais en I2, autrement dit en risques d’inondation modéré », observe Ludovic. Traduction ; la maison qu’il envisage de bâtir doit être rehaussée de 20 cm par rapport à la normale. « Ca ne pose pas de problème quand on part sur du neuf. Mais pour les permis de construire classés en I3, c’est dramatique. Ils ne peuvent plus construire et pour ceux qui possèdent une maison existante, c’est une dépréciation des biens et une décote assurée en cas de revente. »

Joint par téléphone pour recueillir son point de vue et ses explications, le maire d’Ambutrix n’a pas souhaité répondre à nos questions.

Ce dimanche, l’ambiance était morose lors de la petite manifestation organisée par le collectif qui dit vouloir se mettre en ordre de bataille pour faire valoir le point de vue des habitants concernés. Ce qu’ils attendent : « faire modifier le futur PPRN et revenir à une situation plus conforme à la réalité », écrit Patrick Paccallet qui ne ménage pas son énergie pour conserver son Buizin et… sa sérénité. 

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