Une petite commune de l'Ain se mobilise en faveur d'un jeune migrant. Arrivé du Mali à l'âge de 16 ans, il vient d'apprendre qu'il doit quitter le territoire français. Il est employé en tant qu'apprenti dans la boucherie du village. Son patron, comme les habitants, ne comprennent pas cette décision. Une pétition a été lancée. Elle fait un carton.
Ibrahim passe une tête dans l'arrière-boutique de la boucherie du village. Il vient saluer ses camarades qui, comme lui, ont bénéficié du soutien d'un patron sensibilisé à la cause des migrants. Dans cette commune du département de l'Ain, Jérôme Lièvre est artisan boucher. Il a besoin de main-d’œuvre. Pour lui, former des jeunes, c'est indispensable.
Ce sont des jeunes qui ont besoin d'aide. Ils sont motivés, ils ont envie de travailler. J'ai besoin d'eux, j'en suis très content.
Jérôme Lièvre, boucher du village
Ibrahim est arrivé en France à l'âge de 16 ans, après avoir quitté le Mali, son pays d'origine. Depuis deux ans, il a appris le français et un métier. Après ses efforts pour s'intégrer, il vient d'apprendre qu'il devait quitter le territoire français. Il est sous le coup d'une "OQTF" (une Obligation de Quitter le Territoire Français). Il a également appris qu'il n'avait plus le droit de travailler, maintenant qu'il est majeur.
C'est comme quelqu'un qui construit sa vie et que, d'un seul coup, tout bascule. J'ai appris le français, j'ai eu un diplôme, je prépare un CAP. Je ressens de la tristesse, parce que j'aimerais travailler, alors qu'on me dit que je n'ai plus le droit.
Ibrahim
« Un point de réglementation à revoir »
Le jeune homme est connu et reconnu dans le village, les habitants lui apportent des témoignages de sympathie. « Les gens qui bossent, il faut les encourager. Qu'il soit expulsé, c'est aberrant » dit un client de la boucherie. La maire du village reconnaît que la situation n'est pas nouvelle. « Quand les mineurs deviennent adultes, ils ne sont pas protégés de la même façon par l'État » explique-t-elle. Peut-être faudrait-il revoir un petit point de la réglementation, selon elle, pour éviter ce genre de situations.
Nos villages sont ouverts à tous ces jeunes, il y a du travail pour tout le monde. On n'est pas réfractaires aux migrants, on veut qu'ils soient bien chez nous.
Françoise Veysset- Rabilloud, maire de Vaux-en-Bugey
Une pétition en soutien
Pour ne pas rester inactive, la commune de Vaux-en-Bugey a posté sur son compte Facebook une pétition. La commune compte 1200 habitants, près de mille d'entre eux l'ont déjà signée.
Jérôme, l'artisan boucher, est satisfait de voir une telle mobilisation. Il ne pensait pas recevoir autant de soutien lui aussi. « Ça me fait plaisir de voir que le village est là pour mon apprenti. Il ne mérite pas de quitter le territoire. J'ai besoin de lui, et il a fait tellement d'efforts depuis qu'il est arrivé ».
La justice va décider…
Dans un coin, à part, Ibrahim regarde dans le vide. Quand on lui demande ce qu'il ressent, il explique difficilement ses sentiments. Tout juste, retient-il dans un sanglot que « ce village, c'est tout pour moi, j'ai été accepté ».
L'OQTF a été prononcée pour le 8 juillet prochain. Un recours a été demandé par un avocat. Ibrahim et tout le village sont dans l'attente d'une décision de justice.