Mélanie Croiset, interne en médecine dans l’Allier, n’avait pas imaginé vivre sa grossesse pendant une épidémie. Arrêtée en raison de contractions dès les premiers jours du confinement dû au coronavirus, elle regrette de ne plus pouvoir être sur le front et livre son quotidien de femme enceinte.
« Je n’aurais jamais pensé vivre ma période de grossesse comme ça ». Mélanie Croiset, interne en médecine dans les maisons de santé de Saint-Pourçain-sur-Sioule et de Bellenaves dans l’Allier a été arrêtée au début du confinement à la suite de violentes contractions. Confinée pendant son sixième mois de grossesse, la jeune femme volontaire regrette de ne pas pouvoir être sur le « front au pire moment de la crise du coronavirus ».
«J’ai été arrêtée avant la vague, le confinement commençait tout juste et les consultations pour le coronavirus étaient rares. Même si nous avions déjà mis en place les mesures de sécurité ». Si la jeune femme explique ne pas avoir eu peur pour sa grossesse, elle se souvient cependant avoir manqué de matériel : « J’ai très vite eu un masque comme j’étais enceinte mais c’était des masques périmés qui dataient de l’épidémie de SRASS en 2003. Le reste nous a été volé. En tant que médecin généraliste, nous sommes en première ligne, ce n’est pas normal ».
« Nous sommes là pour sauver des vies pas pour rester chez nous »
Pourtant malgré le manque de protection et les nombreux risques encourus, la jeune femme dévouée a eu du mal à accepter son arrêt de travail. «C’est très dur psychologiquement de rester à la maison pendant que mes collègues se démènent. J’ai l’impression d’avoir quitté le navire avant le naufrage. Nous sommes là pour sauver des vies, par pour rester chez nous. » Mais enceinte de 6 mois et sujette à des contractions prématurées, la jeune femme a conscience qu’elle n’a pas le choix. «J’aurais pris trop de risques et je ne dois pas stresser pour ne pas provoquer un accouchement prématuré qui compliquerait davantage les choses». Impuissante, elle a tenté de proposer son aide par télécommunication mais la maison de santé privilégie les rendez-vous « en vrai ».Une période anxiogène pour une femme enceinte
Si elle n’est pas inquiète pour sa santé car elle estime avoir été confinée assez tôt et peut se surveiller grâce à ces compétences de médecin, Mélanie sait à quel point la période peut être anxiogène pour une femme enceinte. « Nos capacités respiratoires sont diminuées lors de la grossesse et nous sommes plus facilement exposées aux risques d’attraper le coronavirus qui se dépose sur les poumons. » Pour le bébé pas de risque tant qu’il est à l’intérieur explique la jeune femme, même si «à sa naissance il faudra être vigilants. » Pour se documenter, Mélanie préfère lire des rapports médicaux et suivre les conseils de médecins sur des groupes d’entraide plutôt que de lire les médias ou réseaux sociaux qu’elle trouve parfois « trop alarmistes ».Aux inquiétudes de la future maman s’ajoute aussi la déception de ne pas pouvoir préparer comme convenu l’accouchement. « Je n’ai rien pu acheter ni préparer pour l’arrivée du bébé, tous les magasins sont fermés. Certains magasins livrent à domicile mais les délais sont trop longs ou alors réservés aux personnes qui arrivent à leur terme. Sans parler des cours pour se préparer à l’accouchement auxquels on ne peut pas assister. »
Préparation à distance
Alors en attendant que la situation ne s’améliore, Mélanie suit les consultations avec sa sage-femme par visioconférence. « La dernière fois c’était un cours pour apprendre à gérer sa respiration pendant les contractions. Si la méthode par vidéo ne permet pas à la sage-femme de pouvoir tout surveiller ni intervenir, elle rassure les futures mamans et permet de pouvoir « se préparer du mieux qu’on peut chez soi ». Le reste du temps Mélanie se surveille seule avec un tensiomètre « pour éviter le plus de contact avec le personnel soignant » même si elle doit être observée une fois par semaine par une sage-femme pour contrôler « l’ouverture de son col ».
En cas d'accouchement prématuré Mélanie le sait elle risque gros, « d’autant que les services de réanimation sont débordés ». La jeune femme dynamique respecte donc du mieux qu’elle peut son « alitement ». Si son accouchement se déroule pendant la période de confinement, son conjoint pourra y assister mais devra rendre visite à son enfant qu’une seule fois par jour « pour limiter le contact avec l’extérieur ». Prévu mi-juin, Mélanie espère que d’ici là les mesures se seront assouplies et que le confinement sera un lointain souvenir.