Dans le département de l'Ain, une ferme du XVIe siècle pourrait bientôt être détruite pour faire place à des logements neufs. Une aberration pour ses défenseurs qui demandent sa restauration et qui illustre le patrimoine rural en péril.
En Bresse, une ferme du XVIe siècle est aujourd'hui coincée entre une zone commerciale et un lotissement. La ferme du quartier de la Neuve, à Viriat, a des colombages et des murs en terre, sera-t-elle bientôt rasée ? C'est le projet d'un promoteur qui veut démolir la bâtisse et réaliser un lotissement de sept à huit pavillons. Un compromis de vente a déjà été signé.
Sauver, restaurer plutôt que détruire
Jean-Marie Poly habite le lotissement voisin et s'est mué en défenseur du patrimoine paysan. Avec Marc Genessay, président de l'association Viriat Patrimoine, ils veulent préserver "ce symbole de l'histoire locale". Depuis neuf mois, ils luttent pour sauver la ferme, une des dernières intactes autour de Bourg-en-Bresse. "Au lieu de démolir, on devrait la restaurer. La transformer en salle de quartier, d'exposition, en faire une annexe de la mairie... tout pour la sauver !", s'insurge Jean-Marie Poly.
Le défenseur a interpellé le maire de la commune, Bernard Perret (DVD) lors d'une réunion publique en mars dernier. Mais celui-ci déplore un manque de ressources financières. "Je n'ai pas le budget pour restaurer cette ferme, aujourd'hui le promoteur est en droit de la démolir et réaliser des lots pour de la construction neuve", détaille l'élu de Viriat.
Alors, les défenseurs se sont tournés plus haut, vers le ministère de la Culture et sa représentation à Lyon. "On ne peut pas tout sauver malheureusement, regrette Josiane Boulon, conservatrice à la Direction Régionale des Affaires Culturelles, quand on a un bâti ancien, on a une histoire et il a un intérêt, ça fait mal au cœur mais on ne peut pas s'arrêter sur tous les bâtiments qui pourraient subir une démolition ou une dénaturation". D'autant que la DRAC regarde l'environnement, et dans ce cas, la ville a rattrapé la ferme. Il ne reste que 5000m2 autour d'elle. Si l'Etat ne peut pas la sauver, un privé peut-il prendre le relais et en faire des appartements par exemple, tout en respectant la structure ? Les soutiens de la ferme en rêvent. Tant que les bulldozers ne sont pas dans la cour, l'espoir est pour eux permis.
4 900 monuments historiques
En région Auvergne-Rhône-Alpes, près de 4 900 monuments sont protégés, sur 45 991 immeubles au niveau national. Il est difficile d'estimer un nombre précis de monuments en danger dans notre région.
La mission gouvernementale "Patrimoine en péril", confiée à Stéphane Bern depuis 2017, indique mener 416 opérations de recherche de financements pour des sites publics ou associatifs dans notre région. Selon la Fondation du patrimoine, 6 300 sites seraient concernés en France.
Dans la liste des bâtiments en danger : des édifices religieux, des sites archéologiques mais aussi des bâtisses industrielles comme les Tanneries Ronzon à Saint-Symphorien-sur-Coise dans le Rhône ou l’usine de peignes en plastique d’Oyonnax qui a par ailleurs été sélectionnée pour le Loto du patrimoine 2024 parmi 18 sites en France.
Quel financement ?
En AURA plus de 21 millions d’euros ont été injectés par les pouvoirs publics en 2022 pour entretenir et restaurer le bâti historique. Tous les acteurs du millefeuille territorial prennent leur part : directions régionales des Affaires culturelles, régions, départements, communes, pour les monuments publics comme pour les propriétés privées.
Mais l'implication financière dépend du classement des monuments. Si ces derniers sont "inscrits" à l'échelle régionale, le taux de subventions publiques représente 20% du prix des travaux, contre 40% pour un bâtiment classé "monument historique", soit le niveau de protection le plus élevé.
Le secteur privé et les particuliers peuvent également participer directement à la protection du patrimoine. La Fondation du patrimoine récolte chaque année 2 millions de dons en AURA et organise au niveau national le "Loto du patrimoine". L’an passé, la loterie a d'ailleurs rapporté 28,4 millions d’euros, un chiffre en hausse.